Fyctia
Chapitre 2 : Le vide (2/2)
Il se réveilla par intermittence. Tantôt il voyait l’immensité du ciel bleu, tantôt un sobre et froid plafond blanc. Les sons étaient toujours étouffés mais sa conscience floue lui permettait tout de même de comprendre quelques bribes d’informations. Il essaya de fixer son attention sur l’homme à côté de lui mais ses yeux capricieux ne semblaient vouloir coopérer.
— Ça va aller, monsieur, lui dit l’homme avec sympathie. Vous avez beaucoup de chance, on s’occupe de vous, d’accord ?
Il hocha la tête comme il le put mais se douta qu’il n’était pas vraiment convainquant. Chaque respiration était un calvaire, un véritable supplice tant il pouvait sentir toutes les parties de son corps douloureux hurler. Il savait qu’il était dans ce qu’il devinait être une ambulance, et sa vision floue, combinée aux sensations d’un ballottement constant, lui donnait la nausée.
Il ne sentait toujours pas le bas de son corps et lorsqu’il voulut se redresser, l’homme à ses côtés posa une main sur son épaule.
— Ne bougez pas, ordonna-t-il de sa voix toujours posée et grave.
Il abandonna rapidement l’idée de regarder ce qui était hors de sa portée, trop faible pour lutter contre la main ferme de l’infirmier. Le monde tourna sous l’effort qu’il venait de réaliser et il sombra à nouveau.
Il ouvrit à nouveau les yeux pour se trouver dans un couloir, sa respiration plus facile et nota la présence d’un masque à oxygène sur son visage. Il leva péniblement la main pour palper son corps mais la laissa tomber à ses côtés, sans force et sans volonté ; son esprit dans le vague était si proche du bord qu’il se sentait malade.
Les gens passaient à côté de lui et il les ignorait, s’abîmant de nouveau dans la pénombre de sa conscience.
Il entendit non loin de lui un son régulier et vit les moniteurs affichant des graphiques et quantité de nombres qui n'avaient, pour l’heure, aucunes significations pour lui. La lumière tamisée était presque agréable, et il aurait pu se laisser porter par l’ambiance tranquille et le lit confortable s’il ne se savait pas dans un hôpital.
Il n’était pas gelé mais presque malgré la couverture qui remontait jusqu’à son menton. Il tourna la tête et découvrit une dizaine d’autres lits où des patients étaient reliés à des consoles et perfusions. Il reporta son attention sur son propre corps. Sa tête lui tournait, mais il parvenait lentement à comprendre son état actuel.
Une petite femme vêtue d’une tunique verte pâle s’approcha de lui et prit le dossier accroché à son lit.
— Bonjour, comment vous sentez-vous ? demanda-t-elle en chuchotant presque.
— Fatigué, répondit-il d’une voix basse et presque brisée.
— C’est normal, ça ira mieux avec beaucoup de repos. Vous avez eu beaucoup de chance, Marc.
Il ferma les yeux et toussa un peu. La douleur provoquée par le mouvement brusque le fit gémir et il haleta légèrement.
— Vous ressentez des douleurs ?
Il hocha lentement la tête en soupirant, le besoin de tousser enfin apaisé.
— D’accord, je vais augmenter un peu la dose de morphine alors.
La femme reposa le dossier sur le bout du lit une fois les constantes notées dans les cases du suivis avant de s’éloigner vers une petite salle où elle fouilla dans un tiroir. Elle revint avec une injection qu’elle fit passer par la perfusion et remit la seringue vide dans son emballage.
— Voilà, ça devrait aller mieux d’ici cinq à dix minutes. Vos constantes sont stables, vous allez bientôt pouvoir aller dans votre chambre, lui expliqua-t-elle en souriant avec empathie.
Il hocha la tête et la reposa dans l’oreiller doux et moelleux. Ses pensées brumeuses lui rappelaient sa dernière anesthésie générale. De quand datait-elle ? C’était loin, très loin, probablement lorsqu’il avait quinze ans. Ou seize. Bref, dans les vingt-cinq années en arrière.
Il chercha un autre sujet d’observation pour passer le temps ; il avait assez dormi. Ses poumons lui brûlaient encore mais c’était supportable tant qu’il ne prenait pas de grandes inspirations. Il sortit sa main de sous la couverture et la leva péniblement, fixant le pansement sous lequel était plantée l’aiguille de la perfusion, observant son état : des petites entailles et déchirures rougies, les veines gonflées, un léger tremblement dû à la fatigue qui couvait…
Il la reposa sur son ventre, ou plutôt, il la laissa tomber, et sentit une douleur sourde et ténue se propager à son torse, et soupira de soulagement en constatant l’efficacité de la morphine.
Lentement il baissa sa main pour toucher sa jambe et ne trouva que le vide. Pensant avoir mal tâtonné, il redressa la tête avec difficulté et blêmit en découvrant la raison de son absence de sensation.
Car là où aurait dû se trouver sa jambe droite, il n’y avait plus que le vide.
15 commentaires
labibliothequedeflavie
-
Il y a 3 mois
Ella R Hart
-
Il y a 3 mois
Mad May
-
Il y a 4 mois
Nyh
-
Il y a 4 mois
clairedust
-
Il y a 4 mois
Zatiak
-
Il y a 5 mois
Samantha Beltrami
-
Il y a 5 mois
Emmy Jolly
-
Il y a 5 mois
Nyh
-
Il y a 5 mois