Fyctia
Jour 2 - Sam
J'ai trouvé ça si simple. J'en frissonne presque.
Elle m’a suivi avec une facilité déconcertante. Et j'ai trouvé ça plutôt plaisant. Ce n'est pas dans mes habitudes de séduire une fille et de l'aborder avec autant d'aplomb. En temps normal, et face à une autre, j'aurais tourné les talons sans me retourner.
Mais là, c'est différent.
L'alcool aidant, et surtout grâce à la drogue puissante que j'ai versé dans son verre, elle n'a pas résisté. Elle a titubé à mes côtés jusqu'à ma voiture et s'est laissée conduire.
Pas de caméra. Pas de voisins curieux.
Tout était prévu. Et ça a fonctionné à merveille.
Je pose l'arrière de ma tête contre le mur et lève les yeux au plafond. Je suis assis à même le sol dans cette grande pièce vide et sombre. Le parquet en pointes de Hongrie luit à travers les minces rayons de soleil qui pénètrent par la fenêtre. Le mois de novembre est froid mais beau. L'hiver n'est pas encore arrivé.
Hier, pendant son sommeil, j'ai réussi à m'éclipser pour acheter le nécessaire pour vivre. Des plats préparés et quelques bières. La cuisine attenante au séjour est équipée. Heureusement. Il ne me reste plus qu'à trouver de quoi me meubler.
Je jette un œil au téléphone posé par terre près de moi. J'espère l'avoir bien allumé. C'est la première fois que j'utilise un portable avec carte pré-payée.
"Par sécurité" m'a dit Pawikov.
Après la première nuit, je l'ai informé que j'avais la fille. Depuis, rien. J'attends désespérément qu'il me donne la marche à suivre. Les instructions notées à la hâte dans la pochette cartonnée qu'il ma remise ne me disent pas ce que je suis censé faire d'elle.
"Tu la ramènes et tu la gardes"
C'est tout.
"Tu surveilles".
Oui, mais après ?
Déjà presque deux jours qu'elle est là, étendue par terre sur ce matelas poisseux. Elle dort presque tout le temps. Je lui humidifie les lèvres et l'a fait boire. Mais elle ne réagit pas. Sa léthargie est quasi totale. Ses membres ne bougent même plus, elle n'essaye pas de se débattre. Et ça me déstabilise.
Une sonnerie sourde m'interpelle. Le boitier noir vibre et clignote à mes côtés.
Enfin.
Je fais glisser mon pouce sur l'écran et le porte à mon oreille. Moins je parle, mieux c'est.
- Alors ?
La voix de Pawikov se fait grave et sèche.
- Tout est OK.
- Parfait.
Je tente d'en savoir plus. J'aime savoir où je vais.
- Et maintenant ?
Un soupir et un long silence. Presque trop long.
- Je négocie. Tu surveilles.
Je ne comprends pas encore ce qu'il me demande.
- Combien de temps ?
- Quelques jours.
Quelques jours ? Je savais que cette mission serait longue vu la somme d'argent qu'il me propose pour faire ce sale boulot. Mais, plus que tout, je veux savoir si la porte de sortie n'est pas loin. Je répète ma question, impatient.
- Combien ?
- Une dizaine de jours. Je te contacterai.
Puis un clic et plus rien. Il a raccroché. Furieux, je serre les poings et grogne. Une dizaine de jours. Ça me paraît impossible. Impossible de la garder ici autant de temps sans se faire repérer. Pawikov a parlé de négociation. Vu le milieu d’où vient la fille, je suppose qu'il parle d'argent. Ou plus précisément de rançon.
Et tout ça ne me ressemble vraiment pas. Séduire une nana dans un bar dans lequel je n'aurais jamais mis les pieds avant, accoster la fille avec nonchalance et surtout la kidnapper et l'a séquestrer pour faire d'elle une grotesque monnaie d'échange.
C'est pathétique. Debout, je fais les cent pas et mets en marche mon cerveau. Je dois surveiller. Contrôler que personne ne s'approche d'ici. Et surtout, prendre en compte minutieusement tout ce qu'il se passe à l'extérieur. Je m'arrête et observe la rue par une fenêtre. Le volet est cassé de ce côté-là, je n'ai pas eu le choix. En bas, la vie bat son plein. A cette heure, les mères accompagnent leurs marmots à l'école, et les voitures jouent du klaxon à tout va. Cette vie n'est plus la mienne. Je suis loin de tout ça maintenant.
A quoi bon rester prostré et me cacher comme un mec en cavale. Si je dois rester dix jours ici, il va falloir que je vive normalement. Ou presque.
Je me frotte la nuque. Ma peau est moite. Je me sens crasseux. Je ferme les yeux et pense à ce que cette fille va m'apporter. Sans le savoir, je vais certainement changer le cours de sa vie.
Mais elle va définitivement changer le cours de la mienne aussi. Je ne pense qu'à l'argent. A une possible rédemption. A ma prochaine nouvelle vie. Ça m'apaise.
Soudain, de légers bruits me parviennent de la chambre. Mes poils se hérissent et mon échine frémit.
La fille.
Discrètement, je marche en direction de la porte restée entrouverte. Quand je la pousse un rai de lumière éclaire la pièce. Mes yeux ont du mal à s'habituer à l'obscurité profonde qui y règne.
Doucement, je caresse la crosse du revolver calé dans la poche arrière de mon jean.
Mais mon calme ne dure pas longtemps. La silhouette squelettique qui dort depuis plusieurs heures n'est plus là. La fine couchette posée à même le sol est vide.
Instinctivement je resserre mes doigts sur mon Beretta et reste sur mes gardes. Je balaie rapidement la pièce des yeux, mais je n'ai pas le temps d’en faire le tour. Une masse chaude se jette sur moi, comme un chien aux abois.
De stupeur, mes pieds nus glissent sur le sol.
Une seule pensée me vient à l'esprit.
Les choses sérieuses commencent.
16 commentaires
Myjanyy
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Il y a 8 ans
LAETITIA SHAYDEN
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Il y a 8 ans
Myjanyy
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Il y a 8 ans
Alain Leclerc
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Il y a 8 ans
Myjanyy
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Il y a 8 ans
2142wishes
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Il y a 8 ans
Myjanyy
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St. Clare
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Myjanyy
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Il y a 8 ans
Audrey Woodhill
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Il y a 8 ans