Julie Alyès Ho Ho High: Le Père-Noël plane un peu trop cette année ! Chapitre 2 - Elsie (1/2)

Chapitre 2 - Elsie (1/2)

Michel François, ou Big Boss pour les intimes, adore les réunions. Il nous en colle une tous les mois. En tant que propriétaire de nos boutiques, il touche un pourcentage sur nos ventes. Il se la joue bienveillant avec ses beaux discours du style « Nous sommes tous dans le même bateau, si vous coulez, je coule », mais moi, je vois surtout ça comme « plus vous vendez, et plus je gagne ».


Mais bon, ce n’est pas un mauvais bougre.


L’année dernière, lorsque Prune a dû faire face à des difficultés avec sa boutique de vêtements, il a tenu une réunion au sommet. En réalité, nous sommes tous dans le même bateau. Savoir que notre consœur risquait de mettre la clef sous la porte nous a tous fait réagir, parce qu’il est inconcevable de voir une de ces boutiques quitter le navire.


La seule chose que je peux reprocher au Big Boss, c’est son attachement pour sa mère. Parce qu’il l’adore autant qu’il aime les réunions. Alors il a trouvé l’occasion de faire d’une pierre deux coups. Une fois par mois, nous faisons notre réunion dans la grande pièce de vie de la maison de retraite où elle réside.


L’endroit n’est pas encore décoré pour les fêtes, et garde cette ambiance froide et peu chaleureuse. Les murs blancs rappellent la salle d’attente d’un hôpital. À croire que toutes ces personnes sont là… à attendre une seule chose. Il y a quelques tableaux, accrochés ici et là, mais ce ne sont que des paysages quelconques… qui n’arrivent même pas à amener un peu de couleur à leur quotidien. L’air est humide, il fait froid, et malgré quelques touches de confort, tout semble figé. Les fauteuils sont toujours placés de la même façon, les résidents nous observent, silencieux, des regards vides, mais pleins de tendresses.


Nous sommes là, assis autour d’une table ronde, devant des personnes qui vivent leur vie au ralenti. Certaines jouent au scrabble, d’autres préfèrent les puzzles. Et certaines sont simplement assises dans leur fauteuil, à nous observer avec un tendre sourire. Comme si nous étions en plein spectacle de divertissement. Je vois bien leur visage s’illuminer dès qu’ils nous aperçoivent. Et mon cœur se serre en les voyant se réjouir de nos quelques minutes de présence, à croire que c’est le seul jour de l’année où ils ont de la visite.


— Elsie regarde ! J’ai encore gagné !


Je pivote ma chaise pour contempler la mine réjouie de Monsieur Robert, qui me montre son mini-chevalet vide, signe que sa partie de Scrabble est terminée.


— Vous êtes mon champion ! déclaré-je, le pouce levé.

— Tu viens faire une partie ? me propose-t-il, les yeux brillants.

— Elsie ? Jouer au Scrabble ? se moque gentiment Luc à côté de moi.


Mon coude heurte, malencontreusement, le sien.


— Désolée, la réunion va bientôt commencer. Mais je reviendrai une prochaine fois.

— Fais attention, c’est Gérard qui a Alzheimer, pas moi !


J’essaie de me retenir de rire, mais Robert est le comique de l’établissement, et il sait comment faire mouche. Il m’adresse un clin d’œil complice avant qu’un homme ne marche devant lui. Ce fantôme du passé traverse la pièce et me fait perdre toute envie de rire. Je le fixe jusqu’à ce qu’il s’assied à côté de Carine. Il la salue brièvement tandis que je me penche vers Luc, qui est bien trop occupé à jouer sur son téléphone.


— Tu m’expliques ce que Raphaël Carpentier fait ici ?


Il fronce légèrement les sourcils et continue d’incliner son portable vers la droite, espérant faire sauter son personnage le plus loin possible.


— Parce qu’il a repris la confiserie, répond-il.

— Pourquoi ?


Ses pouces tapotent frénétiquement sur l’écran et je suis à deux doigts d’envoyer valser cet objet de malheur.


— Parce que Hector est parti à la retraite.

— Pourquoi ?


Cette fois, son héros fait une chute mortelle et Luc claque son téléphone sur la table pour se tourner vers moi.


— Parce qu’il est vieux. Et c’est ce que font les gens quand ils atteignent un certain âge.


À côté, Raphaël éclate de rire avec Carine et je ne peux empêcher ma bouche de se déformer en une grimace. Les bras croisés, je me laisse tomber lentement le long de ma chaise en dévisageant furieusement mes deux ennemis réunis.


— Dans ce cas, tu m’expliques pourquoi Carine est toujours là alors qu’elle est plus vieille que Hector ?

— Parce qu’elle aime trop te faire tourner en bourrique, s’amuse Luc.


Toutes les places étant désormais occupées, Monsieur François se racle la gorge pour attirer l’attention de toute l’assistance.


— Je vous remercie tous d’être venus, commence-t-il. Je tenais tout d’abord à souhaiter la bienvenue à Raphaël qui prend officiellement les rênes de la confiserie Carpentier.


Les applaudissements fusent et je fais de mon mieux pour claquer mes mains l’une contre l’autre. Fier comme un paon, Raphaël adresse un sourire à chaque personne présente à cette table, jusqu’à ce que son regard s’arrête sur moi. Applaudir ce type me demande un tel effort surhumain que huit de mes doigts se referment, épuisés. Luc est le seul à capter mon geste immature et fait disparaître mes majeurs dressés sous la table.


— Mais t’as quel âge sérieux ? râle-t-il.

— C’est toi qui dis ça ? Alors que tu es en train de jouer à un jeu vidéo en pleine réunion ?


Il relève à peine ma remarque et retourne à son téléphone, subtilement caché sous la table. Lorsque je redresse la tête, je croise le regard de Raphaël. Il esquisse un sourire en coin en me détaillant lentement et détourne les yeux. Jusqu’à hier, c’est Hector et son fils cadet, Noé, qui tenaient la boutique. Je cautionnais la présence de Raph lorsqu’il venait aider de temps en temps. J’avais longtemps espoir qu’il trouve une meilleure opportunité ailleurs. Mais les Carpentier sont très attachés à l’entreprise familiale. Et Hector a toujours dit que c’est son aîné qui le succéderait.


Ce qui signifie... que je vais devoir supporter ce type, tous les jours jusqu’à la fin de ma vie ?


— Tu vois, chuchote Luc. C’est exactement pour ça que je ne veux pas sortir avec Charlie.

— Qu’est-ce tu insinues ? J’ai juste couché avec Raphaël il y a cinq ans.

— Et dès que tu l’as aperçu, tu t’es mise à hyperventiler et je peux sentir ton sang bouillir dans tes veines.


La main sur mon poignet, j’essaie de voir si Luc n’exagère pas un peu. C’est vrai que je déteste Raphaël du plus profond de mon être. Mais pour le coup, c’est lui le goujat de l’histoire. C’est lui qui m’a dragué avec son beau sourire, son regard de tombeur et ses cheveux noir ébène. C’est lui qui a joué les princes charmants jusqu’à ce qu’on couche ensemble.


Et qu’il ne me rappelle plus jamais.


— Je peux très bien me contrôler. Je suis la reine du self-control.


Luc pouffe un peu trop fort et attire l’attention des autres personnes autour de la table.


— Vous avez une idée ? demande Michel.


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27 commentaires

Sarael

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Il y a 16 jours

Enchanté Raphaël ahahah

Scriptosunny

-

Il y a un mois

Ça va faire des étincelles 😏 Hâte de les voir se livrer à une bataille sans merci.

Julie Alyès

-

Il y a 21 jours

De très belles étincelles 😏

Emmy Jolly

-

Il y a un mois

Ah y'a de la tension dans l'air pour Elsie qui crise en voyant Raphaël, trop envie d'en savoir plus sur lui, cet ex qui a l'air de lui avoir fait du mal!

Julie Alyès

-

Il y a 21 jours

Des retrouvailles électriques 😏
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