Fyctia
9 - Caelin.
Belle soirée, ou presque.
Nathan s’assoit sur le canapé, s’amusant avec mon petit ange. Les deux s’entendent très bien, et j’ai comme l’impression que ça dérange Vincent. Simple impression, compte tenu de la tête qu’il tire. Normalement, il est “heureux” lorsque son ami de toujours est là. Mais je comprends de plus en plus combien ça lui coûte de voir ses proches apprécier mon petit Nael. Et réciproquement, ça me touche de voir que jamais il aimera mon trésor. Celui qui rend ma vie plus belle. Celui qui vient de nous deux.
S’il s'était protégé comme toute bonne personne qui ne souhaite pas d’enfant...
Commencé-je à penser en le blâmant, mais en y réfléchissant à deux fois, c’est plutôt moi qui devrais être accusé.
Si j’avais avorté…
Pensé-je amèrement. Tout est de ma faute. Il n'a jamais véritablement donné son avis entre le garder, ou non. Mais il n’empêche que je lui ai imposé sa présence. Et voir que ça ne s’améliore pas, qu’il ne part pas mais impose tout de même sa violence, son dégoût et ses caprices, ça fait mal. J’ai gâché une belle relation parce que je pensais que c'était une bonne “idée” de le garder. Et voilà où on en est.
En mettant au monde cette petite vie, j’ai gâché notre couple et son existence.
Je me renfonce un peu plus contre le mur sur lequel je me suis appuyé, et dans la culpabilité à mesure que les regrets fusent.
— Tout va bien ? M’interroge l’ami de mon partenaire, avec une curiosité et une inquiétude qui voile son visage.
Nathan l’a remarqué. Nathan me remarque.
Mon cœur allait répondre à la place de la raison, mais celui-ci abandonne, lorsqu’il sent le regard de Vincent dans mon dos.
— Oui. Répondis-je simplement.
Je ne laisse place à aucun doute dans le ton que j’emploie, même si mon âme, elle, est remplie à ras bord de questions, de peur, et de chagrin.
Constatant que Nael est entre de bonnes mains, je pars me décrocher du regards insistant de Vintz et rejoins la cuisine, cherchant avec quoi nourir les trois mâles dans le salon. L’heure est plus au goûter qu’au dîner, alors je jettes mon dévolu sur les tiramisus préparés la veille. Spécialement pour la rentrée ! Je vais faire un heureux.
J’ouvre le frigo et attrape 4 coupes où logent les desserts. La moitié avec du café, et l’autre avec du lait, pour mon petit homme et moi. Je les dépose un à un sur la table basse sous le regard peu discret de Nathan. Vintz, lui, s’installe près de l'invité, même si Nael effleure parfois les jambes de son père en jouant. Je comprends d’ailleurs dans ses yeux qu’il aimerait insulter mon petit ange. Heureusement, il ne fait rien. Sans doute pour continuer à faire bonne impression devant son pote.
Pendant mes aller-retour, je me surprends à penser que Nathan ferait un bien meilleur père pour mon fils. Est-ce une simple impression, un fait, ou un souhait ?
Il me propose d’ailleurs de m’aider pendant que je sors quelques verres d’un placard.
Peut-être ferait-il aussi un bon copain.
Mes joues pourraient se mettre à rougir à tout moment, pensant aux douces étreintes que nous pourrions partager sous les lueurs des étoiles. Nael s’endormant entre nous deux, dans le lit, alors que Nathan caressait ma joue.
Une image que je me suis longtemps interdit d’imaginer, mais qui, petit à petit, ne cesse d’arriver dans mon esprit. Ainsi que dans certains de mes rêves, où pour mon plus grand bonheur, Nathan prend la place de Vincent.
Mes pensées honteuses ne prennent pas fin en entendant mon copain énoncer à notre invité que je n’ai pas besoin de lui. Ni de personne d’autre.
Mais un vrai partenaire aurait aidé sa dulcinée. Et inversement, bien évidemment.
Chaque jour qui passe, je me rends compte que c’est voué à l’échec. Et que je devrais partir avec Nael dans mes bras.
Mais la peur me garde immobile dans cette maison. Fuir me terrifie. Être heureuse me terrorise. Ou plutôt, ne plus jamais être heureuse m’apeure… Alors je reste dans ce quotidien qui ne me convient pas.
Mais chaque fois que je le vois, qu’il me lance ce regard, il me fait croire qu’un renouveau est possible.
Chaque fois qu’il pose ses yeux sur moi, les bleus s’effacent, et quelques papillons accomplissent une valse dans mon ventre.
Il a toujours eu ce pouvoir là sur moi. Depuis notre rencontre. Pourtant, ce n’est pas lui que j’ai choisi. J’ai préféré le “bad boy”, désinvolte et sans émotion, à la place du garçon au cœur sensible et doux.
J’ai collecté tout un tas d’erreurs depuis le lycée, et avoir refusé son amour pour le donner à un type qui ne mérite pas le mien en fait partie.
Je continue de faire abstraction, d’oublier et de l’oublier, mais au fond, je vois bien qu’il m’aime encore.
Et que c’est sans doute encore réciproque…
C’est comme ça que je termine ma soirée en leur compagnie.
Pleine de décharges électriques chaque fois qu’il me caresse des yeux, l’anxiété qui monte dès qu’il me scrute, des regrets sur mon passé qui me hantent jusque dans mon présent, et des coups qui se mettent à marquer mon corps après qu’il soit parti.
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