Robcar Funeste engrenage La dernière chance 3

La dernière chance 3

– Dorénavant, quand tu viendras au bureau, tu prendras toujours ta voiture et tu porteras une cas-quette ou autre. Fais en sorte que l’on ne puisse pas te distinguer avec précision sous ta nouvelle apparence. Il faut s’attendre à tout de la part des agresseurs et mettre toutes les chances de notre côté.

– Bien compris, Inspecteur !

– En ce qui concerne ta discrétion, à partir de maintenant et jusqu’à nouvel ordre, tu ne m’assisteras plus directement en public. Ce sera Maude qui m’accompagnera, je la ferai passer pour ma coéquipière et elle remplira parfaitement le rôle. Elle te tiendra au courant de tout ce qu’elle aura vu ou entendu. C’est OK pour toi ?

– Oui, Inspecteur.

– Pas de question particulière ?

– Une seule. Vous êtes certain que les assassins vont maintenant s’en prendre à Alex et qu’ils vont opérer par l’intermédiaire de la moto ?

– Oui, parfaitement. Ils sont très ingénieux et l’ont prouvé dans cette affaire. Marcel Savin a été tué par là où il pêchait, les prostituées occasionnelles des parkings, sa femme l’a été par une petite annonce affichée chez les commerçants et Rémi, tout comme son père, par sa gourmandise sexuelle. Nos agresseurs connaissent parfaitement leurs victimes, leurs points faibles et leurs passions. Celle d’Alex étant la moto, c’est par là qu’ils vont essayer de l’atteindre. J’en suis persuadé. D’autant qu’ils agissent toujours sur leur victime quand elle est isolée. Ce qui sera encore probablement le cas à moto. Donc c’est là que nous allons les attendre et que nous les arrêterons avant qu’ils n’agissent à nouveau.

– Bien compris, Inspecteur. Je vous suis à cent pour cent et appliquerai à la lettre tout ce que vous m’avez demandé, à commencer par mon look.

– En attendant, avec son adresse email et son compte Facebook, tu vas essayer de trouver l’identité de Nymphomia et ses éventuelles coordonnées. Fais-toi aider par Maude, vous irez plus vite à deux. Et n’oubliez pas non plus le téléphone mobile de Rémi. Demain, dès que j’aurai entièrement lu le rapport informatique de Jordy et le rapport des télécommunications, j’irai avec Maude rendre visite au Cybercafé d’où Nymphomia se connectait à Internet.

Maloire passe quelques coups de fil. Le premier pour s’assurer de la mise en place de la surveillance rigoureuse du domicile d’Alex. Le deuxième pour contacter le responsable de la société qui l’emploie, afin que ce dernier accepte de le mettre en repos forcé pendant un mois. Le troisième pour faire mettre sur écoute le téléphone mobile d’Alex, ainsi que celui de sa compagne Laure. Et le der-nier à l’informaticien Jordy :

– Allô ! Jordy ? C’est encore moi, Maloire.

– Que puis-je pour vous, Inspecteur ?

– Est-il possible d’appliquer la surveillance à distance d’un ordinateur, comme on le fait pour les écoutes téléphoniques ?

– Ça dépend de ce que vous souhaitez surveiller.

– Tous les mails qui entrent et sortent de sa messagerie.

– Rien de plus facile. La manipulation consiste à introduire et installer à distance sur son ordinateur, un logiciel espion qui nous retransmettra toutes les communications. Mais il n’y a rien de plus illégal aussi, car c’est du pur piratage.

– Pas de souci Jordy, je vous couvre par une demande officielle.

– Que vous faut-il pour mettre en place ce dispositif au plus tôt ?

– Rien ! J’ai déjà son adresse email sur l’ordinateur de son frère et je peux activer le système rapidement.

– OK, alors vous avez le feu vert et par la même occasion, mettez aussi celui de sa compagne Laure sous surveillance, ne sait-on jamais.

– C’est comme si c’était fait, Inspecteur.


Maloire, bien calé dans son Chesterfield de cuir brun marbré, adossé à la majestueuse biblio-thèque en bois de merisier massif, est comme hypnotisé par la rotation continuelle du plateau stroboscopique de sa platine hi-fi. C’est un modèle des années soixante-dix dont le bras, équilibré au gramme près, exerce une infime pression sur la pointe de lecture en diamant pur. Elle est reliée à un ampli-tuner, dont la façade en aluminium brossée est agrémentée de généreux boutons cylindriques. Le son est distillé par deux énormes enceintes colonnes, plaquées de bois, qui le restituent dans une pureté inégalée de nos jours par les appareils modernes. De sa main droite, il fait tournoyer les deux glaçons qui baignent dans un whisky millésimé. C’est comme ça, sur fond de musique classique, que Maloire réfléchit le mieux. Son esprit se détache du réel et vagabonde dans son imaginaire. Il fait le bilan de ses actions passées et celles à venir. Il recherche les omissions ou erreurs commises pour les transformer en atouts. Il fouille au plus profond de sa mémoire pour trouver le petit détail qui lui a échappé et qui, au final, peut faire la grosse différence. Cette affaire le mine particulièrement et l’empêche souvent de dormir, surtout depuis la mort de Rémi qui se présente pour lui comme l’annonce prochaine et quasi inéluctable de la mort de son frère Alex.

Le disque tourne, le temps passe, la pointe de lecture est arrivée en fin de course et fait retentir un crachotement répétitif. Maloire se lève et soulève délicatement le bras de sa platine qu’il repose sur son support. Son verre est vide et il va maintenant se restaurer et se reposer, non sans continuer ses pensées. La journée tire à sa fin et demain est un autre jour.


Il est tout juste sept heures quand Maloire rejoint son bureau. Un horaire matinal, résultant du manque de sommeil provoqué par ses nombreuses réflexions de la veille. Mais ce n’est pas plus mal comme cela, car il va pouvoir consulter tranquillement les rapports posés sur son bureau.

Trois enveloppes sont là devant ses yeux. Il ouvre un tiroir, saisit un coupe-papier effilé, en forme de couteau Laguiole, et le glisse sous le revers de la première enveloppe qu’il découpe proprement. Il en extrait deux pages, reliées par une agrafe dans le coin supérieur gauche. Avant même d’en lire le contenu, il retire cette agrafe mal inclinée et qui risque de déchirer le papier, pour la remplacer par une nouvelle mieux positionnée. Décidément, soit il est trop maniaque, soit ce sont les autres qui sont trop « je-m’en-foutistes ». Il prend connaissance du document, qui n’est autre qu’une liste de numéros téléphoniques, suivis des dates, horaires, temps de communication et noms des titulaires, correspondant aux appels effectués par Rémi Savin. Le dernier a été passé le jour de sa mort à dix-huit heures quinze. Une note manuscrite est ajoutée au bas de la liste pour expliquer que tous ces numéros appartiennent à son cercle d’amis ou contacts professionnels. Conclusion, Nymphomia ne l’a pas appelé sur son mobile, ce qui en soi n’est pas une bonne nouvelle. Il saisit la seconde enveloppe, qu’il ouvre avec autant d’application que la première et en extrait un ensemble de plusieurs pages, bien reliées par une réglette en plastique.

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