Alixia Egnam Heaven Chapitre 7 - Partie 1

Chapitre 7 - Partie 1

Oh. Mon. Dieu. Je dois fermer les yeux et feindre le sommeil. Est-ce que ça existe encore, les hommes comme lui ? Je veux dire, en dehors d’Instagram ou des romances qui encombrent ma liseuse ?


Je le trouvais déjà beau avec son bonnet de laine et sa veste à fourrure. Je l’ai trouvé séduisant, avec son pull en mérinos blanc, à siroter son café pendant que je lui racontais mes déboires pour trouver un job ; mais lorsque ce même pull s’est soulevé, emportant dans son sillage un t-shirt noir, me laissant découvrir des abdos en béton, mon esprit s’est échauffé. Et quand il a passé ses doigts dans ses cheveux trop longs, j’ai cru que j’allais faire une syncope. Une peau bronzée, pas un poil ni un gramme de graisse… Pas même l’ombre d’un tatouage, et Dieu sait si j’y suis sensible ! Pourtant, le simple fait d’apercevoir un peu plus de lui a suffi à me donner chaud.


Pour couronner le tout, il a joué les grands seigneurs, en restant le plus habillé possible.


Il faut dire qu’il a été on ne peut plus clair, tout à l’heure. Je suis une gamine. Pour lui, pour mon père, le banquier ou encore Di Meglio et ses hommes, il n’y a rien à craindre de quelqu’un comme moi. Pire, ils sont tous persuadés d’en savoir beaucoup plus que moi sur la vie ou sur les embûches. Alors oui, j’imagine que Monsieur-Bien-Sous-Tous-Rapports ne souhaite pas être accusé d’atteinte à la pudeur sur ma petite personne. Hum. À bien y réfléchir, il n’a pas tort. Je suis déjà assez dans la mouise comme ça. Il est hors de question de me mettre encore plus dans la panade pour les beaux yeux – ou les abdos – d’un parfait inconnu.


Une fois de plus, je me félicite de ne pas être tombée sur un fou dangereux. Ou un homme de Di Meglio. C’est d’ailleurs aussi pour cela que Colin et moi avons convenu d’attendre demain pour me rapatrier. Il est persuadé que les Siciliens gardent un œil sur moi, et il serait impensable de laisser croire que je puisse être imprudente à ce point. Enfin, tout ça, il me l’a expliqué après m’avoir hurlé dessus. Résultat ? Me voilà coincée ici, dans une chambre de dix mètres carrés, à moins d’un mètre d’un homme qui est un fantasme que je ne soupçonnais pas avoir jusqu’ici. Mon portable est encore dans la cuisine, je ne peux donc ni surfer sur internet ni lire. À la place, j’écoute le silence. Ici, pas de coups de klaxons ou de musique, comme à Édimbourg ; pas non plus le bruit du ressac, comme à Dunbroch6. Non, il n’y a rien, hormis le silence, au pire le hululement d’une chouette et la respiration de Ian. Aussi, quand sa voix résonne dans la pièce, même dans un murmure, il me fait sursauter :


— Je croyais que tu dormais ?


— Comme quoi, je suis une bonne comédienne, non ?


Je l’entends étouffer un rire.

— Quoi ?


— J’allais dire que t’es meilleure actrice que chanteuse. Mais je ne voudrais pas te vexer. J’ai trop peur que tu me frappes. Allez, dors, Tilda Swinton*.


Il me faut quelques secondes avant de rire avec lui. Ouais. Parce qu’en plus d’être canon et gentleman, il a de l’humour.


— Je peux te poser une question ? hasarde-t-il à voix basse.


— Vas-y.


Il se redresse sur un coude et plante son regard dans le mien. Surtout, Heav, ne zieute pas son torse. Ni ses abdominaux. Oui, mais. Il y a un mais. Sa manière de malmener sa lèvre inférieure avec ses dents n’est pas non plus pour m’aider à garder la tête froide.


— Si tes problèmes sont si sérieux… Est-ce que tu as quelqu’un sur qui compter ? Quelqu’un à qui tu peux te confier ?


Sa question me désarçonne. Je ne m’attendais pas à ça.


— Oui, réponds-je, tout de go. J’ai une famille extraordinaire.


Je n’ai aucune hésitation. Les visages de Colin, Alba ou encore Abby, Trip et même mon père s’impriment dans mon esprit et me font sourire. Ce serait une catastrophe d’avoir à leur avouer que je ne suis pas celle que je m’efforce d’être depuis des années. Mais oui, quoi qu’il arrive, je sais que je peux compter sur mes proches. Je n’exagère pas quand je dis qu’ils sont extraordinaires. Notre clan est soudé. Envers et contre tout. C’est ce qui a de tout temps fait la force des Ferguson : on lutte, sans jamais plier, tous ensemble.


— Tu sais, parfois, c’est plus facile d’en discuter avec des inconnus. Parce qu’on ne craint pas d’être jugée, ou de baisser dans l’estime de ceux qu’on aime.


À sa manière de me fixer, je me plais à croire qu’il s’agit là d’une proposition. C’est idiot, inattendu et peut-être inapproprié. Je n’en sais fichtre rien. Pourtant, sans vraiment comprendre pourquoi, je saisis la perche qu’il me tend. Remontant un peu plus le plaid sous mon menton et soudain très absorbée par une peluche de laine que je malmène du bout des doigts, je me lance :


— Est-ce que tu t’es déjà senti… Pas à la hauteur de ce qu’on attendait de toi ? Je veux dire… Tu vois, j’ai cette perpétuelle envie de prouver à mon père et… aux autres que je suis plus que la précieuse princesse.


Pour un peu, je balançais à Ian que j’ai besoin de prouver ma valeur aux hommes de mon père. On a frisé la catastrophe !


— Je ne veux plus être la petite fille toute mignonne qu’on protège de tout. J’ai vraiment cru qu’en m’éloignant, je pourrai me construire une vie différente, mais…


— Mais ? m'encourage-t-il.


— Il y a eu des complications.


Je garde volontairement le silence sur l’épisode Archie. Ian a beau être sympa, je ne vais tout de même pas m’épancher sur mes peines de cœur avec un inconnu, aussi séduisant soit-il. C’est d’ailleurs cela, aussi, le problème. Ian est bien trop parfait pour être réel. Ou pour être honnête, me chuchote cette satanée voix intérieure.


Il soupire, en passant sa main dans ses cheveux. Damn !


— Je sais que je vais passer pour le vieux con de service en disant cela, mais personne n’a besoin d’être parfait, Heaven. Ta famille t’aime, quoi que tu fasses. On fait tous des erreurs. Rien ne vaut la peine de se mettre dans un tel état, ou de prendre le volant sur un coup de tête, quitte à se perdre au milieu de nulle part. C’était une prise de risque inconsidérée.


Je me renfrogne, en plissant le nez. Ian se saisit d’un petit oreiller bleu canard qu’il me lance à la tête en riant.


— Eh ! Ne fais pas cette tronche !


J’éclate de rire, avant de lui tirer la langue. Il se marre également et conclut son discours :


— Quoi qu’il en soit, tu vas t’en sortir. Je suis certain que tu es assez forte pour faire face. Et si besoin, tu n’es pas seule.


Peut-être que je délire, que je prends mes rêves pour une réalité, mais à cet instant, sa phrase résonne comme une promesse. Un doux serment que je suis prête à accepter et à lui faire tenir.



*Tilda Swinton est une actrice britannique ayant remporté de nombreuses récompenses

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3 commentaires

JULIA S. GRANT

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Il y a 3 mois

🔥🔥Dis donc, c’est une gravure de mode ce gars 🤪

Renée Vignal

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Il y a 4 mois

🧸😘

Alixia Egnam

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Il y a 4 mois

merciiii <3
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