Fyctia
2 : Destinée à l'oubli
Réveillée par la douce lumière du soleil filtrant au travers de la fenêtre de son appartement au sein de la Magic Academia, Maeva tente au mieux de repousser l’angoisse laissée par le cauchemar qui a, une fois de plus, habité son sommeil. La peau moite et le corps transi par la fatigue de cette nuit peu réparatrice, l’adolescente de dix-sept ans se lève lentement. Après seulement quelques pas lourds, elle s’arrête devant l’immense bibliothèque occupant le mur entier de la grande chambre qui l’a vue grandir ces dix dernières années. Pendant plusieurs minutes, ses yeux dorés parcourent les tranches des centaines de livres, lisant au hasard quelques titres pour ensuite se remémorer dans le moindre détail le contenu de chacun.
Dotée d’une mémoire phénoménale, Maeva peut réciter sans peine chaque passage des nombreux volumes couvrant non seulement l’histoire du monde d’Amarantha, mais aussi l’immense complexité de la magie élémentaire. Selon Rhina, sa mère adoptive, jamais personne n’a démontré une telle capacité, fait que même les Anciennes ne peuvent nier malgré toutes leurs connaissances.
Logiquement, cette aptitude devrait faire de Maeva la plus grande enchanteresse que le monde n’ait jamais connue. Malheureusement pour elle, la situation est tout autre. Voyez-vous, la magie dans son ensemble ne dépend pas que de la connaissance. Elle demande à ses adeptes de puiser dans cette essence que l’on nomme l’Ether. Une énergie pure qui se dégage d’absolument tout. Une substance que les enchanteresses apprennent à manipuler habilement pour plier les éléments à leur volonté.
Habileté que Maeva ne possède aucunement.
Chaque fois qu’elle essaie de lancer même le sort le plus simple, le résultat est au mieux décevant ou, au pire, catastrophique. Quelque soit l’élément concerné, ce dernier échappe inévitablement au contrôle de la pauvre Maeva qui s’est retrouvée brûlée, presque noyée, emportée par un tourbillon et quasiment avalée dans les entrailles de la terre au fil de ses années de formation. Et cela est sans compter les dommages causés à la prestigieuse académie.
En fait, le problème est si grave que les Anciennes lui ont interdit la pratique de la magie en dehors des évaluations annuelles obligatoires. Évaluations qu’elle a évidemment toutes échouées, ayant même blessé les évaluateurs à plus d’une reprise.
Clairement la honte de la prestigieuse école, Maeva n’est certaine que d’une chose : elle est destinée à être oubliée. Presqu’adulte aujourd’hui, elle ne compte plus les fois où elle a supplié Rhina de lui expliquer la raison qui force les Anciennes à la garder dans leur établissement. La réponse est toujours la même : elle doit être patiente et faire confiance au destin.
Le destin, voilà le concept le plus cruel que le monde n’ait jamais inventé d’après Maeva. Un simple mot pour décrire une fatalité imposée par une puissance supérieure incomprise de tous. Une réponse facile pour expliquer l’inexplicable.
Comment faire confiance à ce fameux destin lorsque celui-ci vous a abandonné dès votre naissance aux portes d’une école pour laquelle vous n’avez aucune affinité ?
Comment lui faire confiance lorsque vous savez que d’ici moins de deux mois vous serez chassée du seul endroit que vous n’ayez jamais connu ?
Et comment être patiente lorsque toutes les personnes qui vous entourent n’ont que pour seul objectif de vous mépriser et de vous ridiculiser ?
Immobile depuis plusieurs minutes devant le miroir de la minuscule salle d’eau de son appartement, Maeva observe son reflet. Comme toujours, son regard mordoré est tout ce qu’elle voit. Plutôt petite, son corps frêle et sans forme aguichantes remplissant difficilement sa nuisette n’a rien de remarquable et sa longue chevelure auburn, encore hirsute suite à son sommeil agité ne fait pas bon effet. En fait, si ce n’est des catastrophes qui font sa renommée bien malgré elle, elle serait presque invisible aux regards de son entourage.
Dans un monde moins sombre, nous pourrions tenter de rassurer Maeva en lui expliquant qu’elle trouvera éventuellement sa voie. Or, dans le monde d’Amanrantha, il n’existe qu’une seule voie noble pour une femme : devenir une puissante enchanteresse. Les autres sont envoyées aux confins des territoires les plus reculés, méprisées pour leur incapacité à utiliser la magie pour la gloire de leur monde.
Voilà ce que ce cher destin réserve à Maeva.
Troublée par ses pensées sombres, l’adolescente peigne avec flemme sa chevelure, observant la larme chaude qui descend le long de sa joue pour s’arrêter à la pointe de son menton.
Alors qu’elle fixe la fine gouttelette, l’adolescente ressent une douce chaleur familière à la base de son cou, tout juste au-dessus de sa poitrine. Comme chaque fois qu’elle est angoissée ou apeurée, elle sent le mystérieux pendentif surgir de sa peau. Après avoir déposée la brosse, elle pose délicatement ses doigts sur l’objet qui répand alors en elle une sensation de réconfort. D’abord effrayée par l’étrange apparition lorsqu’elle était plus jeune, elle a depuis longtemps accepté sa présence, cet objet étant la seule chose capable de la rassurer dans ce monde où elle ne se sent pas à sa place.
Bien sûr, les Anciennes ont tenté maintes fois de la convaincre que cet objet inconnu représentait un danger pour elle dès qu’ils ont appris son existence. Ils ont même essayé de lui retirer à quelques reprises, sans son consentement évidemment. Heureusement, leurs tentatives sont toujours restées sans succès, l’objet disparaissant simplement sous sa peau peu importe les sorts ou les méthodes barbares utilisées pour tenter de l’extraire.
Ses doigts caressant les lignes fines du tétraèdre argenté creux formant le pendentif, Maeva se perd une fois de plus dans ses pensées. Évidemment qu’elle a tout tenté pour connaître les origines de l’objet, mais aucun livre disponible dans l’imposante bibliothèque de l’académie ne contient la moindre information à son sujet. En soi, cela pourrait être négligeable, mais le fait qu’il résiste à la puissante magie des Anciennes reste un insondable mystère pour l’adolescente.
Un mystère qu’elle vénère tout particulièrement, elle qui méprise les Anciennes et leurs élitisme écœurant.
Profitant aussi longtemps que possible de la sensation de réconfort apportée par le pendentif, Maeva reste néanmoins consciente qu’il ne résoudra pas le problème qui la hante : si dans deux mois elle ne démontre pas la maîtrise d’au moins deux éléments, elle sera bannie de la Magic Academia et devra affronter seule un monde inconnu et hostile aux Sans-Magie comme elle.
Troublée, l’adolescente est toujours immobile dans la salle d’eau lorsqu’elle sent soudainement une présence dans son appartement.
— Maeva, rassure-moi tu ne comptes pas t’absenter une fois de plus à tes cours ? demande une voix inquiète dans son dos.
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Liverne Grigois
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