Ophélie Jaëger Close(d) to me track 19 - Boombastic

track 19 - Boombastic

Le décapsuleur en main, je reviens m’installer à ses côtés avant de faire sauter le bouchon avec une envie décuplée.


— Un même contexte entraîne de nombreuses vérités toutes différentes, et toutes aussi valables. Les valeurs, les croyances, l’éducation, la psychologie font que face à un même fait, plusieurs versions coexistent. Je fais juste en sorte d’exposer la vérité de mon client, celle qui va permettre d’expliquer et nuancer les faits afin de lui aménager la peine la plus cohérente possible.


Je ponctue ma tirade d’une gorgée de houblon plus que mérité. Rita demeure silencieuse, son regard braqué sur moi, mais son attention noyée dans ses pensées. Je donnerais cher pour savoir ce qui se joue dans l’enclave de son crâne, et le comment, le pourquoi de ce débat sur le mensonge, ce qu’il apporte comme réponse à sa contrariété évidente et les torts qu’elle m’imagine avoir.


— Et si… reprend-t-elle en accrochant l’assise de mon tabouret pour faire glisser le sien par traction contre le parquet. Et si je te pose des questions, là, maintenant, tout de suite, j’ai l’assurance que tu y répondes honnêtement ?


Pour le coup, j’ai subitement quelques difficultés de concentration. Ses mains se trouvent littéralement entre mes cuisses, bordel, et son siège n’est plus qu’à quelques centimètres du mien. Elle est si proche qu’elle doit relever le nez pour croiser mon regard. Et le sourire qui s’imprime sur ses lèvres… La difficulté ne va pas être de répondre avec honnêteté mais de répondre tout court.


— Vas-y, je parviens tout de même à déglutir non sans mal.


Elle semble ravie, et je ne saurais dire à quelle sauce je vais être mangé, ni même pourquoi ça me fait un peu envie.


— Ton appartement… lâche-t-elle comme une bombe en un regard par en-dessous.


Et l’espace d’un instant, je comprends la merde intersidérale dans laquelle je viens de me fourrer. Je crois tout comprendre, la raison de sa contrariété, son désir de dispute, et ses interrogations. Du moins, jusqu’à ce qu’elle précise :


— Pourquoi tu vis comme ça ? T’es là depuis des mois, ton appart ressemble toujours à rien. Ça donne l’impression que tu n’es que de passage.

— C’est le cas, j’avoue dans un soupir.

— Comment ça ?


Elle s’est redressée si brusquement qu’elle ne prend conscience que maintenant de l’étroitesse de ce tête à tête. Immédiatement, elle recule et tente de s’adosser en croisant les bras contre sa poitrine. Ça ne change pas grand chose, mais ça valide visuellement son changement d’état d’esprit.


— J’aime pas cet appartement, je n’aime pas le quartier, j’crois même que j’ai du mal à tolérer Paris dans sa globalité. Je ne m’y sens pas chez moi.

— Pourquoi l’avoir acheté, alors ?

— Pour l’adresse.


Sa curiosité piquée, elle avance à nouveau. Vraiment, faut qu’elle arrête de faire ça, j’ai le pouls plus chaotique qu’une musaraigne pygmée. Mille deux cent battements par minute. J’ai vu ça dans un documentaire depuis que Harry à troqué Disney Channel au profit de National Geographic. Si Rita ne dit rien, ses yeux le font pour elle. Ils me dissèquent, m’acculent et me somment de leur répondre.


— Pour Malik, je reprends en désignant du menton la direction de mon propre appartement. Il avait besoin de cette adresse pour la sectorisation de son lycée.

— Attends… Il vit avec toi ?

— Officiellement, oui. Mais il est quand même plus souvent chez ma mère.

— C’est pour lui l’oreiller et la couette sur le canapé ?


Je hoche la tête et Rita en lâche un “ah” qui semble contenir tout un tas de points d’interrogations soudain en trop.


— Et ma sœur ? me demande-t-elle si soudainement que j’en manque le goulot auquel je buvais et mes dents claquent le verre.

— Quoi ta sœur ? je répète bêtement.

— Tu la trouves comment ma sœur ?


Putain, mais c’est quoi cette question ?


— C’est quoi cette question, Rita ? je tonne d’ailleurs, infoutu de la retenir tant elle me taillade les lèvres.

— C’est une vraie question et t’avais dit que tu répondrais honnêtement !


Son ton se fait plaintif, mais pour une raison que j’ignore, son regard fuit le mien. Ses doigts triturent ses cheveux et ses lèvres se pincent entre deux mordillements. J’suis pas un pro de ce genre de choses, mais ce me semble quand même être des signes assez évidents de nervosité.


— Non mais pardon de m’interroger sur la raison de cette question ! Est-ce que tu comptes me demander si je trouve madame Burkowski attrayante ?

— Non, juste ma sœur, avoue-t-elle dans un murmure à peine audible.


Et ça me touche. Ça ne devrait pas, objectivement j’ai aucun compte à lui rendre et sa question est déplacée de bien des manières. Mais le pourquoi m’interroge. Pourquoi sa sœur, pourquoi maintenant, est-ce la source réelle de toute cette soirée des plus étranges ?


— Je m’en fous de ta sœur, Rita.

— Tu t’en fous ?


Voilà qu’elle semble vexée. Non mais merde, j’suis supposé me sortir comment de ce traquenard labyrinthique.


— Je m'en fous respectueusement, si tu préfères.

— Ça veut rien dire, déplore-t-elle.

— Pas plus que ta question. C’est pour ça que tu m’en veux ? Parce que tu crois que je m’intéresse à ta sœur ?

— Peut-être, concède-t-elle.


Et cette non réponse m’agite le sang plus que toute cette connerie de situation. Rita tente d’écarter son siège du mien, mais je refuse cette simple idée. Elle n’a pas le droit de bousiller mon cerveau de la sorte puis prendre ses distances, au propre comme au figuré. Mes doigts crochètent son assise, écho de son geste précédent, et lui empêchent toute tentative de fuite.


— Je suis supposé comprendre quoi, là ? j’interroge à mon tour.

— Ce que tu veux ?


Elle baisse les yeux, fixe ses doigts, triturant la trame de son jean hors d’âge. Sa voix n’est qu’un filet, son timbre hésitant et en demi-teinte. J’ai pas l’habitude de la voir comme ça, si peu sûre d’elle. Ma main libre, téméraire et impatiente, approche ce visage qui se dissimule. D’un doigt, j’oblige son menton à se redresser fièrement. Ce que je veux… C’est pas si simple. Il y a vouloir et pouvoir. Il y a l’envie fugace et l’envie tenace. Et le besoin aussi. Ce que je veux est déjà bien compliqué à déterminer, plus encore sans savoir ce qu’il en est de son côté.


— Et toi, tu veux quoi ? j’ose finalement.


Menton dressé, ses yeux se perdent en contemplation d’un coin de parquet, puis un angle de plafond, une épaule, un chat, que sais-je ? Rita regarde partout où elle ne devrait pas, transformant son silence en châtiment, mon attente en supplice. Lorsqu’enfin elle m’accorde son regard, j’y lis sa réponse avant que ses lèvres n’osent la formuler. D’ailleurs, elle ne le prononcera pas cet aveu en trois lettres. Elle lui préférera un ordre en deux mots : “embrasse-moi.


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31 commentaires

Alexandra Prevel

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Il y a 3 mois

Le bisous le bisous le bisous le bisous

Ophélie Jaëger

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Il y a 3 mois

Margot c'est le tonton bourré en bout de table, le soir de Noël xD

Alexandra Prevel

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Il y a 3 mois

exactement ahahahaha

Gottesmann Pascal

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Il y a 3 mois

Mais ouiii embrassez vous. En tout cas Rita est rassurée. Idris ne s'intéresse pas à sa frangine. Je sens le manque de confiance en elle de ton héroïne qui transparaît.

Ophélie Jaëger

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Il y a 3 mois

Elle ne manque pas de confiance en elle, Rita, si ce n'est face à Idris parfois, parce qu'avec lui elle n'est pas comme d'habitude.

MarionH

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Il y a 3 mois

Ouuuh ça y est!! Le bisouuu

Ophélie Jaëger

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Il y a 3 mois

Pas encore, dis donc. Elle lui demande, mais va-t-il céder ? (ouais ok, suffit de voir ma story insta pour que mon suspens à deux balles prenne fin)

MarionH

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Il y a 3 mois

C est quoi ce dino en pole dance ? Du spoil?

Ophélie Jaëger

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Il y a 3 mois

Mais non, c'est en rapport avec ma story (qui date) sur le smut des autres VS mon smut à moi...

Ophélie Jaëger

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Il y a 3 mois

Du spoil-dance... ahahahaha. Pardon.
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