Fyctia
Départ imminent
L'été touchait à sa fin.
Je profitais des derniers rayons de soleil pour parfaire ma peau déjà bien dorée, résultat d'innombrables séances de bronzage au bord de l'imposante piscine de mon paternel.
Les bikinis et les cocktails estivaux ne seront bientôt qu'un vaste souvenir, vite remplacés par les cours et les horaires à respecter. Quant aux romances dévorées, elles laisseront place aux bouquins sur l'information, la communication et la stratégie d'entreprise. Je le savais, mon entrée à l'université serait un tournant dans ma vie. Et pas seulement parce que je quittais mon sud natal pour la capitale. Outre la distance, l'absence des moments partagés entre famille et amis au quotidien créerons un manque insoutenable.
Je me félicitais tout de même d'avoir remporté cette bataille face à mon père. Vivre dans son appartement inhabité du 6eme arrondissement de Paris, oui, mais seule il en était hors de question. Qu'aurais-je fait de cet hausmanien de 120 mètres carrés composé de quatre chambres? Hormis accentuer ma solitude, je n'en aurais rien tiré de bon. Papa s'était d'abord offusqué à cette idée, abriter une ou un inconnu sous son toit était invraisemblable. Cependant, à force de négociations ardues et d'énumérations positives de ma part à l'égard de cette colocation, il avait fini par céder. Il faut dire, qu'il n'y avait pas eu un jour lors de ces deux derniers mois ou je ne lui en avais pas fait mention. Je savais me montrer convaincante quand il le fallait et lorsque je voulais quelque chose il m'était facile de l'obtenir. Qualité qu'il ne pouvait me reprocher puisque je tenais cela de lui. Était-il nécessaire de préciser la seule condition imposée? Le choix de mon ou ma future colocataire lui appartenait. Je le soupçonnais d'avoir, lui aussi, eu des appréhensions quant au fait de savoir sa petite dernière livrée à elle même.
Le soleil tapait si fort en cette fin de matinée que je ne pu rester davantage de temps sous son exposition.
Je rejoignis le salon, une musique du groupe Maroon 5 dans la tête et des fourmillements dans le ventre. Je croqua dans une pomme, là fixa puis constata avec joie qu'aucune entrave au régime que je mettais volontairement imposée durant tout l'été n'ait été à déclarer.
- Ah chérie, tu tombes bien! J'ai passé quelques appels et bonne nouvelle tu ne vivras pas seule sur le boulevard. La fille de Boris est...
- Boris? Coupais-je mon patriarche, bien incapable de situer ce prénom.
- Oui Boris. Mais si tu sais, mon ami député avec qui je tape quelques balles parfois! Ajouta-t-il devant ma mine perplexe.
- Peut-être. Et donc sa fille quoi?
- Elle fait des études dans le cinéma à Paris depuis l'an dernier. Son appartement précédent était trop petit ou trop éloigné de son école quelque chose comme ça. Il m'en avait parlé mais je n'y avais pas prêter attention alors tu imagines sa joie hier quand je lui ai fait part de ton envie de cohabiter dans l'un des quartiers parisiens les plus prisés.
Papa s'était débrouillé pour me mettre une fille de bonne famille dans les pattes. Cela n'avait rien de surprenant quand la plupart de ses fréquentations ne se limitaient qu'a la haute et aux célébrités. Jacques Dillon, de son vrai nom, n'était autre que le chanteur le plus adulé de sa génération. Mon père avait eu trois femmes, un enfant avec chacune d'entre elles. C'était un homme respecté et respectable malgré les nombreuses frasques qui on pu, auparavant, lui être reprochées. Notre relation était aussi conflictuelle que fusionnelle, davantage encore depuis le départ soudain de maman pour un homme plus jeune il y'a trois ans de cela. Il en fut, en premier lieu, dévasté puis avait vite remis le grappin sur ses vieux démons. Sexe, drogue et alcool l'avaient conduit tout droit en désintox'.
J'avais peur que mon départ réactiverait certains de ses vis. Je constatais pourtant que cet événement le rendait fière, il avait ses yeux pétillants lorsqu'il évoquait mon futur apprentissage auprès de notre entourage. Auprès de la presse également car même s'il passait son temps à me protéger des tornades médiatiques, certaines informations fuyaient inévitablement. Petite cette exposition me terrorisait, les flashs des photographes me paralysaient si bien que j'en faisais des cauchemars la nuit. Ce phénomène obligea mes parents à me « cacher » durant une bonne partie de mon adolescence. Encore aujourd'hui, j'avais parfois du mal avec cette célébrité par inadvertance, mais je ne pouvais blâmer papa ou qui que soit d'autre. Elle nous permettait de vivre très confortablement, d'obtenir des avantages sur a peu près tout et n'importe quoi.
- Alba, tu m'écoutes?
Partie dans mes souvenirs, je n'avais absolument pas entendu ce que mon père me racontait.
- Tu as la tête ailleurs c'est normal mais j'ai besoin de ton attention, c'est important. Bon, je recommence, Marie arrivera en début de soirée te dire l'heure exacte m'est impossible, elle ne sait pas encore à quelle heure se termine sa première journée de cours. De toute façon elle sonnera. J'ai demandé à Gaëtan de lui laisser un jeu de clé sur la table de l'entrée.
- Gaëtan?
- Oh non, là tu perds la mémoire ma fille! Tu te souviens quand même de Gaëtan?
Bien sûr que je me souvenais de Gaëtan, il était notre intendant depuis une dizaine d'années.
- Oui je sais qui est Gaëtan. Mais pourquoi tu parles de lui? Me dis pas qu'il habite là bas? Je ne voulais pas vivre toute seule, certes, mais pas non plus avec tout ton personnel, hein!
- Mais non mais non, il s'assure juste de l'état de mes biens parisiens. Vous serez que toutes les deux. Bien sûr, il viendra parfois constater que tout se passe bien et il sera présent si vous avez besoin de quoique ce soit. Ne proteste pas s'il te plaît, ça me rassure beaucoup de le savoir à proximité.
- Ok. Je vais finaliser mes valises et on pourra partir, dis-je, un sourire timide affiché sur le visage.
- D'accord ma puce, je vais dire à Vladimir de préparer la voiture. Ton train est à quelle heure déjà?
- 12h32. Je sais, je me dépêche, ajoutais-je face au regard inquiet de mon père.
Assise sur mon immense lit, je regardais une dernière fois ma chambre d'adolescente, mon cœur balançant entre nostalgie et excitation.
12 commentaires
Nascana
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Il y a 5 ans
lagloiredesmots
-
Il y a 5 ans
Ketsia
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Il y a 5 ans