Fyctia

Rendez-vous est pris une heure plus tard pour une interview en visio et, sachant ce qu’on a dit d’elle sur les réseaux sociaux, Marianne tient à ne pas passer pour une jeune bourgeoise mais pour une fille de 16 ans comme les autres. C’est pourquoi elle s’habille simplement et ne se maquille pas. Elle réfléchit surtout aux réponses à apporter aux questions de la journaliste qu’elle arrive à anticiper. Elle sait que des mauvais souvenirs vont remonter à la surface mais il faut qu’elle reste forte et courageuse. C’est d’ailleurs ce que lui disent une Clotilde réveillée, ainsi que Valentin, lorsqu’ils la rejoignent dans le salon quelques minutes avant le début de l’interview. Dans le bureau de son oncle Stanislas, Marianne s’installe, connecte son ordinateur et découvre le visage énergique d’une femme d’une cinquantaine d’années aux cheveux gris. Patricia Verclin commence bientôt à lui poser les questions.

Pendant près d’une demie-heure, tout y passe, l’atmosphère familiale qui s’est rapidement détériorée au début du confinement, les conditions de la fuite et les raisons pour laquelle Marianne a du prendre le volant. Les articles d’Amélie Grangier et le traitement médiatique général de l’affaire. Les attaques sur les réseaux sociaux et même la vidéo d’Enzo dont Patrick Verclin ignorait l’existence. L’adolescente fait tout pour donner des réponses aussi claires que précises et ne pas se laisser submerger par ses émotions alors même qu’elle a envie d’éclater en sanglots. C’est la dernière question, inattendue, du journaliste qui la fait craquer.

— Vous êtes devenue la porte parole de votre mère. Est ce que je peux vous demander comment elle va ?

— Ma mère fait tout pour ne pas sombrer, répond Marianne en ne parvenant pas à cacher son émotion. Mon frère et moi sommes là pour la soutenir ainsi que son frère ainé et sa femme qui nous ont recueillis. Mais c’est très dur pour elle puisqu’elle subit le contrecoup de tout ce qu’elle a subi pendant ces dernières semaines. Il faut retenir que les coups, comme les insultes, ne sont jamais sans conséquences sur la personne qui en est la victime.

Une première larme coule le long des joues de Marianne et elle sent que, bientôt, elle va éclater en sanglots et vider le trop plein d’émotions qu’elle a accumulé pendant cette longue interview. Patrick Verclin s’en rend bien compte et met fin à l’entretien après avoir remercié son interlocutrice et lui avoir dit que l’entretien serait diffusé deux heures plus tard, après le journal de 20 h.

L’adolescente est remuée mais sait qu’elle a fait ce qu’il fallait. Reste juste à espérer qu’une telle interview soit un premier pas pour faire triompher la vérité.