Jennifer Desrosiers Elarys Chapitre 1

Chapitre 1

Lorsque j’arrivai chez moi, après une journée interminable durant laquelle j’avais dû faire d’énormes efforts d’interaction sociale, la porte d’entrée grande ouverte me stoppa net. Mes parents – grands paranos persuadés que toute personne rôdant autour de la maison pouvait être un espion – n’oubliaient jamais de la fermer. Chaque fenêtre de la bâtisse disposait d’un rideau pour décourager les regards trop curieux. Ce qui, à mon sens, était ridicule : notre plus proche voisine, Madame Linderman, vivait à plus de cinq cents mètres et la propriété était entourée d’arbres aussi hauts que nos trois étages. Même armée de jumelles, elle n’arriverait pas à nous espionner.

Je m’approchai du porche et laissai tomber mon sac au pied de l’escalier avant de grimper les marches à pas de loup. Mes doigts commencèrent à me picoter, signe que ma magie se réveillait. Un courant d’air me précéda dans l’entrée tandis que l’Air se pliait à ma volonté.

Sur le qui-vive, je fis le tour du rez-de-chaussée. La cuisine était, comme toujours, rangée. Pas un verre ne trainait et les innombrables bocaux de ma mère étaient alignés sur les étagères. Quant à la salle à manger, pas un seul grain de poussière ne recouvrait les meubles en chêne, fabriqués par mon père, pour habiller cette immense pièce. Ici aussi, tout semblait à sa place.

Mon souffle se coupa quand je pénétrai dans le salon retourné. Un être humain lambda penserait qu’une mini-tornade avait ravagé la pièce. Ce qui ne serait pas si éloigné de la vérité. Mais les traces noires qui zébraient l’un des murs et les plantes vertes qui avaient doublé de taille racontaient une autre histoire. Air, Feu, Terre… Simple accident ou vestige d’une bataille entre sorciers ? Mes parents se disputaient, comme n’importe quel couple, et il leur arrivait d’utiliser leur magie pour se faire entendre, mais ils n’en venaient jamais à de tels débordements.

Je cessai de réfléchir et laissai tomber toute prudence. Mon emprise sur l’Air disparut. Je courus en direction des escaliers pour me rendre à l’étage.

— Papa ! Maman !

À chacun de mes appels, ma voix résonnait dans la maison inhabituellement silencieuse. Mon cœur battait à tout rompre et mon souffle s’accélérait au fur et à mesure de mes déambulations. Chambres, bureaux, salles de bain… Je ne trouvai personne et notai que seul le salon avait trinqué. Je retournai dans la chambre de mes parents et tombai à genoux. Je soulevai le couvre-lit en soie fleurie qu’affectionnait tant ma mère, et jetai un coup d’œil sous le sommier. Les sacs de survie étaient bien là.

Mon cerveau peinait à concevoir ce que cela signifiait. Mes parents avaient été attaqués, il n’y avait aucun doute à ce sujet. Ils étaient introuvables, mais leurs sacs n’avaient pas bougé. Et, surtout, moi, j’étais là. Ils ne seraient jamais partis de leur plein gré sans leur fille. Impossible. Soit ils avaient été enlevés, soit… Je refusais de songer à cette possibilité et attrapai le mien. Je savais ce qu’il contenait et n’avais pas besoin de vérifier s’il était à jour. Ma mère s’en occupait chaque premier week-end du mois. Je le passai et resserrai les bretelles pour qu’il épouse mon dos. Les yeux fixés sur ceux de mes parents, j’hésitai. Devais-je les prendre eux aussi ? Si leurs assaillants les avaient empêchés de monter, cela expliquait qu’ils soient encore sous le lit.

Du vacarme au rez-de-chaussée interrompit mes réflexions. Je rabaissai le couvre-lit et me levai sans un bruit pour me rapprocher de la porte. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine, à tel point que mes oreilles bourdonnaient. J’inspirai profondément par le nez avant d’expirer par la bouche. Une fois calmée, je tendis l’oreille. Deux voix distinctes discutaient depuis ce qui me semblait être la cuisine. J’utilisai mes capacités d’aéromancie pour que leurs paroles parviennent jusqu’à moi.

— Aussi garce que dans mes souvenirs, se plaignit une voix masculine. Salope d’Eliza !

J’ignorais qui était cette Eliza, mais je lui offris tout mon soutien. J’avais rarement perçu autant de haine et de dégoût dans un simple prénom.

— On a réglé le problème ici, on s’en va.

Le deuxième homme avait un timbre beaucoup plus ferme qui respirait l’autorité. Je mis un moment avant de m’arrêter sur ce qu’il venait de déclarer. De quel problème parlait-il ? De mes parents ? Des tonnes de questions se bousculaient dans ma tête et restaient sans réponse. Je fermai les yeux, découragée, et posai mon front contre le mur.

Les bruits de pas s’éloignèrent et une porte claqua. Ils étaient sortis par-derrière. J’attendis quelques minutes avant de me relever. Mes genoux craquèrent et le léger vent, que j’avais provoqué, faisait voleter mes cheveux devant mon visage. Quand je sortis enfin de la pièce, je tombai sur un homme vêtu de noir avec un brassard vert autour du bras gauche.

Il n’y en avait pas deux, mais trois qui avaient pénétré chez moi.

Impossible de dire lequel de nous deux fut le plus surpris. Son regard me balaya des pieds à la tête. Après m’avoir examinée et conclu qu’il ne risquait rien, ses épaules se relâchèrent. Grossière erreur, mon gars.

Je n’avais pas relâché mon contrôle sur l’Air. Aussi, d’un revers de la main, je m’en servis pour créer une bourrasque qui l’envoya valdinguer à l’autre bout du couloir. Ne s’attendant pas à un tel exploit de la part d’une adolescente armée d’un pauvre sac à dos, il n’eut pas le temps de me contrer. Sa tête s’écrasa contre le mur et je profitai de son étourdissement pour dévaler l’escalier comme si ma vie en dépendait. Qui sait, c’était peut-être le cas.

Dans la panique, je sortis par la porte de derrière. Après trois malheureux pas, je me retrouvai face aux deux autres hommes. Installés dans le salon de jardin, ils avaient pris leurs aises et fumaient en riant. Ils se figèrent dès qu’ils m’aperçurent.

— C’est quoi ce bordel ? s’indigna celui de droite, sans pour autant bouger de son fauteuil.

Je reconnus le premier homme que j’avais entendu plus tôt. Une fois de plus, Monsieur ronchonnait. Son camarade se leva et me sourit.

— Bonjour. Tu peux nous dire ce que tu fais ici ?

Il parlait d’une voix douce, comme s’il ne voulait pas m’effrayer. Je haussai un sourcil. Ces types avaient débarqué chez moi et il osait me demander ce que je faisais ici ? Il dut sentir ma colère, car son sourire hypocrite s’effaça aussi vite qu’il était apparu.

— De la part d’Eliza.

À l’aide de ma pyromancie, j’enflammai leurs cigarettes qui leur brulèrent les doigts. Mon père aimait répéter que je devais utiliser tout ce qui m’entourait à mon avantage. Il serait fier de moi sur ce coup-là. Avant qu’ils ne se reprennent, je levai les mains et, paumes tournées vers eux, je modulai les atomes de l’Air qui les entourait pour les asphyxier. C’était un coup de poker, je ne maîtrisais pas totalement cette technique. Ils s’effondrèrent malgré tout. Une chance qu’aucun d’eux ne soit un aéromancien.

Je ne vérifiai pas leurs pouls et m'élançai vers la forêt qui bordait notre propriété..

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22 commentaires

Lexa Reverse

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Il y a 3 ans

salut, c'est parti pour la lecture :), à bientôt. Axel.

Dystopia_Girl

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Il y a 3 ans

Coucou! Je viens te lire plus attentivement et, pourquoi pas, te donner mon avis sur ton récit! Il manque d'aération, ce qui peut rendre la lecture un peu difficile. Toutefois, tu as un style d'écriture fluide et agréable. Il y a très peu de coquilles, et on se laisse volontiers aller. Par contre, j'avoue trouver ce début un peu rapide. Le lecteur n'a pas de contexte qu'il est déjà plongé dans l'action et le sang. Du coup, il m'a été difficile de ressentir quoi que ce soit puisqu'on ne connait pas grand-chose du personnage. Sans écrire 50 pages avant, j'aurais peut-être aimé un peu plus de contexte:)

Jennifer Desrosiers

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Il y a 3 ans

Hey ! Merci beaucoup de ton passage. Je suis d'accord, ce chapitre est complètement indigeste. C'est ma première story sur Fyctia, je n'étais pas habituée aux difficultés liées aux 7000 caractères et à la mise en page. Je suis un peu plus douée maintenant 🤣. Je suis consciente que mon choix d'incipit peut en surprendre certains, j'espère que tu réussiras à rentrer dans l'histoire 😉. J'ai hâte d'avoir ton retour. Encore merci 😘.

Amphitrite

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Il y a 3 ans

Je découvre ton histoire. c'est super bien écrit et on rentre directement dedans.

NevaPlume

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Il y a 3 ans

Va-t-elle s'en sortir... Je vais vite le découvrir 👌

Sandy McCulloch

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Il y a 3 ans

Je suis intriguée, j’ai hâte d’en savoir un plus ! On se laisse vite happer par l’histoire vu que ça démarre tout de suite par de l’action, bonne entrée en matière. La taille du chapitre est aussi top même si je crois que j’en aurais voulu un peu plus, ce qui est bon signe !

Jennifer Desrosiers

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Il y a 3 ans

Merci ! Je suis arrivée au maximum de caractères autorisés sur ce chapitre. Je n'ai même pas pu l'aérer 😆

Geane Casey

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Il y a 3 ans

1er chapitre sur les chapeaux de roue...

Naischa

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Il y a 3 ans

Directement dedans <3 En tout cas, elle a du sang-froid !

Ama12

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Il y a 3 ans

On est directement dans l’action ! Hâte de savoir la suite ☺️ Continue comme ça et bon courage pour le concours
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