Fyctia
3 - Lazlo
Ce matin, je suis comme un fou. Première répétition, je vais enfin la voir. Ses deux dernières semaines de casting ont été éprouvantes. J’avoue que j’ai été moins indulgent avec les derniers. Mais au moins, je suis convaincu des personnes qui nous entourent. Leurs prestations étaient parfaites et on sentait leur envie.
Hier soir, on s’est partagé les groupes avec Al, et conformément à ce que je redoutais, je ne m’occuperai pas de Lia. Je n’ai pas insisté, car je sais que c’était sa condition pour nous rejoindre. Je ne l’ai pas encore aperçue dans la ville, qui n’est pourtant pas si grande, quand on connaît les bonnes adresses. Mais le destin est définitivement contre moi dans cette quête.
— Bonjour à tous. Bienvenue parmi nous dans cette merveilleuse aventure faite de musique, de danse et de fête, commence Al en s’adressant à l’assemblée. Enfin pour le dernier point, on verra si vous travaillez suffisamment pour y avoir droit.
Tout le monde rit, mais cela reste timide. Il va falloir créer rapidement une cohésion de groupe. Trouver une idée pour que la confiance s’installe, sinon les journées vont être compliquées. Mais ça, c’est mon rayon, les événements insolites pour que chacun trouve sa place, j’adore les organiser. Avant de mettre sur pieds quoi que ce soit, j’ai besoin d’une petite semaine d’observation, pour trouver la meilleure activité.
— Vous trouverez sur le panneau derrière vous, les différents groupes dans lesquels vous êtes repartis, poursuivis-je.
Et là, comme un seul homme, tout le monde se retourne vers les panneaux à l’arrière de la salle. Ce n’est pas les résultats du Bac, mais pour eux, c’est tout comme. Ou plutôt comme la liste des classes affichées avant la rentrée, oui, c’est plutôt ça. Je ris et vois Al qui fait pareil.
— Merci de vous mettre par groupe, nous allons vous expliquer le déroulement des prochains temps.
— Durant les semaines à venir, nous allons apprendre les chorégraphies. Il y en a environ six par groupe. Quand elles seront maîtrisées, nous ferons un premier montage global pour prévoir les répétitions suivantes. Sur chaque feuille, les noms des chorégraphes qui vous formeront sont inscrits ainsi que les salles dans lesquels vous allez vous entraîner.
— Pour que chacun des groupes puisse commencer en même temps, les chorégraphies en vidéo ont été déposées dans chaque salle, nous vous laissons la fin de la journée pour prendre vos marques. En piste.
Je tape dans mes mains et les danseurs prennent leurs affaires et la direction de leur salle. C’est la première fois que je ressens ce sentiment de fierté qu’on éprouve en concrétisant un rêve, et ce n’est que le début.
Je me dirige à mon tour vers la salle du premier des groupes dont j’ai la charge.
Tous sont en tenue, en train de s’échauffer. Bizarre, je pensais les trouver devant la vidéo.
— Vous ne regardez pas la chorégraphie ? les questionné-je, curieux.
— Nous avons préféré nous mettre en condition pour débuter, m’éclaire une grande rousse.
— Parfait, alors commençons.
La journée se passe de façon idyllique professionnellement parlant. Je fais la connaissance des différents membres dont je m’occupe et tous les participants sont surmotivés. Cela me met un coup de fouet incroyable et j’en oublierais presque le corps parfait qui ondule dans une des pièces voisines.
Al n’a pas manqué de me faire une scène ce matin. On aurait dit un vrai couple.
— Je te préviens, tu la laisses tranquille. Interdiction de l’approcher, sous aucun prétexte. Ce droit ne t’est acquis que si elle t’adresse la parole en premier ou s’il y a une discussion de groupe. C’est écrit dans son putain de contrat mec, pas moyen qu’on la perde à cause de toi et de ta queue.
Lorsque nous sommes rentrés des auditions, le mois précédent, Al m’a donné les conditions de Lia pour intégrer la troupe. Il m’a aussi demandé un topo complet sur notre aventure.
Je ne sais pas si je saurai faire abstraction de sa présence bien longtemps, mais je l’ai promis à Al.
De retour à l’appart, je rêve d’une douche, d’un hot dog et d’une bonne série sanglante. Al n’est toujours pas rentré lorsque je m’installe devant la télé. Un sentiment étrange me picote alors que j’imagine très bien la personne qui le retient au boulot. Et ce n’est que la première journée. Merde !
Si la jalousie s’installe dès maintenant, je suis foutu.
Quand on parle du loup, il passe la porte. Il s’écroule sur le canapé à côté de moi.
— Pfiou, quelle journée ! soupire-t-il, visiblement exténué.
— Je ne te le fais pas dire, compatis-je, aussi fatigué que lui. Heureusement que dès demain, nous allons faire un peu moins les pigeons voyageurs.
— Et tu en as déjà qui se détachent du lot ?
— Tu en as de ses questions après seulement un jour.
— Pour ma part, le couple de tête semble très bien s’entendre, j’espère que ça va durer.
Moi non, mais je le garde pour moi. Ne pas la voir ni lui parler, c’est déjà un supplice, alors si en plus il faut qu’elle soit en couple avec un autre au sein de la troupe, je ne sais pas quelle sera ma réaction.
— Je te vois venir, interrompt mes pensées Al. J’ai dit qu’ils s’entendaient bien, pas qu’ils sortaient prendre un verre ce soir pour faire plus ample connaissance et plus si affinités.
Al se fout de moi, me voyant virer au rouge écrevisse. Il le fait exprès ce con, et il aime ça ! Finalement, c’est moi qui vais sortir prendre un verre, et pourquoi pas draguer une nana pour la ramener dans mon lit. Mais nous sommes lundi et il est donc peu probable que l’option deux se réalise.
Nous avons la chance d’habiter au centre-ville et les bars ne sont pas ce qui manque ici. J’ai envie d’une bonne bière et je ne connais pas de meilleur endroit que le VICK’s pour ça. Le barman, Greg, est associé à plusieurs brasseurs des alentours et il a toujours des merveilles à faire découvrir.
Je m’installe au comptoir sur le tabouret. Al n’a pas voulu me suivre ce soir, pourtant, j’aurais bien aimé trinquer au début du projet.
— Hey, salut mec, m’accueille Greg. Ça fait un bail qu’on ne t’a pas vu dans le coin.
— Je suis de retour en ville depuis quelques semaines, mais il est vrai que je n’ai pas pris le temps de venir te saluer, m’excusé-je.
— Ne t’en fais pas, j’espère que tu restes un peu dans les environs ?
— Je suis sur un gros projet, je vais donc être ici pour un bout de temps.
— Dis-moi, qu’est-ce que je te sers ?
— Du nouveau à me faire goûter ?
— J’ai une petite nouvelle qui arrive des montagnes. Les gars qui la fabriquent sont des fous. Brasseurs à l’ancienne, leur bière a une vraie note d’herbes dans le genre du génépi. Personnellement j’adore.
— Alors c’est parti pour celle-là.
— Et une Belle de mai, une. Tu m’en diras des nouvelles.
J’en bois une gorgée, c’est vrai qu’elle est vraiment bonne sa trouvaille. Pour la peine, j’en prends une deuxième, mais le bar étant quasiment vide ce soir, je n’ai pas beaucoup de distraction et je m’ennuie assez rapidement. Tant pis, la prochaine fois sera la bonne.
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Roselyne Simone Paquier
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LaetitiaRobillard
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