Fyctia

Une semaine que je traînais chez Sloan, être sans domicile depuis près de huit ans pesait toujours autant dans ma vie. Je ne sais pas trop, si je dormirais encore dans le hall de son immeuble s'il ne m'avait pas trouvé un beau jour en rentrant de soirée. Ce garçon représente beaucoup pour moi, il est depuis trois ans maintenant mon meilleur ami. Il est brun, les yeux d'un bleu transcendant et il a toujours le don de se mettre dans des galères de boulots. Il a beau être étudiant, Sloan est riche de part son beau père et le jeune homme a toujours voulu récupérer l'entreprise familiale. Il était un garçon adorable en dépit du fait qu'il collectionnait les femmes, ne sachant jamais comment se comporter vis-à-vis de celle-ci, mais dans le fond je le comprenais ce n'était pas facile de gérer les sentiments de quelqu'un d'autre surtout si dans notre cas nous ne sachions pas gérer les nôtres. Sloan et moi étions dans la même université à Harvard précisément, nous ne nous quittions plus, étant orpheline il était ce qui se rapprochait le plus d'une famille à mes yeux.

- El' quand est-ce-que tu vas te décider à quitter l'appartement et te pointer en cours ?

Depuis que nous étions rentrés sur spring break à Las Vegas, je n'avais pas osé mettre les pieds en cours de peur de tomber sur Johan. Je n'avais pas encore expliqué la situation au jeune homme et je n'étais même pas certaine qu'ils se souviennent de notre mariage. Pour ne rien arranger, je venais de recevoir les papiers de Vegas, j'avais alors eu un choc en découvrant mon nouveau patronyme.

- Allé Elbeth lève toi.

Le bras de mon meilleur ami qui me tire pour me sortir du lit et je grogne, je ne veux pas affronter la situation, je ne veux pas devoir faire face à nouveau à tous ceux pourquoi j'avais décidé de souffrir il y a deux ans. Je finissais par aller dans la salle de bain et je me retrouve face à mon reflet dans le miroir. Mes yeux dans ceux de cette brune en face de moi, les cheveux en pagaille qui tombe dans son dos, tandis que ses yeux vert se font fatiguer à cause des cauchemars qu'elle ne cesse de faire. Je regarde cette jeune femme en face de moi et je me demande comment elle fait pour tenir encore après tous ceux dont elle a dû faire face. Une main qui se glisse dans mes cheveux et un long soupire quitte mes lèvres alors que j'entends tambouriner dans la porte.

- Dépêche toi !

- Oui c'est bon j'arrive.

Je m'attache les cheveux et termine de me préparer alors que je sors de la salle de bain pour le rejoindre dehors alors qu'il est déjà dans la voiture, assise à ces côtés, j'appuis mon coude contre le rebord de la porte et regarde dehors.

- Je ne sais pas comment je vais pouvoir lui demander l'argent, je ne suis pas cette fille tu le sais.

- El, tu sais que t'as pas le choix, si tu veux continuer à étudier tu dois payer ton semestre et ce mec est blindé, sa famille c'est genre les Kardashian de Londres.

- Merci tu m'apprends rien. Je te rappelle que je suis sortie avec son frère pendant deux ans et que si je l'ai quitté c'est en partie parce que je ne ressemble en rien à leur classe sociale.

- Oui et bien tu aurais dû y penser avant de te marier avec l'un d'eux !

Tirage de langue et coup dans l'épaule, c'était sa faute, il aurait dû me dire que c'était un Carthright.

Ma relation avec l'aîné de la famille était compliquée dans la mesure où nous nous étions connu à mon arrivée à Boston, il s'était montré désagréable en me volant mon taxi et je n'avais pas hésité une seule seconde pour lui dire ma façon de penser. De fil en aiguille nous étions tombés amoureux, la première fois pour moi, j'avais la sensation de vivre un vrai compte de fée, si en apparence Matthew était un homme dépourvu d'affection et de sentiments humains, il s'avéra qu'il était un romantique et qu'il tenait sincèrement à moi. J'étais pour ainsi dire heureuse, jusqu'à ce que je réalise qu'il souhaitait que notre relation ne soit jamais révélée au grand jour à cause de sa famille, à cause de sa condition et de sa réputation. C'est ce jour-là que je fus frappé par nos différences.

Je n'avais absolument rien de classe, mon passé était tellement sombre et dramatique que je ne l'évoquais jamais, encore envahit par les cauchemars. Ma mère était une alcoolique qui n'avait jamais su s'occuper d'elle et encore moins de moi et mon père quant à lui avait toujours été un homme détestable qui n'hésita pas à abandonner femme et enfant à la première difficulté. Il est mort quelques années plus tard dans un accident de voiture. Ma vie avec ma mère se résumait à des hommes de passage, jusqu'à ce qu'il y en ait finalement un qui reste et qui décide de s'installer lorsque j'avais neuf ans. Il nous battait ma mère et moi et n'hésitait pas à venir me rejoindre la nuit dans ma chambre en me faisant juré de ne rien dire si je ne voulais pas que ma mère en paye les conséquences.

Mon cauchemar a duré près de sept ans, j'étais âgé de seize ans lorsque je suis rentrée du collège et que je l'ai trouvé là étendu par terre avec mon beau-père au-dessus d'elle les mains autour de son cou. Ma mère est morte ce jour-là et lui a fini en prison grâce à mon témoignage. Après ça, je n'ai fais qu'enchaîné les petits boulots pour me payer l'université ou bien à voler.

- Oh Elbeth, t'es avec moi ?

Mon regard trouve celui de mon meilleur ami inquiet, j'hoche la tête et fini par me redresser sur mon siège.

- Est -ce que je dois lui parler de Matthew ?

- Franchement, je ne pense pas que ce soit une bonne idée. Tu devrais t'en tenir au plan, tu sais que Johan ne pourra pas divorcer à cause de son père qui ne tolérera jamais que son fils est fait une connerie aussi grosse que ce marié à Las Vegas.

- Alors, je lui dis que je jouerais les femmes amoureuses et que je ne dirais rien à condition qu'il accepte de payer mon année à Harvard.

- Voilà, maintenant tu vas devoir aller l'affronter et te montrer très persuasive.

Je laissais alors Sloan me conduire au domicile de Johan, je ne comprendrais jamais comment il faisait pour toujours avoir des informations sur tout le monde, si il n'était pas mon meilleur ami je me méfierais certainement de lui. Seulement, maintenant j'avais autre chose à penser comme la manière dont j'allais m'y prendre avec le jeune homme et ne pas m'angoisser sur l’accueil qu'il me réservait.