Fyctia
La tentative échouée 4
– Je ne peux pas me prononcer avec certitude pour l’instant, il est trop tôt pour le dire, mais il est fort possible qu’il en soit ainsi. Il subira un handicap, avec une paralysie partielle ou totale de ses membres inférieurs, et ne retrouvera certainement jamais l’usage de ses jambes. Il sera contraint et forcé de passer le reste de sa vie dans un fauteuil roulant. Au mieux, il pourra ressentir quelques sensations, mais pas suffisantes pour marcher.
– Il y a bien un espoir, si infime soit-il ? reprend Edgar.
– Bien sûr, la médecine n’est pas une science exacte et les miracles sont possibles. On a vu par le passé des cas désespérés, guérir sans que l’on puisse l’expliquer. Le moral du patient joue un grand rôle dans sa guérison, c’est la raison pour laquelle je vous demande instamment de ne pas l’informer de mes propos et de lui laisser ouverte la porte de l’espoir.
– Bien entendu, Docteur ! Merci de nous avoir reçus et donné un peu de votre temps si précieux. Nous allons vous quitter et rendre visite à Alex.
Maloire et Edgar montent l’escalier, pensifs et contrariés par ce qu’ils viennent d’apprendre. Ils s’engagent dans le couloir en scrutant les numéros des chambres. Devant le 37, Maloire s’immobilise et frappe à la porte. Une voix intérieure lui demande de patienter quelques instants. C’est l’infirmière de service qui est en train de pratiquer quelques soins. Maloire attend et tue le temps en lisant les instructions de secours placardées sur le mur. La porte s’ouvre.
– Vous pouvez y aller, messieurs, et, surtout, ne le fatiguez pas trop, il est encore un peu sous l’effet de l’anesthésie.
– Ne craignez rien, madame, nous y veillerons.
Ils pénètrent dans la chambre sous le regard fatigué d’Alex.
– Bonjour Alex. Vous nous reconnaissez sans doute, Inspecteur Maloire et mon adjoint.
– Mais je te connais, toi ! répond Alex à l’attention d’Edgar, tu es Eddy, un nouveau membre du club ?
– Oui, mais en réalité, je suis l’inspecteur stagiaire Edgar Caublet. Je me suis immiscé dans votre groupe afin de te surveiller et te protéger d’une éventuelle agression. Tu m’en vois désolé si je n’y ai pas réussi, mais j’ai fait tout mon possible.
– Ne culpabilise pas, si je suis encore en vie aujourd’hui, c’est bien grâce à toi et je t’en remercie. Au fait, avez-vous vu mon chirurgien, et que vous a-t-il dit à mon sujet ?
– Que ta blessure est grave, mais que l’opération s’est très bien déroulée et que tous les espoirs sont permis. Tu le reverras bientôt, tu pourras lui poser toutes les questions que tu désires. En attendant, c’est nous qui avons quelques questions à te poser.
– Allez-y Inspecteur, ajoute-t-il à l’attention de Maloire.
– Edgar a pu poursuivre l’agresseur, mais n’a pas pu l’identifier. Vous qui l’avez vu de près, pouvez-vous nous le décrire ?
– Il est de taille et de corpulence, moyennes.
– Avez-vous vu son visage ?
– Oui, car il a soulevé la visière de son casque avant de soulever la mienne et de se pencher sur moi.
– Pouvez-vous en donner quelques détails ?
– Vous savez, Inspecteur, la pression exercée sur les joues par un casque intégral déforme quelque peu un visage. Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’il était de type européen et que ses traits étaient réguliers.
– Mais encore, avait-il un grain de beauté, une cicatrice ou un autre détail qui peut le personnaliser ?
– Non, par contre, il avait des yeux d’un bleu profond et un regard d’une énorme froideur.
– Vous a-t-il parlé ?
– Oui, il m’a demandé si j’allais bien, mais ce qui m’a surpris, c’est qu’il m’a appelé par mon pré-nom. Quand je lui ai répondu que je ne sentais plus mes jambes, il a ajouté que ce n’était pas important, car je n’en aurais bientôt plus besoin. J’ai alors compris qu’il allait me tuer. Heureusement, qu’Eddy est arrivé, ou plutôt Edgar, excusez-moi.
– Sa voix, avait-elle un accent ou un timbre particulier ?
– Non, elle était plutôt douce et il parlait très calmement. Il n’était pas excité et donnait l’impression de gérer la situation.
– Vous n’avez rien remarqué d’autre en particulier ?
– Si, il me semble l’avoir aperçu, au moment du départ, passer devant la place qui nous sert de lieu de rendez-vous. Une moto de la couleur de la sienne, ça se remarque, il devait me surveiller. Cet homme est un dément, il vous faut l’arrêter rapidement avant qu’il ne m’exécute.
Le verbe n’est pas trop fort, pense Maloire qui continue son interrogatoire. Il n’apprend rien de plus qu’il ne savait déjà de la bouche d’Edgar, à savoir que le motard pilotait une grosse moto verte. Décidément, cette couleur les poursuit puisque la « pseudo » Nymphomia conduisait, elle aussi, une Coccinelle verte. Cette correspondance entre la couleur de la moto et celle de la voiture est étrange, pour ne pas dire, bizarre. Ce ne peut être une coïncidence ou un choix fortuit de la part des agresseurs, ils sont bien trop intelligents pour ça. Mais faute d’explication, Maloire laisse tomber sa ré-flexion. Il prend congé d’Alex en lui souhaitant un bon rétablissement et en l’assurant de le tenir informé de l’évolution de l’enquête, lors de prochaines visites.
Sur le retour, Maloire raisonne à haute voix pour faire participer Edgar.
– Maintenant, la situation est claire, voilà comment je vois les choses. Alex est cloué sur son lit d’hôpital pour un bon mois. Le temps qu’il subisse de multiples contrôles pour surveiller l’évolution de sa blessure et du traumatisme causé. Ensuite, si tout va bien, il sera transféré dans un centre de rééducation pour y apprendre à s’adapter à son nouveau handicap. Cela peut durer encore un mois ou deux et ce n’est qu’après ces trois mois environ, qu’il pourra réintégrer son habitation. Je ne pense pas que l’agresseur attende ce moment-là pour terminer ce qu’il a commencé. D’autant qu’il se doutera que nous le surveillerons et que cela lui sera difficile, voire impossible de l’approcher. Il ne va pas, non plus, attendre qu’Alex soit en centre de rééducation, car la surveillance y est draconienne, avec des caméras implantées partout pour des raisons de sécurité. Donc, il va sans doute agir à l’hôpital où l’accès y est totalement libre, et la surveillance quasi inexistante.
– Vous êtes persuadé qu’il va chercher à finir son travail, comme vous le décrivez ?
– Bien sûr Edgar, lui, ou sa compagne ! Il va nous falloir poster une personne de chez nous en faction permanente devant sa porte, afin de contrôler tous les va-et-vient dans sa chambre. Nous avons tout au plus quatre semaines pour mettre la main sur ces individus et clore cette affaire qui n’a que trop duré. Je vais immédiatement donner des instructions en ce sens.
Maloire saisit son téléphone et sur un ton d’urgence, passe ses directives. Il ne faudrait quand même pas qu’il soit pris de vitesse par l’agresseur.
– Quel est le programme à venir ? lui demande Edgar à la fin de la communication.
– Nous allons suivre la piste que tu as commencée, en allant fureter dans la rue de la Paix à Grandbourg.
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