Fyctia
Chapitre 3
Je passe la journée à me plonger dans le travail. C'est à peine si je prends le temps de déjeuner. De toute façon, je suis incapable d'avaler quoi que ce soit. Je veux juste finir au plus vite ce que j'ai à faire pour pouvoir rentrer chez moi. Heureusement, mon patron ne me donne pas de travail de dernière minute. Je vais pouvoir passer une soirée tranquille. Enfin, tranquille, tout est relatif.
Je salue Debby au moment de m'en aller et fonce directement à ma voiture. Sur le trajet du retour, je suis passablement consciente de ce qui se passe autour de moi. Je suis en mode automatique. Je n'ai qu'un objectif, m'enfermer dans mon appartement, loin de tout et de tout le monde.
Une fois arrivée, je referme la porte derrière moi, et je reste plantée là, dans l'entrée. Mon regard plonge dans le vide et fixe un point que même moi je ne vois pas. Je sens mon corps se mettre à trembler, pourtant je n'ai pas froid. J'ai toujours cette boule dans la gorge qui m'empêche presque de respirer. Elle ne m'a pas quitté depuis que je suis sortie du bureau de mon patron ce matin.
Je serre les lanières de mon sac – que je n'ai toujours pas lâché – en pensant à lui.
« Il va falloir décaler vos vacances. »
Je serre les dents. Décaler mes vacances. Après tout ce que j'ai fait pour lui, toutes ces heures supplémentaires que je n'ai même pas comptées, toutes ces fois où je me suis couchée à pas d'heure parce que monsieur avait eu la bonne idée de me confier un dossier juste avant de partir, voilà tout ce à quoi j'avais droit ? Repousser des congés, ce que j'avais déjà fait. Des vacances que je n'avais pas pris depuis un an ! Et en plus il avait eu le culot de critiquer mon apparence avant que je ne sorte de son bureau !!
Je lâche mon sac, retire mes chaussures à la hâte et me précipite dans le salon. J'ai juste le temps d'attraper l'un des coussins du canapé et de le plaquer sur mon visage avant de pousser un hurlement. Je cris tellement fort que je crains un instant que mes cordes vocales ne se déchirent. Mais, après tout, je m'en fous. J'ai besoin de crier. Je contiens ma rage depuis ce matin, il faut que ça sorte ou je risque littéralement d'exploser.
Cependant, même après que j'ai finis, je sens toujours ce poids au fond de ma gorge. Je me mets à taper dans ce même coussin. Ce n'est pas dans mon tempérament d'être violente, mais je suis incapable de réagir autrement à cet instant. C'est comme si la partie rationnelle de ma personnalité était sortie de mon corps et qu'un démon avait pris sa place.
Je me mets à sortir les pires insultes que je connaisse à l'encontre de mon patron, je m'en prends même à la terre entière. Je crois que je n'ai jamais autant juré de ma vie.
Je finis à genoux devant mon canapé, à frapper mollement le coussin qui me tient lieu de défouloir. Je suis à bout de souffle comme si je venais de courir un marathon. Et pourtant, je ne me sens pas mieux.
Je laisse tomber ma tête sur le canapé. Les larmes ne sont pas loin de couler, je le sens. Mais j'essaie de me contenir. Je ne veux pas pleurer. Alors je respire, j'attends que ça passe.
Il s'écoule peut-être cinq, dix minutes avant que je ne relève la tête. Je regarde droit devant moi en poussant un long soupir.
-J'en ai marre, dis-je.
A peine ai-je prononcé ces mots que j'entends un rire. Je me redresse, soudain en alerte. L'appartement est calme et seul le salon est allumé. Ce n'est pas moi qui vient de rire. Je m'en serais quand même rendu compte.
Un nouveau rire raisonne.
Cette fois j'ai la certitude que ce n'est pas moi. Je me relève d'un bon et regarde en direction du couloir qui mène à ma chambre. Le bruit venait de par-là. Malheureusement, l'endroit est plongé dans le noir. Je ne vois rien.
Je perçois à nouveau cette sensation d'être observée, comme si je n'étais pas seule. Mon cœur s'affole alors que je sens une présence.
Je me lève d'un bond et me précipite dans la cuisine pour prendre un couteau, le plus gros qui me tombe sous la main. Oui, je sais, ce n'est sans doute pas la meilleure réaction à avoir. Je devrais plutôt prendre mon téléphone, mais je suis actuellement incapable d'avoir un comportement rationnel. Et puis qui est-ce que j'appellerais ? La police ? Pour leur dire quoi, que j'ai le sentiment que quelqu'un s'est introduit chez moi alors que je n'ai aucune preuve ? On me raccrochera au nez sans même prendre la peine de me laisser finir.
Je me dirige donc vers le couloir, le couteau pointé devant moi. J'allume la lumière, les sens aux aguets. Il n'y a plus un bruit mais je préfère être prudente. Arrivée devant ma chambre, je prends une seconde pour souffler et passe une main à l'intérieur pour atteindre l'interrupteur. Je saute devant l'entrée, mon arme toujours devant moi, et inspecte la pièce d'un rapide coup d’œil.
Il n'y a personne.
Par précaution, je regarde dans mon armoire, sous le lit, et je vérifie même la salle de bain. Mais rien.
Je suis seule.
-Tu perds la tête, ma pauvre fille, me dis-je à voix haute en retournant poser le couteau.
Voilà que je me mets à avoir des hallucinations auditives. Il faut vraiment que j'arrête de me prendre la tête, je suis en train de virer parano. J'ai vraiment besoin de dormir.
3 commentaires
cedemro
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Il y a 4 ans
Mamicette
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Il y a 4 ans
Charline Morel
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Il y a 4 ans