Pjustine Coeurs en équilibre Premiers échanges

Premiers échanges

Je lève mes mains noircies dans sa direction et fini par répondre :


- Je... oui, merci.


Mes doigts tremblent légèrement, signe de mon embarras évident.


Il sourit, un sourire charmeur qui met en valeur sa dentition d'une blancheur irréprochable. Dans la vraie vie, c'est encore plus frappant même s'il ressemble énormément à l'homme que je vois régulièrement derrière mon écran. Sa silhouette, élancée et musclée, est accentuée par son style vestimentaire à la fois décontracté et soigné. Son visage, si proche de moi, est singulier et magnétique. Ses traits sont parfaitement définis. Un menton bien dessiné et des pommettes marquées. Ses célèbres yeux gris, encadrés de cils épais, accentuent son assurance. Sa chevelure est si brune, si dense et si ondulée que j'aimerais la sentir se balader sous mes doigts. Son charme est naturel, presque nonchalant. À cet instant, j'oublie la bicyclette, la chaîne cassée et même la raison de notre rencontre. Je suis fascinée par tant de beauté.


- Vous m'entendez ? demande-t-il d'un ton amusé et en haussant légèrement les sourcils.


Je sens mes joues s'embraser. Est-ce que je viens réellement de me faire griller en train de le mater ?


- Oui... vous disiez ? balbutié-je, honteuse et en essayant de reprendre une certaine contenance.


Il me fixe de son regard gris toujours aussi pénétrant.


- La chaîne est fichue, je ne vais pas pouvoir faire grand-chose malheureusement, dit-il en baissant le regard vers le vélo et avec une pointe de regret dans la voix. Je suis sincèrement désolé.


- Et merde !


Je mets une main devant ma bouche, étonnée de ma propre grossièreté. Edward Johnson, face à moi, rit franchement. Cela ne ressemble en rien à ce que j'avais imaginé d'une célébrité telle que lui.


- Je suis désolée, dis-je précipitamment.


- Oh, il n'y a vraiment pas de quoi s'excuser. J'aurais réagi de la même manière si cette magnifique bicyclette m'appartenait, répond-il, malicieusement.


Un rire nerveux m'échappe.


- Ha ha, très drôle, dis-je en jetant un coup d'œil à ce vieux tas de ferraille.


- Je peux vous raccompagner chez vous ? propose-t-il avec simplicité et en secouant son trousseau de clés.


J'hésite, troublée. L'auteur de mes romans préférés qui me propose un trajet en voiture ? C'est... irréel. Je le fixe, probablement un peu trop intensément, et essaye de déceler si sa proposition est sérieuse.


- Vous devez sûrement avoir mieux à faire, finis-je par répondre, incertaine.


- Ne me regardez pas comme ça, je ne vais pas vous manger, lance-t-il avec un sourire en coin. Et non, je n'ai rien de prévu. Allez, laissez-moi vous rendre ce service.


Je souris timidement.


- Dans ce cas... d'accord.


Aussitôt, Edward Johnson hoche la tête, attrape le vélo de mamie et le cale sous son bras. Je le suis, légèrement coupable de lui imposer cet acte de gentillesse. Notre rencontre est si inattendue, si improbable.


En marchant vers le parking du port, je tente de deviner ce que pourrait être la voiture d'un écrivain à succès comme lui. Une voiture de sport ? Une berline ? Un SUV ?


Nous nous arrêtons finalement devant une vieille camionnette blanche, un peu cabossée et dont la peinture s'écaille par endroits. Il tourne la clé dans la portière, mes yeux sont écarquillés et ma bouche grande ouverte, je suis incapable de cacher ma surprise. Edward s'en aperçoit et son rire éclate à nouveau.


- Elle a de la personnalité, non ? lance-t-il, taquin. Ce n'est pas une voiture de luxe mais elle m'accompagne dans de nombreuses aventures. Quand j'ai besoin de m'isoler, de partir loin des villes, elle est parfaite et s'adapte aux quatre coins du pays.


Son côté simple et authentique me surprend. Cet homme semble si éloigné de l'image stéréotypée de la célébrité. Très loin de ce que je m'étais imaginé.


- En tout cas, elle est bien plus pratique que mon vélo, dis-je en plaisantant.


Son sourire s'élargit, visiblement amusé par ma remarque. Il ouvre la porte de la camionnette et m'invite, d'un geste de la main, à monter. Je prends place sur le siège passager où une odeur de cuir vieilli et de bois trempé embaume l'habitacle. L'ambiance est presque rustique. Des carnets de notes sont éparpillés sur le tableau de bord. Certains ouverts, d'autres fermés. Des gribouillages, des phrases inachevées et des mots isolés semblent jetés ici et là. Des morceaux d'idées en attente.


Je me tourne vers lui.


- Vous écrivez ici ? demandé-je, curieuse et en désignant du menton les carnets éparpillés.


Il acquiesce et jette un coup d'œil en direction de l'endroit que je viens de lui montrer.


- Parfois, oui. C'est un peu comme un bureau ambulant. Quand je suis en manque d'inspiration je prends la route et j'écris tout ce qui me vient à l'esprit. On va dire que la solitude et le mouvement m'aident à trouver des idées.


Ses paroles me touchent mais j'essaye de ne pas le montrer. Je hoche simplement la tête. Je suis projetée au cœur de son univers, de ses écrits et de son imagination.


Après avoir rangé le vélo à l'arrière, il monte à son tour du côté conducteur. Le vieux moteur vrombit. Il démarre et m'offre un regard furtif, presque complice.


- Alors, où est-ce que je vous emmène ? demande-t-il.


- Oh, un peu plus haut sur Browne Street, ce sera parfait.


L'idée de partager un trajet avec lui me rend étrangement nerveuse.


- Vraiment ? Quelle coïncidence, j'habite par ici moi aussi, ajoute-t-il d'un ton léger.


La surprise me frappe une fois de plus, la proximité de nos vies me semble irréelle. Il me tarde de raconter cette rencontre inopinée et surréaliste à Margaret. Elle va en tomber à la renverse.


Un silence s'installe dans la camionnette, ponctué uniquement par le ronronnement du moteur et le son des rues qui défilent à l'extérieur. Je me surprends à regarder ses mains fermes sur le volant et la précision avec laquelle ses doigts glissent sur le cuir. Une légère égratignure est présente sur son index gauche, signe d'une blessure récente.


- Vous avez raison, c'est une sacrée coïncidence que nous vivions dans le même coin de l'île, ajouté-je finalement pour briser le silence.


Il rit doucement et une fossette apparaît sur sa joue droite.


- Peut-être qu'il n'y a pas de hasard, répond-il en souriant. Qui sait, je m'en inspirerai peut-être un jour dans l'un de mes livres.


Mon cœur fait un bond. Edward Johnson pourrait être inspiré par notre rencontre ? Cette perspective me trouble bien plus que je ne l'aurais voulu et pour cacher mon embarras, je jette à nouveau un regard autour de moi. Chaque détails présents dans cette vieille voiture renforcent et confirment l'idée qu'il vit pour son art et utilise chaque espace comme un prolongement de sa créativité.

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9 commentaires

Petit Guillaume

-

Il y a 4 mois

Même si je suis mort de jalousie envers ce Andrew, force est de reconnaitre que le texte est bien écrit et donne envie de lire ou d'aller se suicider selon le standard d'homme dans lequel on se situe. J'espère qu'il a des défauts, sinon je casse l'ordinateur !

Pjustine

-

Il y a 4 mois

Encore merci !
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