serahminneha Blame Her Chapitre 4 - partie B

Chapitre 4 - partie B

Je ne tourne pas la tête. Je ne montre rien. Mais à l’intérieur, je souris. Elle croit que je ne la vois pas ? Que je ne la sens pas me suivre comme un petit chien battu qui a soudain envie de mordre ?


C’est presque mignon. Elle regarde ses pieds en marchant, baisse les yeux chaque fois que je tourne une épaule. Elle fait semblant de regarder les murs, les affiches. Mais elle me traque.


Je tourne à gauche. Pas vers la salle de cours. Je prends un couloir plus calme. Je pousse la porte de l’atelier d’art. La salle est vide. Évidemment. À cette heure-là, il n’y a que le silence et la poussière colorée pour occuper les lieux. Je laisse la porte ouverte derrière moi.


Je sais qu’elle va entrer.


Je n’ai pas à me retourner pour le confirmer. Je sens le froissement léger de son uniforme, le souffle qu’elle tente de retenir, le grincement du parquet sous ses semelles.


Je fais un pas. Deux. Puis je me retourne lentement, sans hâte. Et je la gifle.


La claque résonne dans la pièce comme un coup de feu. Sa joue rougit instantanément. Ses yeux s’emplissent de larmes. Sa main tremble quand elle vient se poser sur sa peau.


Je l’observe. Elle ne comprend pas. Elle ne s’attendait pas à ça.


— Tu sais faire autre chose que pleurnicher ?


Ma voix est glacée. Remplis de mépris. Elle tente un mot. Rien ne sort. Je ne lui laisse pas le temps.


— Pourquoi tu me suis ?


Elle se redresse. Doucement. Essuie ses yeux du revers de la manche. Elle inspire, ravale son sanglot. Et, puis contre toute attente, elle rit.


Un rire de fille au bord de la rupture. Je la fixe, incrédule.


— Je sais que c’est toi.


Sa voix est tremblante, mais elle ne lâche pas mon regard.


— Je t’ai vue, hier. C’est toi qui as mis du verre dans le sandwich de Kang Ho.


Je hausse un sourcil. Et alors ? Où veux t’elle en venir ?

— Je voulais t’arrêter, au début. J’ai cru que c’était mal. Même s’il est odieux. Je me suis dit… non, il ne mérite pas ça.


Elle marque une pause.


— Mais quand j’ai vu le sang… son cri… J’ai… aimé ça.


Je ne dis rien. Elle parle encore.


— Pour la première fois, je me suis pas sentie faible. J’ai pas dormi de la nuit. Je veux comprendre Comment tu les fais tous trembler sans lever la voix.


Ses yeux brillent. D’obsession. D’admiration. De dégoût d’elle-même aussi.


Elle est pathétique.


Et là, je la gifle encore. Plus fort.


— Tu crois que c’est un jeu ?


Elle vacille, mais ne tombe pas. Elle serre les dents. Je vois sa mâchoire trembler.


— Tu crois avoir les tripes ?


Elle se redresse. Et moi, je tends la main pour frapper une troisième fois. Mais cette fois, sa main attrape mon poignet.. Je reste figée. Un instant suspendu. Elle me regarde. Les yeux toujours brillants, mais plus clairs. Plus solides. Et moi, je souris.


— Tu aurais dû le faire à la première claque.


Je retire lentement mon bras. Je l’observe comme une bête étrange, comme un insecte qui aurait appris à marcher debout.


— Ton nom.


Elle hésite, surprise que je ne l’ai pas retenu. Puis répond, d’une voix plus posée que je l’attendais.


— Han Ji Woo.


— Alors écoute bien, Ji Woo. Si tu veux être moi… commence par me prouver que tu sais obéir.


Je m’avance. Mon regard dans le sien.


— Va me chercher un café au distributeur. Noir. Sans sucre. Dépose mon sac en classe, et prépare mon bureau. Que tout soit en place quand j’arrive.


Elle hoche la tête. Puis elle sort.


Elle a déjà échoué. Elle n’a même pas demandé ce que je voulais dire par “préparer”. Quelle idiote. Mais au moins… j’ai gagné un larbin et du café.


Je me tourne vers la fenêtre. Je suis sur le point de sortir moi aussi, quand la douleur revient. Pas une douleur. Un coup de marteau dans le crâne. Ma vision vacille. Je tends le bras, cherche appui… trop tard. Ma tête percute le coin d’un bureau. Un bruit sec. Puis plus rien. Je m’effondre derrière un meuble, Le monde se dissout autour de moi.


Quand je me réveille, mon crâne bourdonne. Une pulsation sourde bat derrière mes tempes. J’ouvre les yeux, je distingue d’abord les pieds d’un bureau. La poussière au sol. Une traînée rouge séchée… mon sang ? Peu importe.


Combien de temps se sont-ils écoulés ? Une heure ? Deux ?


Je ne suis plus seule. Elle est là. Assise près de la grande fenêtre.


La fameuse nouvelle étrangère : Sarang.


Ye Jin la hait. Yun Ha la trouve “sympa”. Moi, je ne l’avais même pas regardée jusqu’à aujourd’hui. Mais là… je ne peux pas la quitter des yeux.


Parce qu’il y a quelque chose dans ses gestes. Dans la tension de ses épaules. Dans la façon dont elle applique les couleurs sans les voir. Elle est ailleurs. Elle est vidée. Ou trop pleine. Elle peint. Une grande toile. Ses doigts sont couverts de noir, de bleu, de ce chaos qu’elle tente de figer.


Elle ne m’a pas vue. Parfait.


Je ne bouge pas. Je reste dans l’ombre, mon souffle lent. Je l’observe. Puis… la porte s’ouvre.


Un garçon entre. Calme. Mesuré. Il referme sans bruit. Son regard se pose immédiatement sur elle.


— Sarang…


Sa voix est douce. Une voix qui connaît, une voix qui cherche à réparer quelqu’un.


Ji Ho. Tiens donc. Le fameux garçon que Ye Jin aime depuis tant d’années, que Yun Ha respecte, et qui, jusqu’à maintenant, ne m’intéressait pas.


Je ne peux pas tout entendre. La salle est grande. Mais je lis les corps, les silences, les ombres. Ils parlent bas. Elle ne le regarde pas tout de suite. Il s’approche. Il lui montre quelque chose, une sculpture ? Ses mains s’agitent. Il explique. Il essaie de la rassurer. Je vois son corps à elle qui se referme, puis se tend.


Et puis elle parle.


Je ne capte pas tout. Juste des bribes.


: “Des mots glissés dans mon sac…”

: “…Objets volés dans ma chambre…”

: “…Textos anonymes…”


Je me redresse légèrement, toujours cachée. C’est elle qu’il traque. Sarang est dans le viseur.


Je n’entends pas ce qu’elle dit ensuite, mais je vois Ji Ho pâlir. Il tend la main, elle lui donne quelque chose. Il appuie sur un bouton. Et je reconnais l’objet : un vieux baladeur. Qui utilise encore ce genre de relique de nos jours ? Ils écoutent. Tous deux figés. Et là… je le vois. Sur leurs visages. Ce mélange de peur, de malaise, de nausée. Ji Ho passe la main dans ses cheveux. Il jure. Sarang baisse les yeux. Elle parle encore.


Elle tremble. Elle dit que c’est une punition. Lui, il nie. Il parle d’obsession. Il veut l’aider. Il la croit.


Je, moi… je reste tapie dans l’ombre. Et une question me traverse.


Si elle est la prochaine victime de l’homme en noir… Est-ce que je viens d’avoir un coup d’avance, simplement en m’évanouissant au bon endroit, au bon moment ? La réponse me dégoûte. Je ne veux pas gagner par hasard. Je ne veux pas survivre grâce à elle.


Sarang n’est pas un bouclier.


Elle est un pion. Et moi, je n’ai aucune envie de partager l’échiquier.


Je veux le battre moi-même. Pas par hasard. Pas grâce à une idiote bien placée. Je me redresse un peu plus. Mon regard accroche la lumière. Sarang ne le sait pas encore. Mais elle vient d’entrer dans mon jeu. Et cette fois, c’est moi qui décide des règles.

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