Fyctia
Chapitre 27
Comme Marianne s’y attend, ni Clotilde ni Viviane ni Stanislas n’ont pu fermer l’oeil de la nuit. Seulement quelques heures après le retour de la gendarmerie, le docteur Pellegrin se trouve devant un grand café qui doit lui apporter l’énergie nécessaire pour une longue journée à s’occuper des malades qu’il a en cette période de pandémie. Comme à son habitude, Viviane est aux côtés de son mari et lui tient compagnie aux petites heures de la matinée.
— C’est quand même pas possible ce que les gens se permettent de dire et de faire sur internet, peste t’elle. Ils sont désinhibés grâce à l’anonymat et ne pensent pas une seule seconde aux conséquences de ce qu’ils peuvent dire ou faire. Comme si ça n’affectait pas celles et ceux qui en sont victimes
— Si ce n’était que sur internet, Viviane, je serais presque rassuré parce qu’il n’y a aucun risque que Clotilde ou Marianne croise l’un de ces crétins à Lisognan. Mais, dès hier, j’ai été engueulé par la moitié de mes patients et ça ne va pas aller en s’arrangeant.
— Ils te reprochent d’avoir accueilli ta sœur et ses enfants ?
— À leurs yeux je passe pour un dangereux irresponsable qui héberge deux criminelles sous son toit.
— Elles croient tout ce que raconte la Grangier ?
— Elle est même devenue l’idole de tous les vieux de notre village et de ses alentours. Tu te rends compte Viviane, depuis qu’ils sont enfants, c’est la première fois qu’on parle de Lisognan dans les médias nationaux. À leurs yeux c’est un plus grand évènement que la pandémie.
— L’évènement se fait sur le dos de trois victimes innocentes, ou plutôt de deux parce que, heureusement, Valentin est épargné pour le moment.
— Encore heureux. Mais je suis étonné par la force de caractère de Marianne. Je la connaissais finalement pas si bien que ça et elle cachait bien son tempérament de battante derrière son apparence de jeune fille sage. Heureusement qu’elle est là parce que sa mère m’inquiète.
— Je sais que Clotilde ne dort pas, chaque fois que je me réveille la nuit, sa chambre est allumée. Je sais pas ce qu’elle fait, lire ou prier certainement.
— C’est pareil pour moi mais ce n’est clairement pas ce qui m’inquiète le plus. Il fallait la voir, cette nuit, quand elle a découvert le lit de Marianne vide. Elle piquait une crise de nerfs et j’ai du la maintenir par la taille pour qu’elle ne se tape pas la tête contre les murs.
— Tu crois que j’aurais pas été dans tous mes états si je trouvais le lit d’un de mes enfants vides ? Tu te souviens quand Blanche avait fait le mur à 17 ans pour aller rejoindre son amoureux ?
— Je m’en souviens, mais tu gardais quand même les idées claires alors que Clotilde m’a vraiment fait peur. J’ai l’impression que ses nerfs commencent à lâcher et ce n’est pas étonnant après ce qu’elle a subi. Je te jure que si jamais je revois Lionel je le pulvérise. On va encore dire que je joue au grand frère protecteur alors que Clotilde est adulte mais on touche pas à ma petite sœur.
— C’est assez normal comme réaction réagit Viviane. Tu te souviens quand Jacinthe s’était faite embêter à l’école ? C’est pas nous qui avons réglé le problème.
— Ah ça non, on l’a même appris des semaines après. C’est Blanche et Loïc qui sont allés voir les trois gamins qui embêtaient leur petite sœur et, dans mes souvenirs, il leur ont assez vite fait passer l’envie de continuer.
— Mais pour le petit crétin qui s’en est pris à Marianne et a mis cette vidéo sur internet ça n’aurait pas suffit. J’imagine sa tête quand les flics vont débarquer chez lui.
— J’imagine surtout la tête des parents, ajoute Stanislas. Il a pas dû se vanter d’avoir mis cette vidéo en ligne. Ça va donc être la surprise pour eux.
— J’espère qu’ils vont recadrer leurs fils avant que la justice ne le fasse à son tour. Allez mon chéri ça va être le moment de retrouver tes malades.
— Y compris ceux qui m’ont dit qu’ils allaient lancer une pétition pour obliger Clotilde et ses enfants à rentrer chez eux.
— Une quoi ?
— Tu m’as bien entendu, certaines personnes de notre village ont une capacité d’accueil qui me laissent sans voix. Alors que je les soigne depuis quarante ans, que j’ai soigné leurs enfants et, pour certains, leurs parents aussi.
— J’espère qu’elle va pas aboutir cette pétition. Il ne manquerait plus que ça.
— Le mal est déjà fait, j’ai eu le maire au téléphone pas plus tard qu’hier et il semblait vraiment s’inquiéter de la situation. Bon j’y vais sinon je vais vraiment me mettre en retard.
Après le départ de Stanislas, son épouse pensive seule quelques secondes avant de s’apercevoir que Clotilde se trouve dans son dos. Visiblement, elle se tenait derrière la porte et a entendu la fin de la conversation.
— Je suis désolée pour tout ce qui arrive, dit la mère de famille en larmes. J’ai pas pensé aux conséquences et je vous ai attiré les pires emmerdes.
— Clotilde, viens là, répond Viviane en la prenant dans ses bras, il ne faut pas t’en vouloir, c’est pas toi la fautive. C’est Lionel le responsable, et personne d’autre. Tu ne pouvais pas rester chez toi avec tes enfants avec tout ce qui s’y passait.
— J’ai l’impression de ne plus rien contrôler dans ma vie. D’être un bateau en pleine tempête qui ne sait pas où il va et court de catastrophe en catastrophe.
— Ne t’en fais pas ma belle-sœur préférée. Après la tempête il y a toujours une éclaircie. Je ne te promet pas qu’elle arrivera bientôt mais je te jure qu’elle arrivera un jour ou l’autre. En attendant, l’équipage tient bon et il faut que le moral soit au beau fixe.
— T’es merveilleuse Viviane, et on a de la chance, les enfants et moi, de pouvoir compter sur Stanislas et toi.
— Jamais ton grand frère ne te laissera tomber Clotilde, et, quant à moi, tu ne me trouveras jamais loin de mon mari que j’aime. Donc tu pourras toujours compter sur moi.
5 commentaires
Leo Degal
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Il y a 25 jours
Gottesmann Pascal
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Il y a 25 jours
Marie Andree
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Il y a 2 mois
Gottesmann Pascal
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Il y a 2 mois
Gottesmann Pascal
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Il y a 2 mois