Fyctia
2.1 - Isaac
Isaac
Février 2025 - France
Les fêtes de Noël à la con, ce n’est vraiment pas mon truc. Du moins, ça ne l’est plus. Je n’ai même plus de famille avec qui les partager. Je me suis retrouvé seul comme un con, à attendre la neige qui n’est jamais venue.
Rien ne se passe jamais comme on le désire. Les plans changent, la vie change. Le destin ? Je l’emmerde, ça n'existe pas. Ceux qui disent que toute notre vie est tracée, c’est faux. Il n’y aurait pas autant de misère dans le monde, si c’était le cas. La vie ne serait pas aussi injuste. On serait tous heureux. Du matin au soir. Du lundi au dimanche. Toute l’année. Toute notre vie, en fait.
Mais moi, putain je n’ai que 25 ans et la vie me pisse dessus et me pissera dessus jusqu’au bout. Je n’ai plus de famille, mes seuls amis sont ceux avec qui j’organise des bastons illégales. Ah, si. J’ai mon chien, Lucky. Oui… Lucky. Je n’ai pas trouvé plus original comme prénom. C’est un chien errant que j’ai recueilli depuis maintenant trois ans. C’est mon compagnon, et je sais que le temps que je lui donne de la bouffe, il restera fidèle à mes côtés. De toute façon, j’ai assez de thune pour lui payer mille fois ce qu’il mange, même plus. Je pense que même sans nourriture, il restera fidèle à moi.
Je décide enfin de me lever, après avoir glandé pendant deux heures dans mon grand lit, Lucky à mes pieds, tout aussi endormi que moi.
— Manger, le chien ?
Les petites oreilles blanches - ou plutôt grises, vu la saleté - se dressent immédiatement. Il saute de mon lit et court vers la porte ou est rangé sa bouffe. Cette petite tête de con est vraiment très intelligente. Je lui verse ses croquettes dans sa gamelle ou il se précipite pour manger.
Je n’ai même pas le temps de préparer mon petit-déjeuner que j’entends sonner à la porte de ma trop grande maison pour moi seul. Au moins, Lucky a un grand jardin.
Je me dirige vers la porte, tourne la clé, et l’ouvre. Mes yeux se plissent à la lueur du ciel gris clair, qui me brûle la rétine.
— Putain, Isaac, t’es en retard ! m’engueule la voix d’un homme.
J’essaie d’ouvrir complètement les yeux. Une silhouette d’homme d’âge mûr apparaît. Des yeux marron en colère. Une barbe courte, mais mal rasé, et un putain d’uniforme de flic.
Borris.
Ce sale con qui se prend pour mon père. C’était son meilleur ami, avant qu’il ne décède. Il parlait à mon père de la manière de m’éduquer, du petit garçon pas sage que j’étais… Vu le père, ça peut se comprendre. Malgré tout ça, Borris est resté son ami. Et maintenant il veut faire le travail que mon père n’a jamais fait. Son travail de père.
Depuis que mon père n’est plus là, il essaie de me sortir de mes bagarres illégales, et aussi de mon lit. Il est flic, il aurait bien pu me dénoncer depuis longtemps, il m’a menacé de le faire tellement fois. Mais il ne l’a jamais fait. Peut-être m’aime-t-il vraiment… J’en douterais, si mon propre père ne m’aimait pas, qui m’aimerait ?
— En retard pour quoi, putain ? dis-je sèchement, les yeux encore à moitié ouverts.
Il soupire, désespéré. C’est à ce moment-là que Lucky arrive pour lui sauter dessus et lui laver le visage de sa bave.
— Dit à ton sale chien errant de se barrer de mon visage, s’énerve-t-il en faisant voler ses mains en l’air, ce qui me fait rire un peu.
Je hausse simplement les épaules, puis dis à Lucky de laisser ce connard de flic tranquille.
— Tu avais un entretien d’embauche. Pour un bon poste. Tu fais chier !
— J’ai assez d’argent pour vivre dix vies différentes. Je n’en veux pas de ton taff à la con. Casse-toi de chez moi, et laisse-moi tranquille une bonne fois pour toutes.
Il soupire encore une fois. Fait demi-tour vers sa voiture de police.
— Je ne pourrais pas toujours te protéger, tu sais. Je fais de mon mieux, Isaac.
— Sauf que je ne t’ai rien demandé.
Il me fusille du regard avant de faire claquer sa portière, aussi fort que son énervement. J’en fais tout autant avec ma porte.
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Virginie Roekens
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Il y a 9 jours