Fyctia
La dernière chance 2
– Le propriétaire de cet ordinateur passait régulièrement du temps sur des sites de rencontre. Il a eu beaucoup de contacts, mais le dernier en date, il l’a eu avec une jeune femme au pseudo de Nymphomia, via son réseau social.
– Que pouvez-vous nous dire sur cette Nymphomia ?
– D’après les échanges qu’ils ont eus au travers d’un Tchat, elle a vingt-huit ans, elle est plutôt grande, blonde aux cheveux mi-longs, et libérée sexuellement.
– L’avez-vous localisée ?
– Non, je n’ai pas pu obtenir son identification personnelle, car elle se connectait à partir d’un ordinateur dans un Cybercafé dont j’ai l’adresse. Je vous la donnerai, ainsi que la liste et les adresses email de toutes les personnes avec qui le propriétaire de l’ordinateur a eu des communications.
– Concernant ces adresses email, avez-vous trouvé celle de Nymphomia ?
– Bien sûr. J’ai même l’adresse de son compte Facebook.
– Et ça nous apporte quoi, son compte Facebook ?
– C’est un endroit où chacun s’y exhibe et affiche, plus ou moins, d’informations le concernant sur son mur. On peut aussi y entrer en contact direct avec ses amis virtuels. C’est par là qu’ils se sont connus et qu’ils ont conversé tous les deux.
– Sur son mur ! De quel mur parlez-vous ?
– On nomme « mur » la page d’accueil d’un compte Facebook. C’est une sorte de panneau d’affichage sur lequel on expose ses idées, ses préférences, ses exploits ou ses meilleures photos. Si vous, vous n’êtes pas connaisseur du sujet, demandez à votre adjoint, je pense que lui, l’est.
– Peut-on voir sa photo sur le mur de Nymphomia ?
– Oui, mais rien ne dit que c’est bien la sienne, on peut y insérer les photos que l’on veut.
– Et son adresse email, l’avez-vous vérifiée ?
– Non, mon travail s’arrête à vous donner les informations brutes que contient le disque dur. À vous de les exploiter par la suite. Si vous le souhaitez, je pourrai vous aider dans vos recherches, mais cela fera l’objet d’un autre travail. Pour revenir à son adresse de messagerie, c’est une adresse pseudonyme qu’elle employait, nymphomia@gmail.com. Il n’est pas sûr qu’elle se soit inscrite sous ses véritables coordonnées. Mais vous le verrez bien.
– Qu’avez-vous trouvé d’autre concernant cette mystérieuse Nymphomia ?
– Qu’elle a accepté un rendez-vous avec lui pour le lendemain soir devant un parking. Je suis en train de vous mettre tout ça au clair dans un rapport détaillé. Dès qu’il sera terminé, dans une paire d’heures, je vous le donnerai.
– OK, merci, Jordy, pour votre boulot ! Mon adjoint va prendre quelques notes en attendant votre synthèse, afin que nous puissions commencer nos recherches. Nous avons très peu de temps devant nous.
– Edgar, tu notes l’adresse email de Nymphomia, l’adresse du Cybercafé et tout ce qui est indispensable pour commencer au plus tôt nos investigations. Moi, je remonte à mon bureau.
Sur le retour, Maloire est à moitié soulagé. Les informations récoltées dans le disque dur sont-elles exploitables et pourront-elles mener à une piste sérieuse, ou encore, et une fois de plus, va-t-il se retrouver bloqué dans une impasse, face à l’imagination débordante et intelligente des agresseurs. Son récent entretien avec le commissaire lui revient comme un boomerang en mémoire. « Alex Savin est actuellement en danger de mort et s’il devient la quatrième victime, ce sera un sans-faute pour l’assassin et un fiasco mémorable pour vous et notre unité tout entière. Il vous faut absolument arrêter le coupable, sinon nous allons être la risée des médias ».
Le commissaire a parfaitement raison et Maloire est conscient d’en assumer l’entière responsabilité. Ce ne sera pas l’unité entière qui sera mise en échec et sera la risée des médias, mais surtout et avant tout, l’inspecteur Nathan Maloire. Il faut absolument qu’il fasse travailler ses neurones et trouve une solution rapidement. C’est ce qu’il est en train de faire, immobile dans l’ascenseur qui le remonte au cinquième étage, la tête inclinée vers l’avant et contemplant fixement le bout de ses chaussures lustrées qui dépassent de son pantalon à revers.
Edgar est maintenant assis face à un Maloire songeur et lui demande :
– Que fait-on, Inspecteur, avec les renseignements notés ?
Cette question a pour effet de le sortir de sa torpeur passagère et lui fait répondre dans la continuité de sa pensée :
– De toute évidence, les agresseurs ne vont pas agir dans les jours qui viennent, et ce, pour deux raisons. La première est qu’ils se doutent que nous sommes sur des charbons ardents et que nous redoublons de vigilance et de sécurité. La seconde est qu’ils n’ont certainement pas encore préparé le plan de leur prochain méfait. Cela nous laisse quelques jours pour établir notre propre plan de contre-attaque. Dans un premier temps, nous allons empêcher Alex Savin de sortir de chez lui pendant quelques jours, où nous monterons une garde rapprochée, mais discrète autour de lui. Dans un second temps, étant donné que nous ne pouvons pas l’assigner à résidence, nous le marquerons discrètement à la culotte, partout où il ira. Et c’est là que, toi Edgar, tu entres en action.
– OK, mais comment et pourquoi moi, spécialement ?
– Parce qu’Alex est un fervent motard et toi aussi. Tu vas t’inscrire dans son club de randonnées et tu vas te lier à ses membres, afin de participer à toutes les sorties que fera Alex.
– Mais il va me reconnaître ?
– Non, car il t’a peu vu. Cependant, pour ne pas prendre de risques inutiles, tu vas changer de look et te faire discret à partir de maintenant. Tu vas te laisser pousser la barbe et les cheveux, que tu coifferas différemment et tu porteras constamment des lunettes à verres photochromiques neutres quand tu seras en mission. De la sorte, il ne devrait pas faire de relation entre toi et l’inspecteur qu’il a pu voir précédemment, quand bien même, il se souviendrait de ton visage. Il en va de même pour nos agresseurs, dans la mesure où ils t’auraient, eux aussi, aperçu, ce qui a pu être le cas lors de l’assassinat de Madeleine Savin.
– Ça craint, je vais avoir la honte, vis-à-vis de mes potes, avec une telle allure.
– C’est le prix à payer pour réussir. Si on me l’avait demandé à ton âge, je l’aurais fait sans hésiter. C’est une expérience qui vaut la peine d’être tentée. Mais si tu refuses, je peux toujours le de-mander à quelqu’un d’autre.
– Non, non ! Inspecteur, j’accepte.
– Bon, l’idéal serait aussi que tu aies deux motos. Une pour le suivre dans ses déplacements journaliers, où tu ne serais jamais à découvert, car toujours casqué, et l’autre pour participer aux randonnées, afin qu’il ne puisse pas faire un éventuel rapprochement visuel entre les deux véhicules. S’il ignore qu’il est surveillé, il adoptera une attitude naturelle qui favorisera l’approche de nos assassins. C’est possible ?
– Sans problème. J’emprunterai la moto de ma copine pour les randonnées, elle sera d’accord et fière de participer indirectement à l’enquête.
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