Jeanne F. FRANCINE ET EMILIEN A LA FERME LA MERE NOEL

LA MERE NOEL

Je le regarde étonner.


— Quelle idée ?


— Pour que tu ne te refroidisses pas en venant chez moi.


Je secoue la main, un petit sourire en coin. Il est mignon, à s'inquiéter pour moi.


— Ne t'inquiété pas, c'est l'affaire de quelques jours, je vais serrer les dents et endurer le froid comme une grande fille que je suis.


Il secoue la tête, un air têtu dans les yeux.


— Pas question. Tu as la gentillesse de venir m'aider, alors il est de mon devoir de résoudre ce problème. Mais, je crois avoir trouvé la solution.


— Quelle solution ? Tu vas construire un tunnel entre chez toi et chez moi ?


Fière de ma blague, je ricane, comme une gamine.


— Non, j'ai trouvé une idée beaucoup plus simple, tu verras, c'est une surprise.


Encore une surprise ? Et d'ailleurs en parlant de cela, j'ai oublié de regarder ce que Mauricette avait préparé pour moi sur le lit. Je grimace,


— Tu sais, je ne suis pas fan des surprises.


Il se lève, débordant d'enthousiasme, je le vois sautiller de contentement, un sourire de gosse à bêtises sur le visage. Je sens l'embrouille arriver.


— Qu'est-ce que tu vas faire ?


Il prend le plat dans le four, le pose sur la table puis s'assied un air satisfait sur les lèvres.


— Tu verras, je suis persuadé que tu vas aimer. Ce soir, tu ne vas pas te geler pour venir manger !


Je le vois me servir une pomme de terre au four avec son coulis de fromage et de crème, mais une sorte de gêne me tord les boyaux.


— Je t'interdis de rentrer chez moi pendant que je n'y suis pas.


Hors de question, qu'il aille fouiller dans mes petites culottes. Rien qu'à l'imaginer dans mes tiroirs regorgeant de ma lingerie à dentelle, le rouge me monte aux joues.


Car oui, je suis une fan des dessous affriolants, j'en ai de toutes les couleurs et de toutes les formes. Même les spéciaux, "semaine de règles", je mets des portes-jarretelles et des bas sous ma combinaison de travail et mes bottes en caoutchouc, juste pour me sentir moins déprimée. C'est mon petit péché mignon à moi.


Donc, hors de question qu'il aille fouiller mes affaires cette facette de moi doit rester secrète.


Il me regarde surpris et un peu vexé aussi.


— Ne t'inquiète pas, je ne rentrerais pas chez toi, je n'en aurais pas besoin. Mange avant que cela refroidisse.


Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que le petit diable qui s'échine à me rendre la vie impossible ces derniers temps va encore frapper. Je mange du bout des lèvres, le regardant de travers pour essayer de deviner ce qu'il se trame dans cette belle caboche boutonneuse.


Mais il ne lâche rien, alors j'abandonne et passe le reste de la journée un peu angoissée. Quand, quinze heures arrive, je remballe mes lapins, les prépare pour la nuit et charge la camionnette réfrigérée d'Émilien de toutes les caisses pour le marché. Puis je passe à la traite des vaches, récupère du lait frais pour le mettre en bouteille, puis le rajoute aux autres caisses. Mes pulls, bonnets et autres produits laineux, côtoient les fromages, le beurre et le lait d'Émilien. Je prépare une petite cage en bois, que je tapisse de paille, puis j'y mets Framboise et ses trois lapereaux. Tous les quatre sont d'un noir profond et je suis persuadée que les bébés font attirer les enfants. Une fois tout en place, je me dirige vers mon chez-moi, pour me changer. J'ai rendez-vous à dix-sept heures trente sur le stand. Et il est hors de question d'être en retard, avec Mauricette. D'ailleurs en parlant du dragon, je vais voir ce qu'elle a prévu pour moi. J'espère qu'elle ne compte pas que je porte un de ces chapeaux de Noël ridicule qui clignote ou qui chante des chants de Noël à tue-tête.


Arrivée chez moi, je me précipite vers la chambre pour voir "ma surprise", une housse noire surmontée d'un cintre m'attend sagement. Je la saisis et descends la fermeture éclair. Et petit à petit, des couleurs vives me sautent aux yeux, du vert, du rouge, du blanc.


— Mais c'est quoi ce bordel ?


Pour en avoir le cœur net, je vide la house sur le lit, et essaie de reconstituer ce puzzle de tissus. Une fois assemblée, la bouche m'en tombe par terre.


Elle a prévu pour moi un déguisement ! Ce n'est pas carnaval ! Et puis, il est hors de question que je mette ça ! La jupe est trop courte, les talons sont trop hauts. Et puis, je ne suis pas un P…… De "LUTIN DU PÈRE NOËL" hors de question !


Je saisis mon téléphone, en rage. J'appelle Paul. Il décroche et je ne lui laisse pas le temps de parler, je lui aboie dessus.


— Passe-moi Mauricette !


— Ha ! tu as vu ton déguisement ?



Je bouillonne de rage, lui aussi, était au courant ?


— Passe-moi Mauricette, je m'occuperais de toi plus tard.


Des bruits de fonds me parviennent, on tape, on crie, on rigole, puis la grosse voix de ma nouvelle ennemie se fait entendre.


— Oui, ma belle, qu'est-ce que tu as ?


— Je ne porterais pas ton truc, hors de question !



Gros, soupir de désespoir, puis sa voix ferme me répond.


— Céline le portait tous les ans, et il fait fureur, alors, oui tu vas le porter ! Moi aussi je serais en costume. Alors, arrête de faire l'enfant et ramène-toi ici !


Je tape du pied, la gorge serrée par l'angoisse et la colère. Je ne m'imagine pas Céline en costume et encore moins Mauricette, engoncée dans un collant, lui moulant le corps.


— Tu me mens, Paul n'aurait jamais autorisé Céline à porter ce truc !


Et là, j'ai senti un tremblement de terre passer au travers du téléphone, elle s'est mise à me hurler dessus.


— Comment oses-tu me traiter de menteuse ! Tu as intérêt à rappliquer, et avec ta tenue, sinon, je te la passe moi-même devant tout le monde. Céline le faisait, et je vais le faire moi aussi. Il n'y a pas que toi sur terre, ma fille, alors arrête de me prendre le choux et rapplique ici.


Ou là, elle est vraiment furax. Alors j'essaie de la calmer.


— Oui, mais tu te rends compte que je vais me geler ?


— N'importe quoi, ton costume est rembourré, alors arrête de tourner autour du pot et mets le. On serra au top toutes les deux, toi en lutin, et moi en mère noël.


— Tu seras en mère Noël ?


Ho, mon dieu, je sens que je ne passerais pas inaperçue sur le marché. Moi, en lutin de calendrier olé olé, et elle, en mère noël ogresse de petits enfants pas sages. Parce que vu sa stature, elle fait plus tôt penser à la mère fouettarde qu'à la gentille mère Noël.

Tu as aimé ce chapitre ?

2 commentaires

Camille Jobert

-

Il y a 6 ans

Je sens que je vais bien rigoler !!

Manon Kaljar

-

Il y a 6 ans

HAHAHA je les imagine tellement toutes les deux avec leurs tenues sur le marché ! ça va être jolie à voir ça je le sens !
Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.