Fyctia
La conséquence induite 6
Maloire sort de la demeure de la vieille dame et se rend auprès de la maison qui fait face à celle des Savin.
Effectivement, c’est une ancienne bâtisse, en forme de patio, à laquelle on accède par un porche profond. À l’intérieur de ce porche, sont situées de chaque côté et en vis-à-vis, deux portes donnant accès aux habitations qui ont vue sur la rue. On peut lire, sur leur plaque respective en cuivre lustrée et fixée bien en évidence, que ses occupants sont un dentiste et un oto-rhino-laryngologiste.
S’adressant à son adjoint il lui dit :
– Notre individu était sans doute là, dans le retrait d’une de ces portes, tapi dans l’ombre à sur-veiller. Il a dû nous voir arriver et a attendu notre départ pour agir. Il a eu beaucoup de chance, car à quelques minutes près, nous aurions pu le surprendre dans son méfait. Bon, maintenant que c’est vu, viens, on va continuer par une visite chez les commerçants.
Maloire quitte la petite ruelle et se dirige vers l’artère principale où se trouvent tous les commerces du quartier. C’est là que Madeleine Savin devait faire ses courses. Il entre dans une pâtisse-rie, attend que la dernière cliente en sorte et demande à la personne postée derrière le comptoir :
– Bonjour, madame, Police ! Nous enquêtons sur la mort de madame Savin, avez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet ?
– Non, rien de particulier, si ce n’est que c’était une femme très avenante et bien sympathique, qui venait régulièrement acheter des gâteaux pour le week-end.
– On nous a parlé d’une petite annonce qu’elle aurait passée chez certains commerçants. En faisiez-vous partie ?
– Oui, elle l’avait collée sur la vitre de la porte d’entrée pour qu’elle soit bien en vue.
– Qu’y avait-il d’écrit dessus ?
– Je ne me souviens plus exactement, « Cherche aide pour tâches ménagères à temps partiel », quelque chose comme ça, avec son nom et son adresse en dessous.
– Pas de numéro de téléphone ?
– Non, elle était sur liste rouge et ne voulait pas être dérangée pour si peu. De toute façon, elle préférait le contact visuel avec la première impression qu’il apporte sur la personne.
– Quelqu’un vous a-t-il questionné au sujet de cette petite annonce ?
– Non, vous savez, elle s’adressait aux gens du coin et ici, tout le monde se connaît un peu ! Je n’ai même vu personne la noter.
Maloire visite encore quelques boutiques dont le résultat identique, n’est pas plus encourageant. Relativement bredouille sur les échanges de ses entrevues, il retourne, accompagné de son adjoint, vers son véhicule. Au passage, il jette un dernier coup d’œil en l’air et aperçoit Berthe Bastille en train de les observer à travers les carreaux de sa fenêtre. C’est vrai qu’elle surveille, la vieille, rien ne doit lui échapper ! Son témoignage est à prendre au sérieux. Avec son adjoint, ils remontent dans leur voiture et repartent.
– Edgar, jusqu’ici, je pensais que notre assassin était une femme, mais maintenant ce n’est plus le cas. Nous sommes en présence de deux individus, a priori un homme et une femme, qui exécutent leur victime en suivant un rituel identique jusque dans le moindre détail et sans laisser aucune trace derrière eux.
– Oui, mais comment le jeune homme a-t-il pu entrer chez Madeleine Savin ?
– Il a dû se présenter en prétextant venir pour la petite annonce qu’elle avait passée, ce qui a eu pour effet de lui faire baisser sa garde. D’autant qu’elle n’avait pas laissé son téléphone sur l’annonce, préférant un entretien de vive voix.
– Oui, mais l’annonce parlait d’une aide-ménagère, donc d’une femme, pas d’un homme.
– Il a très bien pu évoquer le fait que c’était pour sa femme, ou sa petite amie, et qu’il venait se renseigner sur les horaires ou obtenir plus de détails sur les tâches à accomplir.
– Oui, effectivement, vu sous cet angle ça tient la route, d’autant que la vieille Bastille nous a affirmé qu’il n’avait pas l’air d’un voyou. Madeleine Savin a pu avoir la même impression en le voyant et l’a laissé entrer sans se méfier.
– Exact, bien raisonné. Ça éclaircit un autre point, le fait que le corps de la victime ne portait aucune trace de sa chute sur le sol. Il devait être suffisamment costaud pour pouvoir la retenir et la déposer sans la laisser tomber.
– Oui, mais pourquoi avoir autant d’attention avec quelqu’un que l’on va tuer ?
– Mystère ! Ce doit être un des traits de son caractère, ou de leur caractère, d’accomplir les choses proprement. Idem pour les indices inexistants, qui nous confirment que nous sommes bien en présence d’assassins organisés et méticuleux. Il faudra s’en souvenir.
– Cette affaire se complique Inspecteur, maintenant que nous avons deux assassins.
– Oui et non ! C’est probablement un couple, ou un pseudo-couple d’amis. Il nous suffit d’en trouver un pour mettre la main sur l’autre.
Chemin faisant, Maloire et son adjoint poursuivent leur conversation en émettant diverses hypothèses. Si jusqu’à présent, ils avaient deux victimes, dorénavant ils auront deux agresseurs.
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