Jeanne F. FRANCINE ET EMILIEN A LA FERME REVES PERDUS

REVES PERDUS

- Le grand bal a commencé. Je serais curieuse de savoir qui va gagner !


Je me tourne brusquement vers elle.


- Personne ne va gagner. Par contre, toi, dès que tu auras pondu ton marmot, je te tue. Tu ne pouvais pas garder ta langue dans ta bouche pour une fois ?


Vous pensez que je l'ai vexée ? Eh bien non ! Elle me sourit, apparemment heureuse d'elle. La colère au ventre je sors de ma place de parking, et reprends la route pour rentrer chez moi.


- Tu prends cela trop au sérieux. Tu verras, tu me remercieras dans quelques mois.


Elle est désespérante.


- Et comment je fais, si tous les célibataires du coin me demandent de sortir ?


- Et bien, deux solutions s'offrent à toi. Soit il te plait et tu dis oui, soit il ne te plait pas et tu dis non. C'est simple pourtant.


- Céline, je suis nulle pour tous ces trucs. Je ne sais pas dire non, et je ne veux pas sortir avec Albert, et tu as vu, comme il a insisté ? Comment je fais au marché ? Je ne vais quand même pas le rembarrer devant tout le monde.


- Ne t'inquiètes pas ma belle, ma mère va venir et veillera au grain pour toi. Si un type t'embête, tu lui dis et elle lui cassera la tête.


J'avais presque oublié l’arrivée de Mauricette, et un sourire étire mes lèvres. Je ne sais pas pourquoi, mais j’aurais aimé avoir une maman comme elle, forte et prête à tout pour sauver sa famille. Au lieu de cela, ma mère était une femme battue, qui n’avait plus rien d’un être humain à la fin. Je la revois, son sourire doux, mais triste, et ses yeux apeurés, toujours à l’affut du moindre bruit, du moindre claquement de porte.


Penser à elle, me rend toujours nostalgique et le cafard commence à m’envahir doucement, mais surement. Céline à côté de moi ne remarque rien et parle d’une voix enjouée.


- Si tu l’avais entendu au téléphone, elle était hystérique. Elle va faire une super mamie gâteau.


Mauricette en mamie gâteau, je ne sais pas, par contre, attention, les petits mioches, si vous touchez un cheveu de ce futur petit bout, elle est capable de vous mettre la tête dans le bac à sable.


Puis mon esprit dérive et j’imagine mon enfant au milieu de la cour d’école, tout seul sans personne pour le protéger, juste moi. Pas de papi-bricolo, pas de mamie gâteau et même pas de papa costaud, juste moi et mes lapins. Je secoue la tête, je ne serais pas une bonne maman, ma famille est trop bancale. Bien sûr, il y a ma sœur, mais elle vit loin, et je ne sais pas si elle serait une tatie d’enfer. Elle a déjà deux enfants alors, se coltiner les miens, je ne pense pas. La solitude vient me prendre comme une bouffée de chaleur, et j’en veux une fois de plus à mon père, de m’avoir créé, et fais de moi ce que je suis, une sauvageonne qui n’arrive pas à faire confiance à qui que ce soit. Les larmes me montent aux yeux et je gémis doucement. Il faut que je me reprenne, je respire doucement et calmement.


- Hé, qu’est ce qu’il t’arrive ? Je plaisante, si tu ne veux pas te faire draguer, tu le dis à Paul et il va faire le ménage. Ne t’inquiète pas.


Mais le torrent de larmes me submerge et je pleure en silence.


- Francine, c’est moi qui suis enceinte et doit avoir des sautes d’humeur ! Gare-toi, je vais te faire un calinou.


Je secoue la tête et lui réponds d’une voix chevrotante.


- Non, ce n’est pas ça. Si j’ai des enfants, ils vont se retrouver tout seuls. Je n’ai personne, ma sœur habite trop loin et le papa, je ne sais même pas qui s’est encore. Il va être malheureux ce gosse. Et je lui dis comment que son grand-père est un meurtrier ? Je suis une maman trop nulle, je resterais toute seule avec mes lapins. Je vais mourir en les brossant et ils finiront par me bouffer quand je serais morte.


Je sens la main de Céline se poser sur ma joue et essuyer mes larmes.


- Moi, je suis là, ma poulette. Je suis ta famille moi aussi. On se connait depuis longtemps toutes les deux. Et puis il y a Paul aussi, il t’aime, et puis maman aussi elle t’aime.


Je me tourne pour la regarder. Elle est toute chamboulée, et son regard brille de larmes contenues. Elle continue avec une voix douce et rassurante.


- Et puis, tu ne tomberas pas enceinte avec tous les préservatifs que t’a donnés Yvette.


Je souris tristement, je sais qu’elle veut me remonter le moral, mais quand le blues me prend il est difficile de me faire sourire.


- Tu sais Céline, je n’y arriverais jamais à avoir un mari, une famille. J’ai trop peur qu’il ressemble à mon père. Et moi, je crois que je serais incapable de l’aimer cet enfant.



- Arrête de dire des bêtises plus grosses que toi. Tu seras une maman comme les autres, qui fait ce qu'elle peut avec ce qu'elle a. Tes nièces, tu les aimes, tu es drôle avec elles, tu les chouchoutes quant tu les as, alors, ne t’inquiète pas pour tes enfants. Laisse faire la nature. Un jour tu tomberas sur un type qui te donnera confiance et puis tous les hommes ne sont pas comme ton père. Regarde Paul, il est tout mignon avec moi.


- Oui, mais tu l’as pris.


- Tu n’en voulais pas à l’époque, il fallait bien que quelqu’un se dévoue.


Je lui souris.


- Je vois quel sacrifice tu as dû faire pour vivre avec lui ! Depuis que vous êtes marié, tu as le sourire en permanence.


Elle me renvoie mon sourire, le regard plein d’amour.


- Ce type est parfait, que veux-tu !


Au détour d'un virage, ma maison se dessine au loin et un sentiment de paix vient m’envahir. Cet endroit et mon havre, ma bouée.


Devant mon havre, je gare la voiture et remonte l’allée jusqu’à l’entrée d’Émilien, pendant que Céline rejoint sa moitié à l'étable. J’ouvre la porte et le silence qui règne me donne des sueurs froides. Il est peut-être en train d’agoniser dans un coin.


Je monte à l’étage doucement et par la porte entrouverte je le repère. J’entre doucement et m’approche. Il respire doucement, le visage pâle parsemé de cloque rouge. Il a l’air d’un enfant comme cela. Je rebrousse chemin, dépose les médicaments sur sa table de la cuisine. Puis je me prépare à affronter cette journée, avec les catcheuses d’Émilien.


Il est plus de huit heures du soir, quand je passe le bout de mon nez par la porte de la grange. C’est un moteur de voiture qui m’a fait bouger. Mon corps ne réclame qu’une chose, une douche bien chaude et un lit douillet. Depuis que Paul et Céline m’ont quitté vers midi, je ‘n’ai pas arrêté. Entre mes lapins, les vaches et le fromage à mouler, je n’ai pas levé la tête de la paille.


Je ferme la porte de la grange et me dirige vers les phares allumés devant ma maison. Qui peut venir à cette heure-ci ?


Je me traine plus que je ne marche, je contourne la maison et me retrouve en arrêt devant la scène qui se déroule sous mes yeux.


César en civil, un bouquet de roses à la main, et face à lui, un Émilien, le sourire aux lèvres. Je suis tétanisée devant cette scène des plus romantiques. Je ne sais pas quoi faire, approcher ou bien reculer pour les laisser tranquilles. Je les scrute, un pincement au cœur. Mes rêves érotiques viennent de s'écrouler devant mes yeux ébahis.

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12 commentaires

Simon Saint Vao

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Il y a 6 ans

ah enfin !

Manon Kaljar

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Il y a 6 ans

Mais non Francine César vient pour toi voyons ;) ! Et émilien est le comité d'accueil garant de ta sécurité ^^ J'ai hâte de découvrir la suite !!

Euglae

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Il y a 6 ans

Vivement la suite ...

Jeanne F.

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Il y a 6 ans

Siii ! Tu as bien lu, moi aussi en l'écrivant j'étais complétement anéantie.

Sylvie De Laforêt

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Il y a 6 ans

non ???? IMPOSSIBLE ?

Jeanne F.

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Il y a 6 ans

il n'y a pas de chat dans l'histoire, alors, j'ai pensé au lapin. Le mien me mordait le bout des doigts, un vrais psychopathe.

Catherine kakine

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Il y a 6 ans

Je dirai carnivore lol

Catherine kakine

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Il y a 6 ans

Est ce que je suis tordue de dire que j'étais ptdr quand elle imaginait son enfant tout seul ...et qu'à la fin elle se faisait bouffée par les lapins ...

Jeanne F.

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Il y a 6 ans

Ben moi non plus, en l'écrivant je me suis dis, il y a un problème !

Mymy M. *Sakuramymy*

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Il y a 6 ans

Heiiiiiin cest quoi ca ? J ai pas tout compris Mdr
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