Nina Sanchez De l'Autre Côté Du Miroir Chapitre 2.

Chapitre 2.

Je fus réveillée par les légers ronflements d'Izumi, qui semblait piégée entre les bras de Morphée sans s'en plaindre. J'étais d'ailleurs persuadée qu'elle voyageait entre univers et magie, le tout en compagnie de ses amis imaginaires qui ressemblaient goutte par goutte aux Beatles. J'adulais ma meilleure amie pour cela. Elle arrivait à passer des nuits douces et tranquilles, que j'appréciais comparer à un ruisseau cristallin s'immisçant dans un subconscient serein et optimiste.


Izumi et moi, nous étions bien différentes ; tandis qu'elle se nourrissait de ses plus profonds espoirs et se fiait à une simple petite lueur dans la pénombre qui ne cessait de nous submerger plus le temps passait, je me repliais sur moi-même et m'assurait que mon avenir n'avait plus aucune importance face à mon impuissance monstrueuse.


Je rêvais d'être libre. Je le rêvais plus que tout.

Je rêvais de connaitre le grand amour, de sentir la sensation satinée et douce de mes lèvres fines contre celles d'un autre.

Je rêvais de montrer fièrement mes ouvrages au monde entier, en fredonnant de douces mélodies apprises par maman avant l'envol de cette dernière vers les étoiles.

Connaîtrais-je un jour la liberté, si attrayante qu'elle était ?


Un liquide salé et frais comme la brise d'hiver s'échappa de mon œil droit et se fraya un chemin jusqu'à mon oreiller blanc crème. Les paupières tremblantes, je m'assis sur mon matelas qui grinça comme une fourchette raclant un morceau de verre, puis m'empressai d'enfiler mes ballerines d'un gris fade et chagrineur. Je ressentais à présent ce puissant besoin de respirer en toute sécurité. Alors, je traversai mon dortoir sur la pointe des pieds en priant intérieurement pour qu'Izumi ne soit pas tirée de son sommeil par ma faute.


Mes doigts maigrelets se refermèrent sur la poignée de la porte et celle-ci pivota sur ses gonds bruyamment. Je retins mon souffle pendant quelques secondes, me préparant à une remarque de la part de ma meilleure amie.


Pourtant, rien.


Rassurée, je me faufilai à l'extérieur de la pièce et parcourus le couloir principal suintant d'oppression et de cruauté. Mes dents mordillaient nerveusement mes joues et je retins un soupir face à l'absence de mouvement dans l'escalier, que je descendis avec rapidité et prudence. Les tableaux mis en valeur ici et là attiraient mon regard tel un aimant, éclairés faiblement par la lampe au style gothique suspendue au plafond. Ces œuvres me fascinaient. J'avais beau user de mon talent pour atteindre le palier supérieur, jamais je n'arriverai à la cheville de ces artistes.


La lumière albâtre et sensuelle de la lune à travers la grande fenêtre du hall principal caressa froidement mes joues et s'imprima sur mes iris lentement et d'une manière fébrile. Aussitôt, je me précipitai vers mon unique source de liberté et retirai une épingle de mes boucles blond cendré pour l'insérer dans la serrure. Un "clic !" sourd vibra dans mes tympans et la fenêtre s'ouvrit, comme si la toile d'araignée dans laquelle j'étais empêtrée s'autorisait à me fournir une sortie au-delà des ténèbres.


Chaque nuit, cette sorte de rituel se reproduisait sans que personne n'en sache quoique-ce-soit. Même Izumi n'était pas au courant de mes petites escapades nocturnes. Elles me permettaient d'oublier ma vie d'orpheline durant plusieurs minutes, des minutes qui se déroulaient le plus souvent comme des heures gourmandes et précieuses, que je ne pouvais me permettre de gâcher.


Je glissai une jambe en dehors de ma prison puis la deuxième, et m'adossai au bord de la fenêtre en lâchant un petit gémissement de fatigue. Je m'écroulai volontairement dans l'herbe de la cour telle une poupée de chiffon, et m'étalai de tout mon long sur ces draps de réconfort et de paix. Je ravalai un rire en apercevant une belle luciole voleter à quelques centimètres de mon nez.


Je remerciais régulièrement la nature pour m'offrir ces instants exceptionnels. Mon unique échappatoire, autre que le dessin, se présentait de cette manière ; un épanouissement parmi les petits êtres des forêts et les hululements des hiboux.


Puis, soudainement, un son horriblement faux me priva de ma tranquillité et la jeta dans une rivière de lave. Mes sens en alerte, je me remis sur mes deux pieds et plaquait mes yeux clairs contre les nombreux recoins de la cour.


Un cri. Je venais de percevoir un épouvantable cri. Il semblait provenir d'une âme brisée et inondée de blessures imprimées à jamais à travers ce hurlement, comme de l'encre noire sur du papier blanc.


Je me mis à courir, pendant que des pensées infâmes se promenaient dans mon esprit. Je mourrai d'envie de les enfermer dans un coffre avant de balancer la clef à des kilomètres de là, sauf que je n'avais pas le temps d'y réfléchir ; je devais fuir. A tout prix.


Alors, mes jambes se prirent dans quelque chose d'à la fois solide, mou et humide, et je trébuchai en plaquant une main sur ma bouche pour me retenir d'appeler à l'aide. Je ne devais pas m'agenouiller face à mes faiblesses. Dans les romans que je lisais, le personnage qui allait à l'encontre de cette règle n'avait généralement aucune fin heureuse.


M'armant du peu de courage qu'il me restait, je me redressai en veillant à contrôler ma respiration fébrile.


Cette fois-ci, je ne pus contrôler ma réaction, et lâchai un glapissement suraigu, me croyant plongée dans un mauvais rêve.


Un corps inerte se trouvait face à mes yeux, duquel s'évadait un liquide écarlate comme les pétales d'une rose en train de faner. Les yeux de la victime fixaient un point mort dans l'atmosphère, dénués de vie. Je n'y voyais que l'ombre de la peur, qui se terrait dans un coin inconnu pour surgir brutalement et s'emparer de nos membres sans demander notre permission.


Un détail inquiétant me fit froncer les sourcils, alors que je sanglotais fortement en hurlant sans cesse. Sur son cou scintillait un point violet étreint par des reflets sombres. Ma curiosité rétrogradée me força à m'approcher du corps mutilé et je posai un doigt tremblant sur la couleur étrange et surnaturelle dessinée sur sa peau.


Mes larmes s'épaissirent comme jamais et je criai de plus belle en me pliant en deux tellement la douleur dans mon ventre évoluait à une vitesse fulgurante, comme à chaque fois que je me retrouvais piégée dans les décombres de mes crises d'angoisses.


Puis tout devint noir...



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19 commentaires

Elvira_Lyre

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Il y a 7 mois

oulala, qu'est-ce qu'il vient de se passer !?

Oswine

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Il y a 9 mois

Ici, tu as changé ta façon de faire avec les paragraphe ! Ils sont espacés et ça rend la lecture bien plus légère, fluide et agréable ! Je ne pense pas avoir vu depuis combien de temps les deux filles étaient dans cet orphelina ! Est ce que tu le dis plus tard ? J'ai hate de le savoir parce que ça peut aussi énormément jouer sur le caractère de la jeune femme qui semble ne plus avoir d'espoir de quitter cet endroit alors que Izumi, elle, semble encore en avoir ! (Peut être est elle la depuis moins longtemps ? Une question de personnalité ?) Beaucoup de description intéressante dans ce chapitre et une belle fin qui donne envie de savoir la suite.

Nina Sanchez

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Il y a 9 mois

Merciii 💞

Paige

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Il y a 10 mois

Un chapitre très en description et dans les expectatives. J'ai été un peu surprise par le début, avec l'évocation des "Beatles", je ne m'attendais pas à les trouver là (je ne pensais pas qu'on était dans " notre monde " ). Ça m'a un peu sortie du texte pendant quelques secondes, pour m'interroger si j'avais bien compris ton univers ^^. Après pour liberté / amour, ça, c'est plus personnel, c'est bizarre que ton personnage assimile l'amour à la liberté : c'est une force, aucun doute, mais être lié au plus profond de son âme avec quelqu'un est-ce vraiment la liberté ? :p Et j'aurais aimé, au lieu de " Je venais de percevoir un épouvantable cri. ", ça semble pas assez bref et soudain : peut-être une onomatopée juste avant pour le cri. Ça permettrait de faire une vraie rupture, de s'interroger, de se dire : " qu'est-ce qui se passe ". Sinon, j'apprécie toujours ces interrogations et sa petite escapade au clair de lune ^^

Naelly2023

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Il y a 10 mois

Oh nan, qu'est ce qui s'est passé ??? veille à pas mettre trop de comparaison tout de même

Sarah Pegurie

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Il y a 10 mois

J’aime beaucoup ta plume 🍓

Nina Sanchez

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Il y a un an

Je viens à peine de remarquer deux fautes de frappes éparpillées dans le texte, veuillez m'excuser pour ce petit instant d'inattention 😅
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