s'may Blacksilverstone Chapitre 2 : Samia (1/2)

Chapitre 2 : Samia (1/2)

Bam, Bam, Bam.


— Samia, ouvre cette putain de porte ou je la défonce ! hurle Samir.


L’eau tiède a perdu toute sa chaleur, laissant sur ma peau une sensation désagréable. Mon corps, à moitié immergé dans la baignoire, est engourdi. Depuis combien de temps suis-je là, coincée entre conscience et souvenirs ? Trop longtemps, sans doute. Le passé s’accroche à moi comme une seconde peau, une ombre sournoise qui refuse de se dissiper.

Un bruit sourd me fait sursauter.


— Mia ? Ça fait un moment que t’es là-dedans. Ça va ?


Sa voix grave, légèrement inquiète, résonne à travers la porte. Je ferme les yeux une seconde, essayant de reprendre pied dans le présent.


Bam, Bam, Bam.


La poignée s’agite. Verrouillée, comme toujours. Un foutu réflexe.


— Je vais sortir, et je vais bien, lancée- je d’une voix rauque.


Mon corps proteste quand je me redresse, l’eau glissant le long de ma peau. J’attrape mon peignoir, m’y enroule et sors de la baignoire sur des jambes encore flageolantes. Je pousse un soupir, prenant une seconde pour recomposer mon masque. Puis, je déverrouille la porte.

Elle s’ouvre presque instantanément.

Samir est là, bras croisés, son regard sombre braqué sur moi.


— Ça fait plus de dix minutes que je t’appelle, grogne-t-il.

— Je me suis assoupie dans la baignoire, dis-je en resserrant mon peignoir.


Il plisse les yeux, sceptique. Son regard détaille mon visage, mon corps encore humide, la

fatigue qui creuse mes traits.


— T’étais dans l’eau depuis combien de temps ?

Je hausse les épaules. À quoi bon répondre ?


— Je sais pas. Je vais m’habiller.


Il ne bouge pas. Je vois dans ses yeux qu’il hésite. Insister ou me laisser tranquille ? Finalement, il soupire, passant une main dans ses cheveux.


— Dépêche toi. On doit retrouver le Prez et Hélène au resto.


J’acquiesce en silence. Il reste là, comme s’il attendait quelque chose. Puis, sans un mot de plus, il tourne les talons et quitte la pièce.

Dès qu’il disparaît, je me laisse tomber sur le bord du lit, mon cœur battant trop fort.

Pourquoi chaque interaction avec lui, sans les enfants dans les parages, me secoue-t-elle autant ?

La seule chose que je voudrais, c’est qu’il me prenne dans ses bras. Qu’il m’embrasse. Qu’il me dise que tout ira bien. Mais on n’est pas dans un livre. Ni dans un film. Alors, je me ressaisis. Je me lève. Et je souris, même si c’est un mensonge.

________________________________________


L’air glacé de janvier me pique la peau dès que nous mettons un pied dehors. Le soleil pâle de l’après-midi peine à réchauffer l’atmosphère, et la brise mordante s’engouffre sous mon manteau. Un frisson me parcourt l’échine, mais je serre les dents. Toujours donner l’impression que tout va bien. Toujours faire comme si.

Samir déverrouille la voiture d’un geste sûr. Sexy.

Je cligne des yeux. Attends… sexy ? Depuis quand j’en suis arrivée à trouver un homme attirant juste parce qu’il ouvre une voiture ? Je perds la tête. Grave.


Je m’installe côté passager, repliant mes mains gelées sous mes manches. Samir prend place à son tour, met le contact et pousse légèrement le chauffage avant de fixer la route, silencieux.

Le moteur ronronne doucement, et un silence pesant s’installe. Pas un silence gênant, non… plutôt ce genre de silence rempli de choses non dites. Lui et moi, on en est devenus des experts depuis toutes ces années.


— T’as toujours ce regard de chat mouillé quand il fait froid.


Je tourne la tête vers lui, plissant les yeux.


— Chat mouillé ?

— Ouais. Tu sais, ce truc mi- mignon, mi- pathétique.


Mon cœur rate un battement, mais mon visage reste impassible. Il aime me taquiner, toujours sur des détails absurdes. Un jour, ce sont mes cheveux, un autre, ma manière de froncer les sourcils quand je suis concentrée… Je sais qu’il fait ça exprès. Qu’il aime voir mes réactions.


— Charmant…


Il esquisse un sourire en coin. Ce foutu sourire.


— Ça me donne presque envie de t’acheter un bonnet avec des oreilles. Mia le chaton, ça sonne bien.


Je roule des yeux, feignant l’agacement.


— Je ne suis pas un chaton, je suis une petite chatte, et si tu fais ça, je te jure que je le brûle sous tes yeux.


Silence.

Une seconde. Deux secondes. Trois…

Oh. Merde.

Je viens vraiment de dire ça ?

Samir tourne légèrement la tête vers moi, une lueur amusée dans le regard.


— Une petite chatte, hein ?


Mon cerveau beugue. Littéralement. La chaleur me monte aux joues, je détourne le regard, tentant de me convaincre que je ne suis pas en train de me ridiculiser toute seule. Peut-être qu’il n’a pas tilté. Peut-être qu’il—

Un rire éclate dans l’habitacle, grave, vibrant. Samir rit. Carrément.

Et merde.

Je croise les bras, vexée.


— Mauvaise perdante, murmure-t-il entre deux éclats de rire.

— Je préfère le terme femme avec du goût.


Il me jette un regard en coin, une lueur de malice dans les yeux.


— Mouais… Pourtant, t’as bien fini avec moi.


Mon cœur s’emballe, mais je garde mon masque intact.


— C’est censé être une preuve de bon goût ou de mauvais jugement ?


Il fait mine de réfléchir, puis hausse les épaules avec un sourire amusé.


— Un peu des deux.


Je secoue la tête, un sourire discret au coin des lèvres. Il ne se rend même pas compte de l’effet qu’il me fait.

Ou peut-être que si… et qu’il s’amuse avec ça.

Un silence plus léger s’installe après notre échange, ponctué seulement par le ronronnement du moteur. Je fixe distraitement la route qui défile, mais mon esprit dérive ailleurs.


C’est étrange, cette sensation de flottement entre ce qu’on est et ce qu’on montre. Pendant des années, j’ai appris à ne rien laisser paraître, à ne pas espérer plus que ce qu’on m’a donné. Samir et moi, on partage un nom, une vie sous le même toit, des enfants… mais pas ce lien, pas celui qui fait battre le cœur plus fort. Pas officiellement, en tout cas.

Je l’ai aimé. Je l’aime encore, même si je me l’interdis.

Mais lui, il est là par devoir. Il l’a toujours été.


Je baisse les yeux sur mes mains, que j’ai sorties de mes manches. Mes doigts tremblent à peine, infime mouvement qu’il ne devrait pas voir. Mais lui… Lui, il capte toujours tout.

Je sursaute légèrement quand ses doigts effleurent les miens. Juste un contact, léger, mais brûlant. Il ne me touche jamais ailleurs, jamais. Juste ma main, comme une permission silencieuse, comme un rappel qu’il est là.

Je relève la tête et réalise qu’on est garés.

Devant le restaurant. Mon préféré.

Je tourne le visage vers lui. Ses yeux sombres sont déjà sur moi, perçants, patients.


— On y va ? Sa voix est basse, presque douce.


J’acquiesce, dénouant mes doigts des siens avant d’ouvrir la portière. Mais l’écho de sa chaleur contre ma peau me suit encore.


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4 commentaires

Carl K. Lawson

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Il y a 2 mois

Petit like de soutien 😉

s'may

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Il y a 2 mois

1000 mercis 🤗

Salma Rose

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Il y a 2 mois

Petit échange de likes. J'ai besoin de débloquer un chapitre. Merciii d'avance !🌹🌹

s'may

-

Il y a 2 mois

Déjà liké, je te suis pour les prochains chapitres. 😉
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