David.J FRACTURE Chapitre 6 (3/3)

Chapitre 6 (3/3)

Chapitre 6 - Une troisième victime


Puis…

Un bourdonnement, quelque part.

Un battement de cœur.

Un autre.

Lents. Lourds. Étouffés sous une masse invisible.

L’air se referma sur lui.

Un picotement dans ses doigts. Un fourmillement ténu dans sa nuque.

Un son lui parvint.

D’abord lointain.

Puis plus net.

Tic-tic-tic.

Un bruit régulier. Métallique.

Quelque chose lui appuyait sur l’épaule.

Une voix. Floue.

— … Étienne ?

Une pression. Quelqu’un le secouait.

Il ouvrit brusquement les yeux.

Lumière.

Elle lui brûla la rétine, l’obligeant à plisser les paupières. Il inspira trop vite, une douleur sourde déchira sa tempe.

Son souffle était erratique, ses muscles ankylosés comme s’il avait dormi des heures dans une position impossible.

Ses paupières tressaillirent, tandis qu’il tentait de rassembler ses pensées.

Où… ?

Le monde s’imbriqua autour de lui, flou d’abord, puis brutalement familier.

Un bureau.

Son bureau.

L’odeur de café froid. L’écho lointain des conversations. Le cliquetis d’un clavier.

La main qui le secouait disparut.

— … Étienne ?

La voix de David lui parvint, lointaine. Lourde.

Étienne releva lentement la tête. Son cou était raide, ses membres engourdis.

David se tenait devant lui, une tasse de café fumante à la main. Son regard oscillait entre l’agacement et une inquiétude mal dissimulée.

— Mec, t’as dormi ici toute la nuit ?

Étienne cligna des yeux, cherchant à rassembler ses pensées.

— Je… Comment je suis…?

David haussa un sourcil.

— T’es sur que ça va?

Étienne secoua la tête, comme s’il émergeait d’un long tunnel.

— Je fais quoi… ici….?

Un silence.

— Comment ça ? Tu fais quoi ici ?

— Hey mec, je crois bien que tu as encore passé le nuit au bureau…

Un froid s’abattit sur Étienne.

— Non. Non, hier après le groupe tu m’as ramené.

— Quoi ?

— Chez moi.

David le fixa, son expression se refermant légèrement.

— Mec… Je t’ai pas ramené.

— Si. Si, putain ! Tu m’as ramené, j’ai bu un verre d’eau, j’ai…

Il s’arrêta.

Son souffle se bloqua.

Les images défilaient dans sa tête.

Il se revoyait dans son appartement, seul. Il se souvenait avoir posé ses clés sur la table, retiré ses chaussures.

Mais maintenant…

L’image des clés était floue.

Le contact du sol sous ses pieds, incertain.

La sensation du verre contre ses lèvres…

Avait-il seulement eu soif ?

Son propre souvenir se tordait, une photo froissée puis lissée, mais dont les contours ne correspondaient plus.

— Et la troisième victime… cette nuit…

Il inspira un coup, mais l’air sembla se coincer dans sa gorge.

David le regardait toujours.

Un soupçon d’inquiétude avait remplacé son agacement.

Il prit une gorgée de café, puis planta son regard dans le sien.

— Bordel, Étienne… Tu me fais flipper. De quoi tu parles?

— J’sais pas…J’sais plus…

Ses propres souvenirs ne lui semblaient plus solides.

Sa nuit entière s’effritait, il n’arrivait plus à en assembler les morceaux.

Son cœur, lui, cognait lentement.

Trop lentement.

Un battement.

Puis un autre.

Il n’était plus vraiment calé sur le rythme du monde.

David le fixait toujours.

Mais Étienne avait l’impression que son regard était devenu… autre.

Un peu trop perçant.

Un peu trop insistant.

Il savait quelque chose que lui-même ignorait encore.

Les dernier souvenirs net.

Le groupe de soutient.

Un trou de mémoire.

Le retour à son appartement.

L’insomnie de la nuit.

La présence chez lui.

Le signalement de la troisième victime.

Le lieu du crime

Le cadavre.

Le verre sur la table.

Et après…

Rien.

Un silence tomba entre eux. Lourd. Presque tangible.

David souffla du nez, un tic nerveux qu’Étienne lui connaissait.

— T’as jamais bougé d’ici.

— Quoi ?

— Ce matin, quand je suis arrivé, t’étais là. Assis. Figé. Comme si t’avais jamais quitté cette chaise.

Les battements de son cœur ralentirent.

— Personne ne m’a vu partir ?

David secoua la tête.

— Non. Personne ne t’a vu arriver non plus.

Il tenta de reconstruire sa nuit. Mais rien.

Le trajet retour était un trou noir.

Pas d’image, pas de son, pas la moindre sensation du volant entre ses mains.

Il ne se souvenait pas de la route.

Il ne se souvenait pas d’avoir quitté la scène de crime.

Une pointe d’angoisse vrilla ses entrailles.

Une fatigue écrasante alourdissait chacun de ses muscles, rendant le moindre mouvement pénible, comme si son corps luttait contre un poids invisible.

Il passa une main sur son visage, tentant d’éclaircir ses pensées.

Quelque chose ne tournait pas rond.

David le fixait. Trop longtemps. Trop profondément.

— T’es sûr que ça va ?

— Ouais…

Mensonge. Mais que pouvait-il répondre, s’il ne savait même plus ce qu’était la vérité ?




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1 commentaire

NohGoa

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Il y a 23 jours

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