Fyctia
11.1 - Lazlo
Quelle semaine idyllique ! Je suis aux anges avec cette confiance réinstaurée entre Lia et moi. Je ne parle même pas de ce week-end où tout a été parfait. Lorsque je l’ai ramenée vendredi soir, je suis restée chez elle jusqu’au lundi. Nous avons peu été habillés, mais nous avions besoin de ce moment à nous pour nous retrouver, réellement. Faire renaître chaque cellule de nos corps comme endormies loin du contact de l’autre.
Je me suis aussi occupé de ses pieds. Les pauvres étaient dans un état lamentable. J’avoue m’être mis en colère quand j’ai découvert les blessures qui les marquaient. Si Lia ne m’avait pas retenu, je serais retourné sur-le-champ chez moi pour confronter mon colocataire. Le pire, c’est que même avec ses extrémités amochées, elle a assuré le cours de danse avec les enfants. J’ai quand même eu une violente altercation avec Al lorsque je suis rentré chez nous le lundi soir. Il m’a expliqué être complètement stressé par la montagne de choses qu’il reste encore à faire. Vendredi malheureusement, l’état de John l’a mis hors de lui. Il n’a pas tort. Pour des professionnels, il ne devrait pas y avoir d’états d’âme dans les salles de répétitions, comme sur scène. Sinon, tout le spectacle reposerait sur des facteurs beaucoup trop aléatoires.
Il a donc décidé de faire travailler encore plus Lia, sans se rendre compte qu’il allait trop loin. Le mardi, ma douce m’a confié qu’il était venu s’excuser.
À partir de là, les choses au sein du groupe ont changé. Elles sont devenues plus simples, avec plus de cohésions. Nous ne nous évitons plus, Eliora et moi - même si nous restons toujours discrets sur notre relation, et cela tombe bien, car les répétitions de groupe vont commencer afin de mettre en place les premiers tableaux. Les chorégraphies sont toutes apprises, et il reste seulement des détails pour que tout soit parfait dans un mois.
— Tu souris encore, me sort de mes pensées Al. Sur ton visage, ça fait niais.
— Niais, non. Heureux tu veux plutôt dire, rétorqué-je, amusé.
— Si tu as envie de jouer avec les mots, je vais jusqu’à tenter l’« amoureux » et je ne pense pas me tromper.
Mon silence est éloquent. « Amoureux », c’est exactement ça. Mon expression se fait encore plus radieuse et Al lève les yeux au ciel avant de se diriger vers sa chambre.
— Départ dans trente minutes, m’avertit-il. Si tu es en retard encore une fois, je ne t’attends pas.
En retard, aujourd’hui, sûrement pas. J’ai bien l’intention de croiser ma belle avant que les répétitions ne commencent.
Une fois dans la salle où Al a regroupé tous les danseurs pour leur faire une annonce, je constate que Lia est en plein échauffement. Je connais cet exercice, je la rejoins et l’accompagne. Cela lui décroche même un sourire.
— Déjà prête ? lui demandé-je pour entamer la discussion.
Je meurs d’envie de la prendre dans mes bras, mais comme à chaque fois je me retiens. Je rêve de pouvoir enfin nous montrer au grand jour, mais mon petit doigt me dit que ce n’est pas pour tout de suite.
— Toujours, tu sais bien que l’échauffement… commence-t-elle.
— …c’est le plus important, terminons-nous en chœur, avant de rire aux paroles que prononçait Mme Danzi, notre prof de danse lorsque nous étions plus jeunes.
— Mais elle avait raison au final, cette vieille bique ! S’il n’est pas fait correctement, une blessure est très vite arrivée, reprit-elle.
— C’est ton cas ? l’interrogé-je, curieux d’en apprendre toujours plus sur elle.
— Une fois. J’ai eu de la chance et je m’en suis sortie avec une simple entorse.
J’allais répliquer lorsque Al prit la parole à l’attention de tous les danseurs.
— Mesdames, messieurs, aujourd’hui est un grand jour, débute-t-il. Nous allons faire notre première répétition globale, musique par musique afin de voir ce que nous devons encore améliorer dans les semaines qu’il nous reste. On va commencer par un échauffement tonique collectif, mettez-vous en place.
Et pendant près d’une heure, nous avons tous transpiré. Pas le temps de souffler, c’est parti pour une journée longue et compliquée.
Les tableaux s’enchaînent et nous sommes concentrés sur les danseurs qui donnent leur maximum. Cela se ressent sur scène, les sourires d’Al sont éloquants lorsqu’un passage délicat est maîtrisé cela me confirme la grande partie du chemin parcourue vers le rendu final que l’on rêve d’obtenir.
Lia, comme à son habitude, me captive. Elle est née pour danser et toute sa grâce transparaît dans ses mouvements. Je suis quand même jaloux de John, la proximité de leurs corps réveille en moi ce sentiment que je croyais enfoui. Mais il faut bien avouer que le couple star du spectacle nous éblouit lorsqu’il danse. La troupe donne aussi le meilleur d’elle-même, ce qui rend cette journée merveilleuse pour tout le monde. Al et moi sommes fiers du chemin que nous avons parcouru jusque-là. Il reste du boulot, nous en sommes conscients, mais chacun sait ce qu’il a à faire pour se perfectionner.
Je rejoins ma loge, le seul vrai avantage d’être chorégraphe, mais ne m’aperçois pas immédiatement que je suis suivi. Au moment où je passe la porte, je sens un corps se presser contre mon dos et des doigts parcourir mon torse. Après m’être laissé aller quelques secondes à ces caresses, mon cerveau se connecte enfin. Lia n’est pas aussi petite, et de plus, elle n’aurait jamais voulu qu’on nous soupçonne, ou pire, qu’on nous surprenne. J’attrape une de ses mains et amène l’intruse devant moi. Gaëlle ! Cela ne me surprend même pas. Avec les avances non dissimulées qu’elle me fait depuis quelque temps, je me demandais quand elle passerait à l’action. Cette femme déteste être évincée, elle nous l’a déjà démontré à plusieurs occasions, et aujourd’hui en est encore un excellent exemple. Après plusieurs de ses tentatives pour sortir avec moi le soir, elle ne se démonte pas et me fait face. Elle place ses paumes à plat sur ma poitrine et me repousse d’un geste vif vers un des sièges postés devant le miroir.
Mais qu’est-ce qu’elle fait ? Je ne comprends pas, je n’ai jamais eu de gestes ambigus à son égard, mes refus ont pourtant été clairs, pas assez visiblement.
— Gaëlle, arrête-toi, tenté-je de la stopper alors qu’elle grimpe sur mes genoux.
— Chuuuuut, m’intime-t-elle posant son index sur mes lèvres, tais-toi et profite !
Sauf que je ne veux pas profiter du tout, je n’en ai pas la moindre envie. Je la repousse pour la faire descendre avant qu’elle ait eu le temps de passer ses doigts sous mon caleçon. Il y a quelques mois, je n’aurais pas dit non, je me serais peut-être laissé faire si ma douce Eliora n’était pas revenue dans les parages. Mais aujourd’hui, ma relation renaissante avec Lia est trop importante pour que quoi que ce soit ne vienne la gâcher. Gaëlle n’a pas dit son dernier mot, elle s’agenouille devant moi ; de mon côté je la tiens à distance, mes mains sur ses épaules lorsque quelqu’un toque à la porte avant d’entrer.
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Roselyne Simone Paquier
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Il y a 3 ans
Sam Laurent
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Canelle
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Sand Canavaggia
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Charlie L
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Il y a 5 ans