Fyctia
#9-Silence, ça sonne !
Sandra se réveille, un cri lui vrille le tympan. Le bébé ! Elle s’est endormie, et Esmé a glissé ! Affolée, elle retourne les draps. Elle tourne la tête, et aperçoit une petite chose qui se tortille, avec tout au bout, une touffe de cheveux roux. Soulagée, Sandra l'attrape, et la colle sur sa poitrine. Elle croise le regard de miel de sa progéniture. Une bouffée d’amour la souffle d’un coup.
- Sandra ! Et mon café ? Ma réunion zoom est dans 20 minutes !
Sandra grimace, et se lève tant bien que mal. Dans la cuisine, Jonas, son mari, bataille avec la Delonghi. Elle cale le bébé contre son aisselle et se contorsionne pour attraper le manche du porte filtre.
- Là, il est juste un peu capricieux…
- J'espère qu'il sera moins fort que la dernière fois ! J'en ai encore des crampes à l'estomac.
Il va s’assoir en maugréant, et plonge dans l’écran de son téléphone.
Tout à coup, la sonnerie de la porte retentit, et la fait sursauter. Esmé se met aussitôt à hurler. Sandra la berce, plonge ses lèvres dans sa crinière orangée, mais rien n’y fait, la bestiole s’agite de plus en plus. Sandra farfouille dans le bazar de la cuisine à la recherche d’une tétine. Jonas ne fait pas mine de l’aider.
On sonne de nouveau. L’affolement gagne Sandra. Elle positionne bébé contre son épaule pour lui tapoter le dos.
- Un petit rototot ?
Mais l’enfant ne l’entend pas de cette oreille. Il hurle, se cabre, Sandra a du mal à le maintenir.
- Marre de ce boucan, à la fin ! dit Jonas, ulcéré.
Il se lève, laisse sa tasse sur la table et s'éloigne. Juste avant de fermer la porte, il lui lance :
- Et je crois qu’on a sonné ! Tu es devenue sourde ma parole !
Il claque la porte. Au même moment, le petit ventre tendu d'Esme fait un grondement terrible, et Sandra sent quelque chose d’humide tâcher son avant-bras. Le son strident du visiteur se fait entendre de nouveau.
Sandra ouvre la porte. Devant elle, le facteur lui tend un paquet estampillé « les culottés ».
- J’arrive au bon moment, on dirait ! lui lance-t-il avec un clin d’œil.
Sandra détaille ses boucles rousses et se plonge dans son regard chaud et doux, caressant comme du miel.
Sandra se réveille, le cœur affolé. Esmé ! Mais non, ce n’était qu’un mauvais rêve. La voilà dans son couffin, le teint rougi par les pleurs, presque aussi rouge que ses cheveux. Sandra la prend dans ses bras, et la met au sein. Elle se calme, et aspire goulûment, en la toisant de son regard miel. Sandra se détend, serre son bébé contre elle. Tout sera bientôt fini.
- Sandra ! Qu’est-ce que tu fous ? J'ai une réunion zoom dans 20 minutes !
Agacée, Sandra est tentée de l’envoyer se faire voir. Mais il ne faut pas éveiller ses soupçons. Avec une manœuvre acrobatique, elle se lève, tout en gardant Esmé contre elle, et rejoint Jonas, qui bataille avec la Delonghi.
- C’est le manche du porte filtre…, dit-elle. Va t’assoir, je te l’apporte.
Jonas se plonge dans des réels tiktok pendant que Sandra ajoute quelque chose dans le café, et touille. Lorsqu’elle pose la tasse devant lui, il grimace.
- J’espère qu’il est moins fort que la dernière fois, j’en ai encore des crampes à l’estomac !
Sandra étouffe un rictus. S’il savait…
Soudain, la sonnerie retentit. Si tôt ? panique Sandra. Jonas, absorbé par son téléphone, n’y prête aucune attention. Le bruit strident a dérangé Esmé qui se met à hurler. Sandra la place contre son épaule, lui tapote le dos, tout en cherchant la tétine dans le capharnaüm de la cuisine.
- Là, mon bébé. Un rototot, et ça ira mieux.
Rien n’y fait, Esmé pousse des cris qui couvrent presque les sons aigus de la porte d’entrée. Et si Jonas décidait d’aller ouvrir ? pense Sandra, affolée.
- Quel boucan ! lance Jonas. Je vais dans le bureau, ma webconf avec Tokyo va commencer.
Il se lève sans songer à débrasser la table encombrée des vestiges du dîner.
- Et au fait, ajoute-t-il, on a sonné. Tu es sourde ou quoi ?
La porte claque. Au même moment, le ventre d’Esmé se détend dans un affreux borborygme, et Sandra sent quelque chose poisser son avant-bras. Elle se précipite à l’entrée, ouvre la porte. Un livreur Amazon, le visage complice, lui fait face. Son regard de miel la dévisage d’un air entendu, et sa chevelure rousse flamboie.
- J’arrive au bon moment, on dirait …
Il lui tend un carton intitulé « les culottés ». A l’intérieur, au milieu des couches, elle aperçoit un paquet de poudre blanche. Du cyanure. Sandra sourit. Tout sera bientôt fini.
Sandra est tirée du sommeil. Un malaise insidieux traverse son corps épuisé. Cet affreux cauchemar ! Un être cruel, surgit de nulle part, et lui vole son bébé ! Affolée, elle se tourne. Esmé est toujours là, sa chevelure rouille et son regard de miel braqué sur elle. Comme cet enfant est étrange ! Sandra n’y voit ni son reflet, ni celui de son mari. Elle prend Esmé et la colle au sein. Le bébé aspire le mamelon et tête en la fixant. Sandra, mal à l’aise, détourne le regard.
- Sandra ! Mon café ! Je vais être en retard !
Sandra cale Esmé contre elle et rejoint Jonas dans la cuisine. Ce dernier la toise, agacé. Il n’accorde pas un regard au bébé.
- C’est le manche du filtre qui bloque, Jonas, regarde.
- J’espère qu’il est moins fort que la dernière fois, j’en ai encore des crampes à l’estomac !
Il lui arrache la tasse des mains, et va bouder dans la cuisine. Tout de même, pas un regard pour Esmé, jamais une caresse… Comme si elle n'existait pas.
Sandra sursaute, et Esmé, interrompue dans sa tâche, se met aussitôt à hurler. Quelqu’un a sonné ? impossible d’en être certaine, avec ce boucan. Jonas ne semble rien entendre. Sandra fouille dans le bazar de la cuisine, à la recherche de la tétine. Esmé hurle de plus belle. Sandra, désespérée, la cale contre sa poitrine et tapote gentiment son dos.
- Un petit rot, peut-être ?
Esmé se cambre, s’agite, tente de fuir. Malgré le bruit, Sandra a l’impression que la sonnerie retentit encore et encore. Jonas ne bouge toujours pas. Mais pourquoi ne va-t-il pas ouvrir, bon sang ?
- Je vais travailler au café juste à côté, ce sera mieux pour les Jap. A toute à l’heure. Essaie d’aller faire les courses !
Interdite, Sandra voit Jonas quitter la maison, sans croiser personne dehors. Tout à coup, Esmé se calme. Un grondement intestinal retentit, suivi d’une sensation poisseuse sur son avant bras. Dans le silence enfin revenu, elle entend distinctement la sonnerie de son entrée. Epouvantée, une force irrésistible l’entraine malgré elle, lui fait déverrouiller la porte. Devant elle se tient un homme, aux cheveux roux, et aux yeux de miel, le regard braqué sur Esmé. La petite se redresse, et tend ses petits poings vers l’inconnu, le visage avide.
- Je crois que j’arrive au bon moment, murmure l’inconnu.
Il tend une boite en carton vide étiquetée « les culottés », et lui sourit d’un air sinistre. Sandra veut crier, faire demi tour, mais ses bras placent malgré elle Esmé dans la boîte. Puis, tout disparaît.
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clecle
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