Fyctia
Chapitre 3 (deuxième partie)
—Jessica ! Une voix grave rompit ce moment de complicité.
Trop occupée à me concentrer sur la coiffure de Jess, je n’avais pas vu arriver la voiture. Surprise, je reculais et faillit trébucher en marchant sur le sac-à-dos de ma meilleure amie.
—Père. Répondit-elle d’une voix monocorde. Son gilet sur le dos, et son père dans les parages, il n’y avait pas que son apparence qui changeait.
—Monsieur Auvono.
—Angelina, c’est bien ça ?
—Oui, c’est ça monsieur.
Saisissant la main tendue par le père de Jess, je la serrai mollement.
—J’espère que tu ne m’en voudras pas, mais nous n’avons pas le temps de discuter. Jessica a un cours de piano dans un petit peu moins d’une heure, et nous devons traverser la moitié de la ville pour nous y rendre.
—Il n’y a pas de problème, assurais-je en dévisageant Jess qui se tenait droite et raide comme un piquet.
« Aucun commentaire concernant le piano » sembla-t-elle me menacer, ses grands yeux bleus dans les miens.
Je n’insistai pas.
—Père. Il serait possible d’inviter Angelina à venir diner un jour ?
Monsieur Auvono scruta sa fille, puis ce fut mon tour :
—Eh bien, elle est polie et me paraît-être une jeune fille de confiance. Et puis, il est rare que tu formules ce type de requête… je n’ai aucune raison de refuser. Je prendrais contact avec ses parents afin d’organiser cela. Disons, pour ton anniversaire?
Je ne sus que répondre. Un instant j’en voulu à Jess de ne pas m’avoir consultée au préalable.
Monsieur Auvono était d’accord pour que j’aille diner chez eux, mais qu’en serait-il de Marie ? Allait-elle accepter l’invitation ? Allait-elle seulement croire qu’il ne s’agissait que d’une invitation à diner, ou bien s’imaginerait-elle un quelconque stratagème de la part de la blondinette ? Ma mère avait toujours était du genre soupçonneux. Depuis notre déménagement et ma rencontre avec Jess, elle virait presque à la paranoïa. Je l’imaginais déjà posant tout un tas de questions plus indiscrètes les unes que les autres à Monsieur Auvono.
—Excusez-moi monsieur, dis-je d’une voix timide. Si ça ne vous dérange pas, j’aimerai en parler moi-même à mes parents. Ils sont assez particuliers, me justifiais-je tant bien que mal. Ils pourraient mal interpréter votre invitation.
—En effet, je conçois tout à fait qu’ils puissent être sur la réserve. Vous êtes nouveaux dans cette grande ville et nous nous sommes encore jamais rencontrés. Tes parents sont des personnes prudentes. J’agirais certainement de la même façon s’il s’agissait de mes enfants.
Ce n’est que lorsqu’il termina sa phrase que j’eu l’impression de respirer pour la première fois depuis de longues minutes. Mes épaules se relâchèrent au rythme de mes poumons qui se remplissaient d’air frais.
—Je te laisse t’occuper de ça et on en reparle lundi, déclara Jess. Père, nous devrions y aller.
Monsieur Auvono acquiesça et tendit une nouvelle main dans ma direction. L’instant suivant la Mercedes noire s’engageait dans l’épaisse circulation Parisienne, puis disparue à l’angle de deux rues.
Dans le bus qui me reconduisait chez moi, divers scénarios remplissaient mon esprit. Antoine serait compréhensif, et certainement heureux que sa fille chérie aille diner chez sa seule amie. Même si cela signifiait qu’il devrait certainement regarder un autre match tout seul. Marie, elle, voudrait certainement une myriade d’information concernant Jess et sa famille : Qui sont ses parents, que font-ils dans la vie, viendraient-ils me chercher, ou devrait-elle m’y accompagner ? Bien qu’elle eût le permis de conduire depuis près de dix-huit ans, la voiture de Marie n’avait pas quitté le garage depuis la fin du déménagement, et la seule pensée de conduire dans le trafic parisien la rendait malade. Le bus avait fait halte devant un arrêt. Je fixais, sans vraiment les voir, les hommes et les femmes qui attendaient presque patiemment leur tour lorsque mon regard se porta sur une large plaque bleu foncé accrochée au mur d’un bâtiment. Il y était inscrit « Boulevard Victor Hugo » en lettres blanches. Un soupire de dépit m’échappa lorsque je me rendis compte que nous n’avions parcouru que la moitié du trajet.
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Miia
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Il y a 2 ans
Kiria Parker
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Dacia
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Il y a 2 ans
Kiria Parker
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Il y a 2 ans