Fyctia
Chapitre 17.2
— Est-ce qu’Ella t’a appelé ?
Je demande suspicieuse. Ok, je suis peut-être parano, mais le message et la venue d’Alex juste le jour où je décide de me débarrasser des affaires de Logan n’est certainement pas une coïncidence.
— Non, dit-il avec aplomb. Mais si c’était le cas en quoi cela te dérangerait ?
— J’aimerais juste savoir ce que vous traficotez dans mon dos.
— Jalouse ?
Je lève tellement les yeux au ciel, devant cette idée ridicule, qu’ils risquent de rester bloqués. J me dirige vers mon dressing. Alex sur les talons.
— On finit de ranger, tu vas te changer, j’aimerais t’emmener quelque part.
Je le regarde, suspicieuse.
— Tu n’aimes pas ma tenue ?
— Si, mais pour aller se coucher.
L’avantage d’être deux, est que la mission est plus vite accomplie. Nous rangeons les sacs dans un coin, j’irai les apporter à l’association dans la semaine.
— N’oublie pas ça, me dit Alex en me tendant la lettre. Qu’est-ce que c’est ?
Je la lui arrache presque des mains et la serre contre mon cœur. J’ai déposé la lettre de Logan ici ce matin, pour me donner du courage, j’avais complètement oublié.
— Une lettre de Logan, j’avoue.
Son expression change à cette évocation. On dirait qu’il a vu un fantôme.
— Tout va bien ?
— Oui, oui, je ne savais pas qu’il t’avait laissé une lettre, se reprend-il.
— Je vais me changer, installe toi dans le salon en attendant, j’esquive.
Une fois prête, je le rejoins, il pianote sur son téléphone tranquillement installé sur mon canapé et relève la tête à mon entrée. Je me suis habillée comme lui, car je n’ai aucune idée de l’endroit où il veut m’emmener. Dans la voiture il me tend son téléphone pour que je puisse choisir la musique, comme avant. Je souris en découvrant qu’il a toujours la playlist de chansons françaises que je lui avais créée à l’époque. Je lance « Si seulement je pouvais lui manquer » de Calogero et mets le reste en aléatoire.
— Il faudra que je te rajoute des chansons plus récentes.
Je ne suis pas sûre qu’il écoute vraiment cette playlist mais je le ferais quand même.
— Avec plaisir, ça me fera découvrir de nouvelles choses.
— Tu écoutes vraiment cette playlist ?
— Tous les dimanches de course, avant de monter dans la voiture, avoue-t-il.
Est-ce que je suis surprise ? Totalement. Je ne pensais même pas qu’il avait encore ces chansons dans son téléphone. Je sais qu’Alex a toujours son casque sur les oreilles avant chaque course, pour se concentrer. Chaque pilote rentre dans sa bulle et se concentre à sa manière.
— Nous sommes arrivés !
Je regarde à travers le pare-brise, un hangar se trouve devant nous.
— Tu comptes me kidnapper ? Parce que je suis venue de mon plein gré et je ne suis pas sûre que mon père paie la rançon.
C’est à son tour de lever les yeux au ciel et ça me fait sourire.
— C’est mon cadeau d’anniversaire pour toi !
— Tu m’as acheté un hangar ? je mime l’excitation en claquant dans mes mains.
Il ne répond rien et descend de la voiture. Je le suis, me demandant toujours ce qu’on fait ici. Lorsque nous pénétrons dans le hangar, un comptoir avec un homme derrière nous fait face. Derrière lui, des casques de chantier, des combinaisons et des lunettes de protection.
— Es-tu déjà venu dans une « rage room » ? me questionne Alex.
— Je ne sais même pas ce que c’est, j’avoue.
L’homme derrière le comptoir m’explique en quoi ça consiste. Dans une pièce à côté se trouve de vieilles télévisions, des bouteilles en verres, assiettes… Je peux frapper avec une batte tout ce que je veux. Le but étant d’évacuer sa colère. C’est original. J’enfile la combinaison, les lunettes de protection et le casque, Alex en fait de même et insiste pour me prendre en photo. Je lève les deux pouces en l’air, sourire aux lèvres, prête au combat. J’attrape la batte avant d’entrée dans la pièce qui est déjà dans un sale état. Un tas de vaisselle est cassé dans un coin.
— Tu n’as pas de batte ?
J’interroge Alex, le voyant les bras ballants.
— On est là pour toi, pas pour moi.
— Aucune colère en toi ?
— Aucune. Vas-y fais toi plaisir.
Je commence à casser quelques assiettes gentiment, je ne sais pas pourquoi mais j’ai du mal à rentrer dans le thème. Alex m’encourage à y aller à fond. Alors je commence à penser à tout ce qu’il se passe dans ma vie depuis quelques mois, années… Je commence à taper sur une télé en pensant à Logan, à la vie qui ne l’a pas épargné, au fait qu’il ne soit plus là, que je me sente seule. A mon père, à son manque d’attention envers moi. Je frappe pendant trente minutes sans m’arrêter évacuant la colère et la tristesse qui sont trop présentes dans ma vie. Tout ça sous l’œil d’Alex qui ne me quitte pas une seule seconde. Epuisée, je m’accroupie, appuyée sur la batte, yeux fermés. Vidée, voilà comment je me sens. Plus aucune pensée, joyeuse ou triste, ne traverse mon esprit.
Lorsque je rouvre les yeux, j’aperçois Alex s’approcher. Il me prend la main, me relève et me plaque contre lui, m’entourant de ses bras. La tête posée contre son épaule, les bras ballants dans un premier temps, je finis par l’entourer et le serrer fort contre moi. Je m’accroche à lui comme si ma vie en dépendait. Je ne sais pas combien de temps nous restons comme ça. L’employé vient nous informer qu’il est l’heure de rendre la salle. J’inspire profondément, une odeur de savon et de sa propre odeur envahi mes narines. Il m’embrasse sur le sommet de la tête, avant de me lâcher. Il se recule d’un pas pour me laisser un peu d’espace. Nous n’avons toujours pas échangé un mot lorsque nous nous dirigeons vers la voiture.
— Est-ce que tu as quelque chose de prévu ? je demande en brisant le silence.
— Non pourquoi ?
— J’aimerais te présenter des amis si tu veux bien.
— En route.
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