Fyctia
Jackson 1/3
"Se préparer à être déçue est le meilleur moyen d’éviter toute déception.
Spiderman : No Way Home - 2021"
Janvier 1997
A quelques jours de rencontrer ma nouvelle équipe, le stress me gagne.
Ai-je sélectionné les bons dossiers ? Cette année, c’est mon année, mon ticket d’entrée pour l’ile de Manhattan. Je sais qu’un poste dans une caserne de la grosse pomme va se libérer.
Il y a pas mal de départ retraite ou changement d’état. La preuve en est pour notre caserne, nous avons recruté un grand nombre de nouvelles recrues pour faire face à ces défections.
Ma chance se trouve à quelques miles, je dois prouver que mes recrues agiront comme elles doivent et au-delà des attentes. Avoir les meilleurs taux de réussite lors des interventions.
Mon dossier étant déjà plus que fourni et bétonné, la promotion me tend les bras.
Je dois montrer que je suis un chef d’équipe irréprochable et le colonel Fuller et ses acolytes siégeant à la commission d’attribution devront tous se rende à l’évidence.
J’ai les épaules, la volonté et le courage de le faire.
Evan Trent, mon commandant, émet des réserves quant à mon choix de recrues. Pourtant j’ai foi.
Tous les autres chefs d’équipes se sont tous payés ma tête me disant que je me tirais une balle dans le pied, que je me suicidais professionnellement. Malgré lors railleries ma foi demeure.
Enfin jusqu’à quelques jours encore. Je râle malgré moi.
Pourquoi a-t-il fallu que j’aille voir mon père ?
J’aurai dû le savoir, je suis une source de déception constante. Moi qui croyais qu’il allait être fier de moi.
Il m’a seulement réaffirmé son aversion pour ma profession, que j’aurai dû suivre ses traces comme Jared et Joseph. Ah ! Ses fils ainés, ses réussites comme il aime à les appeler.
Mais la carrière militaire ne trouve pas et ne trouvera jamais grâce à mes yeux.
Moi aussi je sauve des vies, moi aussi je prouve ma valeur et mon courage, mais ce n’est jamais suffisant pour égaler leurs prouesses sur le front.
Tout en faisant tournoyer ma bière dans mon verre je pousse un énième râle. Ce qui me vaut un coup de coude de mon meilleur ami.
-Tu penses encore à ton vieux ? me demande Russell le nez à moitié dans son cocktail.
Je lui lance un regard qui signifie qu’évidemment la discussion avec mon paternel tourne toujours dans mon crâne.
Heureusement que depuis toutes ses années j’ai pu compter sur le soutien indéfectible de Russell.
Avec sa carrière de militaire, mon père nous amenait mes frères et moi aux quatre coins de l’Amérique. Je ne me liais jamais vraiment d’amitié avec mes camarades de classes car je savais que l’année suivante je ne les reverrais pas.
Mais lors de ma rencontre avec Russell au secondaire, ce dernier n’a pas écouté mes avertissements et s’est obstiné à devenir mon ami.
Pourtant il aurai eu toutes les raisons de m’ignorer, j’étais pratiquement le seul blanc de l’école. Nous logions dans un quartier où ne résidaient pratiquement que des familles afro-américaines.
Alors que les autres élèves de ma classe m’observaient curieusement avec mon teint clair, Russell lui ne s’en préoccupait pas.
C’est cette année-là, que Jeremy Novak a décrété que Joseph et Jared possédaient la maturité et l’âge pour s’occuper de moi, même si lui était absent.
Comme s’il m’avait élevé… Il ne s’est jamais occupé de moi à contrario de mes ainés. Sans doute que dans son esprit je resterais à jamais celui qui a tué sa femme. Comme il me l’a craché au visage un jour.
Ma mère Abigail est malheureusement décédée en me mettant au monde.
Et pour mon géniteur, c’est ma faute.
Les nourrices qu’il a engagé tout au long de mon enfance et mes frères incarnent les seules personnes à m’avoir élevé, lui ne s’est jamais donné cette peine.
La décision de mon père de rester dans le New Jersey reste pour moi la seule bonne décision qu’il ait prise.
Cela m’a permis de me faire des amis, de fréquenter la même école pendant tout un cycle. D’avoir des repères, de connaitre mon quartier de pratiquer un sport et de progresser.
Russell toujours à mes côtés.
Aujourd’hui encore, mon allié de toujours revêt plusieurs casquettes, celle du meilleur ami, du partenaire d’entrainement et surtout mon bras droit dans mon équipe.
Cette année il sera le seul pompier chevronné pour m’épauler.
Les trois autres membres de notre escouade, se trouvent être des novices.
D’ailleurs les railleries de mes collègues et l’inquiétude d’Evan viennent de là.
Je prends un risque en ayant opté pour cette configuration d’équipe je le sais.
Pourtant au fond de moi malgré le stress et les doutes je sens que ce doit être ainsi.
Si on ne donne pas leurs chances aux recrues comment peuvent-ils évoluer ?
Et nous ? En tant que chef d’unité ? S’entourer des meilleurs pour être les meilleurs ? Cela semble être le choix le plus logique.
Cependant à mes yeux on reconnait l’étoffe d’un vrai meneur d’hommes s’il parvient à réussir à faire grandir ses équipes et à les rendre meilleurs. Pas en exploitant leurs forces mais en travaillant avec leurs faiblesses.
L’entrevue avec mon père quelques jours plus tôt a tourné au vinaigre quand je lui ai exposé mon point de vue et que j’ai mentionné mes nouvelles recrues.
Pour lui je reste un éternel rêveur, un sentimentaliste et un perdant.
Jeremy Novak semble sûr de mon échec et il ne s’est pas caché pour me le faire savoir.
Malgré toutes ces années, je ne parviens pas à me défaire de mon envie de lui plaire.
J’espère toujours qu’il me témoignera de l’affection, je demande toujours son avis ou son soutien. Et comme à chaque fois je repars déçu et frustré.
Il parvient toujours à faire naitre en moi le doute, la petite voix dans ma tête qui chuchote que je vais échouer se matérialise toujours sous les intonations de mon père.
6 commentaires
Emeline Guezel
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Il y a un an