Cléoda Iseth Un hiver mouvementé Chapitre 1.2 : Elle

Chapitre 1.2 : Elle


J'ignore cette voix aigüe et continue ma route n'ayant aucune envie de me retourner. Les portes du RER s'ouvrent et mon corps s'engouffre à l'intérieur. Je suis sauve.


Ou pas.


— Elle, tu ne m'as pas entendue ? me demande cette si charmante voix qui a décidé de me poursuivre jusqu'aux tréfonds de la terre.


Ses yeux noisette me rappellent ceux d'un écureuil, il ne manque plus qu'elle se mette à en ronger une. Sa question est d'une stupidité aveuglante, il faudrait être sourd pour ne pas l'entendre. Je l'ai simplement ignoré, mais elle n'a pas compris le message visiblement. Et comme je risque de travailler avec elle, je ne peux pas vraiment l'envoyer balader, alors j'active de nouveau mon mode Entreprise. Bien que l'envie me manque autant que mon lit.


— Non, désolée, murmuré-je d'un air faussement gêné auquel elle croit.


— Ce n'est pas grave, l'important c'est que j'ai pu te rattraper ! s'exclame-t-elle sur un ton enjoué.


À peine arrivée, cette fille m'épuise déjà et sa joie de vivre me draine. Pourquoi s'acharne-t-elle sur moi ? Je ris à contre cœur et hoche la tête.


— Un afterwork est organisé pour les nouveaux arrivants, histoire de faire plus ample connaissance autour d'un verre. Il faut à tout prix que tu viennes.


Je m'apprête à dire non quand les mots qu'elles prononcent ensuite me font changer d'avis.


— James sera là aussi. Franchement on ne rate pas une occasion comme celle-ci, s'esclaffe-t-elle.


— Oh vraiment ? m'étonné-je, pour de vrai cette fois-ci.


Nous sommes sur la même longueur d'onde, une première. Parce qu'effectivement ce n'est pas le genre d'opportunité à manquer.


— Oui, il ne participe pas à ce type d'évènement d'habitude, mais comme vous êtes plusieurs à rejoindre son bâtiment, il a décidé de venir. Et putain, j'ai trop hâte de le voir en chair et en os. Il y aura aussi Marc, mon responsable qui est c-a-n-o-n et Édouard, le boss du bâtiment Miracle. À eux trois, ils forment le trio des célibataires les plus convoités de LMM Paris. C'est un rêve qui devient réalité de les avoir ensemble en petit comité.


Elle humecte ses lèvres pèches et ses iris brillent d'excitation.


— Alors, tu viens ?


Elle papillonne des paupières et se saisit de mes mains. Je déglutis. Ce contact me dérange, je déteste que l'on me touche surtout que nous ne nous connaissons même pas ! Pourtant, je reste calme et glisse même une pointe d'humour.


— Comment pourrais-je refuser ?


James, mon recruteur et mon responsable sera présent et il me tarde de revoir cet homme brillant. Même si je dois supporter Charlie toute une soirée, ça en vaut le coup.


— Super ! se réjouit-elle.


Pendant une seconde, j'ai cru qu'elle allait me prendre dans ses bras, mais elle s'est retenue et a même libéré mes mains. Pas mon cerveau. Cette fille parle beaucoup, trop, et sa voix en plus du bruit environnant me donne la migraine. Elle me raconte des morceaux de sa vie, mais je n'écoute pas. Une seule envie m'anime : mettre mon casque et me plonger dans ma musique. Seulement elle est du travail alors je me contrôle et me contente d'hocher la tête à tout ce qu'elle dit et de sourire par moment.


Nous arrivons enfin à l'arrêt du bar. La bouche de Charlie n'a pas cessé de s'ouvrir une seule seconde. Son débit de parole m'impressionne, elle prend à peine le temps de respirer. Nous marchons jusqu'au lieu de rendez-vous grâce à notre meilleur ami google map et nous faisons accosté par trois hommes pas désagréables à regarder, mais importuns.


— Hé, bonjour mesdemoiselles.


Au secours.


Je les ignore et passe mon chemin, mais Charlie ne partage pas mon avis et s'arrête pour leur répondre.


Génial.


Je les observe de loin. Ma collègue rigole avec eux comme s'ils se connaissaient depuis toujours. J'entends des morceaux de leur discussion des plus passionnantes tout en gardant bien mes distances.


— C'est quoi son problème à ta copine ? demande la petite fraîcheur parisienne.


Un peu trop éméché pour un lundi soir, le type essaye de jouer au gros dur dans son survêtement Lacoste avec sa mèche trop longue. Il me répugne. D'une, je n'ai aucun problème et de deux, je ne suis certainement pas sa copine. De nombreuses insultes traversent mon esprit et qu'est-ce que j'aimerais leur balancer dans la gueule. Ce serait hilarant, mais un brin imprudent. Charlie continue de discuter et le temps défile pendant que je fais la potiche à côté d'un lampadaire. Les bras croisés, mon pied tape frénétiquement le sol.


— Elle, entends-je derrière mon dos.


Je reconnaitrais cette voix entre mille avec sa sonorité si douce et apaisante. Je me retourne et tombe nez à nez avec celui qu'il me tardait de retrouver.


— James, quel plaisir, le salué-je, en esquissant un gigantesque sourire qu'il me retourne.


— J'avais hâte de te revoir, chuchote-t-il, en me faisant la bise.


— Moi aussi, murmuré-je, les joues rougies et certainement pas par le froid hivernal.


Heureusement la nuit est tombée et le lampadaire n'éclaire que faiblement nos visages ou je serais passée pour la première des idiotes.


— Je suis content que tu sois venue, parce que nous n'avons pas eu le temps de nous voir aujourd'hui et...


— James, wow, enchantée, je m'appelle Charlie, j'ai rejoint le pôle Environnement, nous allons donc être amené à nous recroiser. C'est vraiment un honneur de te rencontrer ! le coupe la petite énergumène qui a bien vite délaissé les hommes rencontrés un peu plus tôt.


Elle se place devant moi et tend sa minuscule main à James avec un sourire radieux.


— Je suppose que je n'ai pas besoin de me présenter, répond-t-il l'air rieur.


Elle voltige littéralement sous le charme du beau brun ténébreux qui saisit sa main. Mes iris tombent sur la mienne, seule. Qu'est-ce que j'aurais aimé qu'il la prenne. À la place, je me retrouve isolée sur le côté.


— Si vous voulez bien me suivre, mesdemoiselles ! s'exclame mon chef, en avançant vers le bar.


Il n'en faut pas plus à Charlie pour succomber et enclencher son mode Séduction.


— Quel charmeur vous faites, James, susurre-t-elle de sa voix la plus affriolante.


James ou le gentleman parfait, éduqué, intelligent, respectueux, avec un sens de l'humour développé et un charme irrésistible, lui offre pour réponse un clin d'œil accompagné d'un sourire d'ange. Charlie se trouve à deux doigts de tomber dans les pommes, fruits de son imagination défendue, en compagnie du jeune homme de seulement vingt-huit ans occupant déjà un poste de responsable de bâtiment.


Diplômé de l'une des meilleures écoles d'ingénieurs de France et d'une des meilleures écoles de commerce, il est un célibataire convoité par toutes les femmes de l'entreprise. Car l'épouser équivaut à signer pour une vie palpitante et riche d'aventures sans jamais manquer de rien. Je ne peux oublier le jour où j'ai passé mon entretien avec lui, trois mois plus tôt, courant septembre, après la fin de mon contrat aux États-Unis.

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9 commentaires

Alexenrose

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Il y a 4 ans

Ce James me plait bien :P

Senefiance

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Il y a 4 ans

Je sens que ça va être chaud bouillant 😍

Cléoda Iseth

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Il y a 4 ans

Héhé oui ;)

Mary Cerize

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Il y a 4 ans

Chaud devant ! 😅

Cléoda Iseth

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Il y a 4 ans

Ahah ^^

Rosie Clarks

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Il y a 4 ans

oulahlah attention beau gosse !

Cléoda Iseth

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Il y a 4 ans

Alerte rouge 😂
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