Robcar Funeste engrenage Échec à l’hôpital

Échec à l’hôpital

Comme prévu, Maloire, mandat de perquisition en main, déboule très tôt le matin avec renforts, armes et bagages, au domicile du principal suspect, un certain Brice Vaillant. Les rapides recherches effectuées la veille n’ont rien donné sur son identité, vraisemblablement fausse. Qu’à cela ne tienne, il va maintenant passer la vitesse supérieure en examinant son studio de fond en comble, jusque dans le moindre recoin. L’armada des spécialistes qui l’accompagnent est composée d’experts en la matière, qui trouveront certainement une empreinte digitale, un cheveu ou un poil pubien pour con-fondre l’individu. Quelques gendarmes sont là aussi pour une éventuelle arrestation, mais illusoire semble-t-il, car les apparences ne laissent planer aucun doute. Ni Edgar ni son remplaçant au poste de surveillance ne l’ont vu rentrer hier au soir. Il est sans doute ailleurs que dans son studio.

Le propriétaire tend le double des clés à un gendarme et, sur l’ordre de ce dernier, retourne s’enfermer dans son appartement. Le petit groupe de policiers et d’experts gravit en silence l’escalier, jusqu’au deuxième étage où ils se postent méthodiquement sur le palier. Le gendarme de tête introduit délicatement la clé dans la serrure et sans faire de bruit, libère le verrou. Il se retourne vers ses collègues pour leur faire signe que tout est OK, et qu’ils se tiennent prêts à intervenir. D’un geste rapide, il actionne la poignée de la porte et, arme à la main, s’introduit dans le studio suivi de Maloire et Edgar. La pièce est plongée dans l’obscurité totale, seule une légère lueur filtre au travers des volets métalliques fermés. Maloire tâtonne le mur à la recherche d’un interrupteur et fait la lumière sur la pièce vide. Une forte odeur de javel envahit ses narines. On vient d’y faire le ménage, ou plus exactement, le grand nettoyage. Le lino qui recouvre le sol est reluisant de propreté, l’armoire de rangement débarrassée de sa poussière et le clic-clac en skaï marron alterne parties râpées et parties glacées. Le bloc-évier ne comporte aucune trace de saleté et la gazinière, malgré quelques éclats d’émail, brille comme à son premier jour. Il en va de même pour le lavabo, sa glace et le récepteur des WC qui affichent un blanc jauni exempt de trace. Maloire ouvre les placards au-dessus de l’évier et en extirpe une assiette et un verre qui semblent sortir de leur emballage. Exaspéré, il se dirige alors vers l’armoire, pour constater que cette dernière est vide de tout contenu.

– Merde ! s’exclame-t-il. Ce qui n’est pas dans son habitude et ne fait pas, non plus, partie de son vocabulaire usuel.

Mais là c’en est trop. L’hôte des lieux a fait table rase de toutes ses affaires personnelles, y com-pris draps de lit, serviettes et autres accessoires. Il a pris soin, avant de partir, de nettoyer l’espace avec une minutie hors norme. Ce n’est vraiment pas de chance, pense Maloire, d’être tombé sur un maniaque comme lui. La tâche va être rude pour y trouver un indice qui permette de l’identifier. Décidément, ces agresseurs sont très intelligents.

– Edgar, viens ! On s’en va. Laissons la place aux spécialistes, nous n’avons plus rien à faire ici, dit Maloire en sortant du studio.

– Que va-t-on faire maintenant Inspecteur ? répond Edgar, qui lui colle au train dans l’escalier.

– Dans un premier temps, réfléchir.

– Notre adversaire est très rusé, à croire qu’il fait partie de nos services et connaît toutes les fi-celles du métier.

– Je ne crois pas, il a longuement étudié toutes les situations possibles avant de se lancer dans son entreprise et a mis toutes les chances de son côté. Mais il commettra inévitablement une erreur.

– Côté chance, on peut dire qu’il en a, car réintégrer son studio pour le nettoyer et le vider sans se faire voir, si ce n’est pas de la chance, je ne m’y connais pas.

– Exact ! Je me demande comment il a pu faire, sachant qu’il n’y a aucun autre accès que celui sur la rue, sauf s’il est entré pendant que nous visitions son studio et qu’il nous a surpris. Il a pu alors se cacher et attendre notre départ pour agir. Mais par où est-il sorti, puisque tu ne l’as pas aperçu, je n’ai pas vu de correspondance avec lui sur ta liste, ni sur tes photos.

– Et sur celles de l’Inspecteur qui m’a remplacé ?

– Non plus, mais j’y pense, tu as vu une jeune femme sortir avec un sac de sport, et lorsque nous avons rapidement visité le studio hier, je me souviens avoir vu un sac de sport dans l’armoire. Comment était cette femme ?

– Assez jeune, en survêtement bleu clair, avec une casquette. Je l’ai prise en photo, elle est toujours sur mon smartphone, attendez, je la recherche. Tenez Inspecteur, la voilà ! Elle est prise de loin, mais la photo est assez nette pour la distinguer.

– C’est bien elle Edgar, elle est blonde et son sac de sport est rouge, comme celui que j’ai aperçu dans l’armoire. De plus, il a l’air bondé à craquer, il doit contenir le peu d’affaires qu’il avait, avec ses draps de lit et vraisemblablement son sac-poubelle. J’ai bien peur que notre perquisition ne donne rien.

– Mais alors, il doit s’agir de Marie Dubreuil, la « pseudo » Nymphomia ?

– Fort possible, faute de place disponible, elle a dû garer sa voiture dans une rue voisine, ou est venue par les transports en commun.

– Y avait-il des affaires féminines dans l’armoire ?

– Non, mais elle a dû lui rendre visite et comprendre la gravité de la situation en nous découvrant. Elle l’a appelé au téléphone et ils ont pris la décision ensemble.

– Ou tout simplement, elle a pris seule, la bonne initiative.

– Possible ! Décidément, si eux ont de la chance, nous n’en avons pas. Tu as été presque en contact avec les deux, sans que nous puissions en tirer un grand bénéfice.

– Désolé, Inspecteur, mais je ne pouvais pas m’en douter.

– Ce n’est pas un reproche Edgar, c’est une simple constatation.

– Et maintenant où va-t-on, Inspecteur ?

– Au bureau ! On va attendre les résultats de la perquisition et continuer nos recherches sur ce Brice Vaillant et sur la Coccinelle bleu ciel de Nymphomia.


Une semaine plus tard, les résultats d’expertises, relatifs à la perquisition du studio de Brice Vaillant, sont sur le bureau de Maloire. Des empreintes digitales ont bien été relevées sur les volets métalliques, mais elles ne sont pas assez précises pour être exploitées. La raison est que le support métallique rouillé est trop poreux, ce qui crée des interruptions linéaires. Aucune autre empreinte n’a pu être relevée dans la pièce, car le nettoyage a été accompli de façon très rigoureuse. Mais s’il a parfaitement nettoyé tout ce qui est visible, l’occupant a commis une faute. Il a omis de vider les bondes de siphon de l’évier et du lavabo. Ces petites cuves pleines d’eau, dont la fonction primordiale est d’empêcher la remontée des mauvaises odeurs. Mais qui ont aussi pour qualité et défaut de récolter des saletés ou petits objets de toutes sortes qui viennent, quelques fois, les obstruer, empêchant par là même le bon écoulement.

Tu as aimé ce chapitre ?

2

0

0 commentaire

Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.