Fyctia
Silver 1/2
"La capote c’est le soulier de verre de notre génération, on l’enfile quand on rencontre une inconnue, on « danse » toute la nuit, et puis on la balance… la capote j’veux dire, pas l’inconnue.
Fight club - 1999"
Janvier 1997
Les gueules de bois démarrent toujours chez moi de la même façon plus je bois moins je dors. Et vu ce que nous avons ingurgité hier, la nuit a été courte.
Je laisse Jackson dans le lit en vérifiant la proximité immédiate du seau en plastique, permettant de prévenir quelques vomis intempestifs, puis je me traîne jusqu’à la douche.
Ça permettra de faire partir quelques traces de la soirée d’hier.
L’eau possède des bienfaits plus que salvateur, j’effectue un brossage des dents et des cheveux intensifs puis passe une tenue décontractée.
Une fois mes tâches dans la salle d’eau effectuées, je me dirige vers la cuisine afin de faire couler un café, en attendant le breuvage que je qualifie ce matin de ‘nécessité’, je range la coupable de mon état, personnifiée en bouteille de tequila et ses acolytes, les verres qui traînent toujours sur ma table basse.
Je sirote ma boisson chaude avec à côté de moi la boîte d’aspirine et un grand verre d’eau.
Du bruit provenant de la chambre me fait relever la tête.
Jackson émerge de la pièce, drapé dans ma couette.
Je pourrais pu rire de son accoutrement, mais en avisant de son air maussade, je m’abstiens.
Il observe mon visage qui ne lui renvoie qu’une expression parfaitement neutre.
Jack se tient dans l’embrasure de la porte et reste mutique.
-Salut Jackson, tu veux un café ?
Il doit avoir une sacrée migraine, car dès que j’ai ouvert la bouche, son visage s’est tordu d’une grimace.
-Une aspirine fera l’affaire, réplique-t-il de sa voix rocailleuse.
Je pousse dans sa direction la boite de comprimés et le verre.
D’une main, il serre la couette et de l’autre il s’empare des cachets.
Après absorption de la substance ô combien miraculeuse, il reporte son attention sur moi.
-Tu sais où sont mes affaires ? demande-t-il penaud.
-Vérifie sous le lit, tenté-je, en refrénant mon rire .
Un cri peu glamour me parvient de ma chambre, je laisse le soin à Jackson de revenir vers moi.
Il a apparemment trouvé ses affaires, car il débarque en caleçon en tenant du bout de ses doigts le préservatif.
J’admire au passage sa musculature, qui je l’avoue, été un peu passée à la trappe hier.
Mes doigts ont pu aller à la rencontre de ce corps d’Apollon, mais mes yeux en revanche ont dû se contenter de la pénombre.
Il tient le bout de caoutchouc entre deux doigts et de l’autre main, il me désigne l’objet.
Sa bouche s’ouvre et se ferme mais aucun son ne sort.
-C’est un préservatif, lâché-je au bout d’un moment.
-Je vois ça.
Puis il s’arrête là.
Je patiente attendant la suite qui ne vient pas.
-Tu veux le jeter peut-être ? proposé-je espérant le faire parler à nouveau.
-Oui entre autres, mais que fait-il avec mes affaires ? demande-t-il d’une voix légèrement suraiguë trahissant son état de stress.
J’hésite entre le fou rire et la vexation. Soit, il ne se rappelle pas grand-chose. Ou peut-être est-ce aussi pratique pour lui de simuler une amnésie à la vue de la fin de notre soirée.
-C’est mieux de se protéger lorsqu’on fait l’amour.
Il ferme les paupières et garde le silence, de sa main libre, il se pince l’arête du nez.
Ça devient vexant !
-Donc, toi et moi..? commence-t-il incertain.
-Oui Jackson, le mot que tu cherches, c’est : fait l’amour, couché ensemble, baisé ?
Je n’aime pas employer ce verbe, mais, il commence à m’agacer à réagir ainsi.
-Bordel, jure-t-il entre ses dents.
Son juron me fait l’effet d’une claque.
-Si ça peut te rassurer, ça n’a pas duré bien longtemps, donc ça ne compte pas vraiment, contré-je en croisant les bras sur ma poitrine et en le toisant durement.
Son visage déjà blanc devient cadavérique.
-Tu peux développer ?
Je me lève, afin de m’emparer de la capote et la jette avant de reprendre la parole.
-Tu ne te souviens de rien ?
Jackson semble réfléchir, mais l’exercice doit lui occasionner des maux de tête, car il fronce les sourcils et affiche un visage douloureux.
Puis il secoue négativement ce dernier.
-Tu es rentré avec moi du bar, et comme tu semblais un peu tendu, nous avons continué à boire de la tequila, à la mention de la boisson, il m’offre une moue dégoûtée.
Tu m’as ensuite embrassé et j’ai proposé de poursuivre dans la chambre, une chose en entrainant une autre, tu sais, tu as fini à poil, moi aussi, on a mis un préservatif et … je m’arrête afin de jauger sa réaction.
Il boit mes paroles, se tenant toujours à moitié nu au milieu de mon salon.
-Et on a fait l’amour ? tente-t-il
-Et bien nous avons commencé…
-Ensuite ? Nous avons été interrompus ? demande-t-il, sincèrement perdu.
-Tu as vomi partout, lâché-je d’une voix dont j’espère qu’il ne perçoit pas les notes d’hilarité que je contiens.
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