Julie Alyès Ho Ho High: Le Père-Noël plane un peu trop cette année ! Chapitre 4 - Elsie (2/2)

Chapitre 4 - Elsie (2/2)

On peut dire que Tia illumine une pièce dès qu’elle y entre. De ses longs cheveux noirs parfaitement coiffés, à son épais manteau en velours beige, cette femme m’a toujours donné des complexes. Avec mon jean troué et mon tee-shirt délavé, je peste contre l’Injustice de la vie. J’aurais beau tout faire, je n’arriverai jamais à être aussi canon qu’elle, à cinquante ans.


Je l’ai connue lorsque j'avais 5 ans. Et déjà à l’époque, j'étais subjuguée par sa prestance. Sa mère et ma grand-mère étaient voisines, et certainement les meilleures amies du monde. Au début, je ne faisais que la croiser, et je l’écoutais me raconter ses folles aventures. C’est d’ailleurs de moi qu’elle tient son plus célèbre surnom, Tia, parce qu’enfant, j’étais incapable de prononcer son prénom.


Dans la logique des choses, cette femme aurait dû rester au stade de la connaissance, la fille de l’amie de ma grand-mère que je croisais tous les dimanches. Mais tout a changé à mes treize ans, lorsqu’elle nous a hébergés, mon père et moi, après qu’on a perdu notre maison. Nous avons vécu deux ans chez elle. Ensemble. Et puis... j'ai fini par vivre seule avec elle. J'ai découvert que Tia n'était pas seulement une belle femme. Elle débordait de gentillesse, de bienveillance. Elle a toujours tout fait pour que je sois heureuse... ou un peu moins malheureuse. Je ne peux peut-être pas être aussi belle qu'elle à cinquante ans, mais je peux essayer d'être aussi dévouée envers les autres.


— J’ai exactement ce qu’il te faut ! déclare-t-elle avec un fier sourire.


Elle fait signe à un homme d’entrer et le prend par la main pour le guider jusqu’à mon comptoir. Cheveux châtains coupés court, barbe taillée au millimètre, chemise impeccable rentrée dans un pantalon chino. Ce mec n’a rien à voir avec ceux qu’elle a l’habitude de traîner devant moi pour espérer faire naître cette petite étincelle.


— J’apprécie l’effort, mais on en a déjà parlé, j’aime mon célibat.

— Certes, dit-elle avec un fin sourire, mais ça coûte cher en piles votre histoire.


J’arque un sourcil, le temps que l’information monte jusqu’à mon cerveau embrumé par la fatigue.


— Pardon ?


Les bras croisés sur le comptoir, elle pianote de ses longs ongles parfaitement manucurés sur le marbre. Un clin d’œil en direction de l’homme et elle se penche vers moi:


— Mais lui, il n’est pas là pour ce genre d’affaires. Même si tout se négocie.


Il esquisse un sourire complice et remonte les manches de sa chemise. Lorsqu’il entrelace ses doigts sur le comptoir, je remarque la montre hors de prix qu’il porte au poignet.


— J’ai repensé à ton inquiétude concernant le financement de tes biscuits spéciaux, me rappelle Tia. Et figure-toi que Matthias peut avoir des prix.


Finalement, Matthias m’apparaît tout de suite plus intéressant.


— Sérieusement ? réagis-je aussitôt. Parce que je commençais réellement à désespérer ! Tu m’expliques d’où vous sortez tous vos noms ? Gorilla Glue ?


Il s’amuse de mon air ahuri et répond :


— Elle a la particularité d’être très relaxante. Du genre à te clouer sur ton canapé.

— Donc critical cheese ? poursuis-je en grimaçant.

— Elle a une petite note fromagère, avec une pointe citronnée.


Imaginer le mélange ne fait qu’accentuer ma grimace.


— Je veux bien être ouverte d’esprit, mais qui a envie de manger un biscuit goût fromage citronné ?

— Rassure-toi, y a moyen de faire quelque chose de vraiment bien. Je suis un expert des space cakes. Tes clients vont planer.


Si sa première phrase m’a effectivement rassurée, je laisse échapper un rire jaune en entendant sa dernière.


— Je ne veux faire planer personne, moi. Juste, détendre.


Matthias penche la tête sur le côté.


— Ils vont forcément planer avec ce que je vends, explique-t-il.


Cette fois, c’est mon front qui se plisse.


— Mais... le CBD ne fait pas planer ?


Il fronce les sourcils et répond :


— Mais je ne vends pas de CBD.


Un silence, et mon cœur rate un battement.


— Mais tu vends quoi alors ?


Je me tourne vers Tia qui fait mine d’être subitement intéressée par la décoration murale.


— Tu m’as ramené ton dealer ?


Elle préfère se gratter l’arrière de l’oreille plutôt que me regarder.


— Tia ? insisté-je durement.

— Techniquement, c’est mon « fournisseur indépendant », corrige-t-elle en revenant lentement vers moi.

— Ton fournisseur de quoi, exactement ?


Tia souffle doucement et secoue la tête avec amusement.


— Tia ! hurlé-je alors.


Dans d’autres circonstances, évidemment que j’aurais ri avec elle. Mais si on considère ma voisine qui a très mal pris mon idée de vendre des biscuits au CBD... je n’ai absolument pas envie de lui donner des arguments pour pencher dans sa balance. Au passage, si Carine veut gagner, elle n'a qu’à trouver une idée prodigieuse. Et ne pas me mettre de bâton dans les roues.


— Y a un problème ?


Luc se pose entre nous et me lance un regard inquiet. Je n’arrive pas à détourner les yeux de ma tante.


— C’est un léger quiproquo, répond-elle.


J’étouffe un petit rire consterné:


— Léger ? Tia a failli me faire acheter de la vraie drogue.


Luc cligne deux fois des yeux avant d’éclater de rire.


— C’est pas drôle, marmonné-je.

— Je sais, lâche-t-il difficilement. Mais imagine si on s’était rendu compte de cette confusion après avoir vendu les biscuits.


Il n’arrête toujours pas de rire et essuie une petite larme qui perle au coin de sa paupière.


— Ce n’est toujours pas drôle.

— Carine qui en mange un et se met à parler aux bonhommes de pain d’épice, poursuit-il.


Le voyant repartir dans un fou rire, je récupère un cadeau caché sous la caisse et lui envoie en pleine figure.


— Si tu veux, j’ai peut-être un cousin qui vend de l'huile de CBD, intervient naïvement Mathias.


Mon regard noir trouve une nouvelle victime. Ils ont décidé de tous se payer ma tête ?


— Bien sûr, et au moment de passer à la caisse, je vais me rendre compte qu’il m’a filé de l'huile de foie de morue.


Mathias lève les bras innocemment tandis que derrière moi, Luc réplique :


— L’huile de foie de morue a également de nombreux bienfaits pour la santé. Vitamine, omega-3… Elle est connue pour…


Avant qu’il ne puisse soumettre l’idée de révolutionner Noël avec des biscuits à l’huile de foie de morue, je récupère un cadeau caché entre deux sachets de thé et il lui envoie en pleine figure.


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14 commentaires

Lunedelivre

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Il y a un mois

La tante non mais 😂 j’ai jamais autant ris

Emmy Jolly

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Il y a un mois

C'est trop hilarant cette Tia est un phénomène 😂

Ama Ves

-

Il y a un mois

Oh non, j'adore ce passage ! L'utilité des cadeaux est bien trouvée 😂

Scriptosunny

-

Il y a un mois

Tia et son dealer, pépite 😂

Sophie Hazera

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Il y a un mois

J’adore ce début d’histoire, hâte de lire la suite. 😊

NICOLAS

-

Il y a un mois

Merci pour ce chapitre, ça fait du bien de rire 😂🫶💕😍

Mononst

-

Il y a un mois

…. La suite où je saute….
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