Julie Alyès Ho Ho High: Le Père-Noël plane un peu trop cette année ! Chapitre 1 - Elsie (2/2)

Chapitre 1 - Elsie (2/2)

— J’en ai marre de tes sous-entendus dès qu’elle est dans les parages, marmonne-t-il.


Je n’arrive pas à retenir mon sourire devant l’air faussement énervé de mon meilleur ami. Je sais qu’il déteste ça, mais il sait que c’est grâce à mon humour mordant que je suis aussi proche de Charlie. Tout le reste n’est que mathématique. Elle aime passer du temps avec moi, Luc est accroché à mon bras droit toute la journée. Par conséquent, lorsque Charlie débarque parce qu’elle m’adore, il profite aussi de sa présence. Alors, jamais Luc ne se plaindra vraiment de mes sous-entendus. Parce que ça fait sourire Charlie, et qu’il aime son sourire.


— J’ai trouvé ! intervient Charlie.


Elle revient vers nous et dépose un pied à sapin entre nos deux boutiques. Qu’à cela ne tienne, ma question sur les relations amoureuses peut attendre. Par chance, Luc nous fait l’honneur de mettre ses bras à contribution pour hisser le conifère comme il se doit.


— Il est magnifique ! m'exclamé-je alors.


Je sais que Luc se moquera de mon regard émerveillé face à ces milliers de pics enfoncés dans des branches. Mais c’est ainsi. Noël a cet étrange pouvoir sur moi. Les lutins, le père Noël, les décorations… tout semble prendre une autre dimension à cette période de l’année. Pour m'emmener loin. Un instant, hors de temps, hors de tout. Il y a quelque chose de réconfortant dans l’atmosphère, des saveurs de pain d’épice à la chaleur d’un plaid molletonné. On donne sans attendre en retour, parce qu’au fond, décrocher un sourire, c’est tout ce qui compte.


Je m’accroche à l’immensité de ce sapin, je l’imagine embelli de guirlandes et de suspensions par dizaines. Je serre mon gobelet entre mes doigts et le presse contre mon cœur. À côté, Luc pose une main sur mon épaule.


C’est bien plus qu’un sapin, bien plus qu’une rue, c’est tout un univers qui se transforme pour oublier, un peu, la réalité d’un quotidien dont on aimerait s’éloigner.


— Je suis prête à affronter le mois de décembre ! déclaré-je après une profonde inspiration.


La main de Luc s’agite lentement sur mon manteau avant qu’il ne se tourne vers moi, un sourire en coin.


— Tu dis ça parce que tu vas enfin battre Carine à la compétition de Noël ? me demande-t-il.

— Je ne vais pas la battre, je vais la massacrer !


Alors que Charlie laisse échapper un petit rire, Luc, lui, grimace :


— Je n’aime pas te voir sourire de cette façon. Halloween, c’est terminé.

— Je vais la massacrer… gentiment, précisé-je d’une voix plus douce. Je te jure qu’elle ne va rien sentir.

— Et c’est censé me rassurer ?


La compétition de Noël, c’est l’idée ultime de Monsieur François. Notre Big Boss, celui qui possède la plupart des boutiques de cette rue. La réputation de son marché est tellement grande que la mairie lui offre des subventions à foison. Pour résumé, grâce à ce mois magique, tout ce que le Boss désire, il le note sur un papier et le maire n’a qu’à claquer des doigts pour lui apporter sur un plateau.


Alors, histoire d’être au sommet de sa gloire, le Boss organise un concours pour élire la boutique qui aura le meilleur esprit de Noël. Ou plutôt, celle qui fera le meilleur chiffre d’affaires du mois. À ce jeu-là, ma biscuiterie n’est que deuxième, derrière la chouchoute de cette période, Carine Bernard.


C’est ma rivale ultime. Celle qui conquit le cœur de tout le monde avec ses créations artisanales personnalisées. Celle qui est aimée de tous et que le Boss adore.


Cette année, c’est décidé, je vais ratatiner cette femme, et tant pis si c’est une sexagénaire qui se balade avec son caniche dans son sac à main.


— Arrête de regarder sa vitrine avec ces yeux-là, on a l’impression que tu veux y mettre le feu.


J’ignore Luc et plisse davantage les paupières pour espérer voir jaillir une étincelle, mais rien. Il dit que la période des fêtes a une influence néfaste sur mon esprit de compétition.


Mais c’est à peine décelable.


— Bonjour Elsie ! Bonjour Luc et Charlie !


En face, Carine s’arrête devant sa porte et me fait de grands gestes avant de remonter son rideau de fer. Devant son sourire, ma main exerce une pression légèrement démesurée autour de mon gobelet en carton.


Vraiment, mon esprit de compétition est à peine réveillé par cette mamie et son caniche de blanc immaculé.


— Ce serait un peu disproportionné si j’organisais le kidnapping de Flocon ?


Je lance un regard innocent à mes deux amis. Si Luc lève les yeux au ciel, Charlie, elle, fronce doucement les sourcils.


— Je sais que ça fait cinq ans qu’on se connaît, mais… je n’arrive toujours pas à savoir si tu es sérieuse ou pas ? Et ça me fait peur, avoue-t-elle.


Elle perd son joli sourire et détourne son inquiétude vers mon comparse. Bon, je dois brouiller les pistes et feindre mon plus beau sourire.


— Mais bien sûr que je plaisante. Tu me vois… kidnapper un chien juste pour déstabiliser mon adversaire ? Voyons Charlie !


Je porte mon gobelet à ma bouche pour masquer mon sourire diabolique et rentre dans ma boutique pour passer inaperçue. Et parce qu’il n’arrive pas à rester plus de cinq secondes seul avec cette fille, Luc me rejoint très vite à l’intérieur. Il ôte rapidement son gros manteau et le dépose sur la patère à l’entrée. Là où un minuscule cadeau en polystyrène l’attend sagement. Il s’en empare, l’observe sous toutes ses coutures avant de se tourner lentement vers moi.


— Pas encore ? demande-t-il d’une voix fatiguée.


Il y a trois ans, j’ai acheté une centaine de faux cadeaux, du plus petit au plus grand. Je les ai tous disposés dans notre boutique, juste pour le plaisir de le voir râler à chaque fois qu’il en trouvait un. Il a cru m’avoir en disant que j’avais gaspillé mon argent. Du coup, je fais dans le recyclage avec cette nouvelle tradition.


Je lui offre mon plus beau sourire tandis qu’il range l’objet dans la panière qui lui est destinée. Et c’est aussi pour ça que mon jeu se perpétue. Il pourrait tous les jeter, mais non, il les garde précieusement. C’est mon petit Grinch au cœur de guimauve.


Il me devance dans la cuisine et récupère son tablier qu’il noue machinalement, les yeux rivés sur le four.


— Qu’est-ce que tu fais chauffer ? demande-t-il.

— Ce sont les muffins de Cece.


Il se tourne vers moi, un sourcil relevé tandis que j’attache mes cheveux.


— Et pourquoi est-ce que les muffins de Cece se retrouvent dans notre four ?

— Parce que son four est en panne et que le mien était libre.


Luc lève les yeux au ciel et secoue la tête. Il préfère s’emparer de la farine plutôt que me répéter que certaines personnes abusent de ma gentillesse. Ça pourra être le cas, mais à aucun moment Cece ne m’a demandé d’utiliser notre four. Elle m’en a parlé, sans arrière-pensée, et je ne peux pas tourner le dos à une personne qui a besoin d’aide. J’ai cette réputation dans la rue, et elle ne me dérange absolument pas. Je suis celle qui règle les problèmes de tout le monde, et je sais pertinemment qu’on me le rendra un jour.


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33 commentaires

Sarael

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Il y a 16 jours

Elle est très très attachante Elsie

Zelda Jane

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Il y a un mois

Quel plaisir de te lire le matin pour accompagner mon café ! J'adore ton humour, l'écriture est impeccable. Bref, publie et j'achète 🥰

Julie Alyès

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Il y a 21 jours

Waouh merci ! Je le finis et je te prépare la dédicace ! 😏

Anna C

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Il y a un mois

OK, c'est bon, je veux déjà ton histoire dans ma bibli ! 🥹

Julie Alyès

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Il y a 21 jours

Allez go. C'est parti ! Attend... mais merci 🥹

Emmy Jolly

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Il y a un mois

On voudrait tous une Elsie dans nos vies!

Julie Alyès

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Il y a 21 jours

J'approuve totalement l'idée
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