Fyctia
Chapitre 13.3
— En parlant de fuir… marmonne Stacy qui se met à faire une moue étrange.
— Salut les Sigma !
Quelques membres des Omega s’approchent de nous. Ethan se penche vers Meg pour lui faire la bise et Connor m’adresse un clin d’œil. Stacy lui lance un regard noir.
— T’avais pas cours, genre là, maintenant, tout de suite ? lui lance-t-elle d’un ton extrêmement sec.
Comment pourrait-elle connaître son planning ? Elle n’a aucun cours en commun avec lui. Ils se dévisagent tous deux en silence. Le malaise que j’essaie tant d’éviter depuis une semaine s’installe autour de la table. Tout le monde peut sentir une forme d’ironie dans la voix des deux protagonistes.
— Hey, ma grande ! Premièrement tu n’es pas ma mère, donc pas besoin de me surveiller en permanence. Et deuxièmement, non. Le cours a été annulé, finit par dire Connor.
Stacy se lève et se plante devant lui. La différence de taille entre les deux est tellement énorme que l’attitude de Stacy en serait presque risible, si elle n’avait pas ce petit côté autoritaire dont elle sait très bien user.
— Donc, comme par hasard, tu décides de te pointer vers nous comme ça ? Parce qu’on te manque ?
Elle se tourne et tend vivement sa main dans ma direction.
— … ou t’es là seulement parce que le truc rond qui te sert de cerveau a un Abby-radar implanté ?
Les garçons se moquent joyeusement de l’air renfrogné de Connor. Troublée, je dois fournir un effort colossal pour ne pas intervenir et préfère me mordre la lèvre. Je ne sais vraiment pas ce qu’il se passe entre eux, mais plus les jours passent et moins j’ai envie de le savoir.
Alors que la situation devient vraiment inconfortable, il se produit un phénomène auquel jamais je n’aurais pu me préparer. Un peu plus loin, une silhouette masculine, tournée dans notre direction, parait attentive à l’altercation qui est en train de se produire. Bras croisés, l’homme attend, adossé au tronc robuste d’un arbre. Je me liquéfie…
— Abby, tu vas bien ?
Meg pose une main sur mon bras, manifestement inquiète de me voir pâlir. Je me frotte énergiquement les yeux afin de chasser cette illusion. En vain. Je pourrais reconnaître Matt entre mille.
— Oui, oui. Ça va ne t’inquiète pas…
J’essaie de la convaincre du mieux que je le peux, tandis que Matt m’appelle du regard. Impulsivement, j’essaie de me lever pour aller à sa rencontre, mais Meg me retient vigoureusement par le bras.
Connor et Stacy continuent de se disputer. Je me sens de plus en plus mal. Je songe même à me trouver une excuse afin de quitter cet attroupement quand tout à coup, quelque chose que je n’avais pas vu venir se produit. Après un long moment passé à se dévisager sévèrement, Stacy pousse de grands éclats de rire stridents.
Comprendre l’émotion qui me traverse quand elle finit par se jeter dans les bras de Connor, qui aussitôt lui ébouriffe affectueusement les cheveux, est assez complexe. Une pression tenace sur mon plexus m’oblige à retenir ma respiration. Je resserre les mâchoires pour éviter de dire quelque chose que je pourrais regretter. Ma gorge se serre. Je préfère détourner le regard.
Ethan, comme à son habitude, reste en retrait près de Meg. Plus je les vois et plus je me dis qu’ils pourraient former un bien joli couple dans un proche avenir. Un brin de folie, beaucoup de timidité et énormément de gentillesse les rassemblent.
— Bon, allez les garçons, c’est l’heure de la trêve, ajoute Chelsea en balançant les sacs par terre. Asseyez-vous avec nous, propose-t-elle.
Son intervention permet de détendre un peu l’atmosphère. Je sens que quelque chose entre Stacy et Connor vient de m’échapper, mais je préfère laisser tomber pour le moment et je m’intègre aux discussions plus légères du groupe. Les garçons en viennent même à plaisanter sur la tenue de certains étudiants excentriques qui passent devant nous.
Du coin de l’œil, je perçois le regard insistant de Connor qui tente régulièrement d’établir un contact avec moi, mais je m’astreins tant bien que mal à l’éviter, malgré les coups de pieds que Meg me balance aussi discrètement que possible sous la table.
Stacy ne dit plus grand-chose, mais je peux sentir également son regard pesant sur moi, accompagné d’un sourire malicieux. Je me demande si elle éprouve du plaisir à me voir aussi embarrassée, ou bien si c’est simplement la présence de Connor qui la met dans cet état.
Quoi qu’il en soit, je me sens toujours très mal à l’aise vis-à-vis de l’un, comme de l’autre. Je tente donc de les ignorer un peu plus. Mais quand je regarde ailleurs, mon esprit continue à me jouer des tours car Matt, toujours immobile, apparait à nouveau dans mon champ de vision.
Quand l’heure de la reprise sonne, le petit groupe se sépare enfin. Libérée de l’étreinte de Meg, j’en profite pour m’éclipser le plus discrètement possible afin d’essayer de rejoindre Matt, mais il s’évapore sous mes yeux, comme s’il n’avait jamais été là. C’est impossible… J’ai le sentiment que mon esprit me joue des tours. Je le cherche discrètement du regard en faisant mine d’attacher mon lacet, mais nulle trace de lui aux alentours. « Ce n’est pas un fait observable. Il n’est pas réel… » me murmure une petite voix tout au fond de moi.
Je contourne alors la cafétéria, puis longe le long bâtiment des sciences. Je veille à m’être totalement isolée de certaines oreilles indiscrètes avant de rassembler toutes mes pensées. Le bilan de cette première semaine parait finalement peu épanouissant et très déstabilisant, surtout après la scène à laquelle on a pu tous assister. Je ressens vivement le besoin d’être écoutée, rassurée et conseillée.
J’inspire profondément avant d’appuyer sur l’un des rares numéros favoris de mon répertoire.
— Abby ?
3 commentaires
Val Alda
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Il y a 2 ans
Caroline gayant
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Il y a 2 ans
iris monroe
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Il y a 2 ans