Gottesmann Pascal Bien sous tous rapports Vidéo sur les réseaux.

Vidéo sur les réseaux.


À Lisognan, sur les coups de onze heures du soir, Marianne est réveillée par une sonnerie de son téléphone qui l’avertit d’un message. Ouvrant un oeil en râlant parce qu’elle dormait déjà bien, elle se rend compte qu’il a été envoyé d’Élodie, une fille de sa classe. Marianne se demande ce qu’elle peut bien lui vouloir. Après avoir été copines pendant l’année de troisième, les filles s'étaient éloignées l’une de l’autre en début de seconde, n’étant plus du tout sur la même longueur d’onde. Il y a même pas mal de tension entre les deux adolescentes quand elles ont été rivales pour sortir avec Diego. Dans un demi sommeil elle découvre le message. « Félicitations ma connasse, t’es devenue une star des réseaux sociaux. La vidéo est juste trop marrante ». Tout d’un coup, Marianne est parfaitement réveillée. Quelle vidéo ? Avant même de prendre son ordinateur portable elle s’attend au pire et, en se connectant, elle ne tarde pas à la découvrir la vidéo en question.


C’est Enzo, le même garçon qui l’insultait quelques heures plus tôt dans les messages, qui l’a mise en ligne en début de soirée. À présent, elle a déjà été partagée des centaines de fois. La scène filmée a été prise en décembre dernier et se déroule dans le self du lycée. On y voit Marianne, qui vient de finir de manger et va débarrasser de son plateau, se faire violemment bousculer par Enzo qui fonce sur elle et la fait chuter sous les yeux de sa copine Estelle trop surprise pour réagir. L’agresseur renverse ensuite le contenu de la poubelle voisine sur sa victime à terre, la couvrant d’os, de pelures de fruits et de tous les restes laissés par les élèves en hurlant DE FRISSAC DE MERDE.


La vidéo dure une quinzaine secondes mais ça parait une éternité pour l’adolescente humiliée. Marianne ne pensait plus du tout à cette scène et, pour elle, c’était de l’histoire ancienne. Enzo avait d’ailleurs écopé d’une semaine d’exclusion du lycée. Mais elle ignorait que la scène avait été filmée et son agresseur s’était bien gardé de s’en vanter lors du conseil de discipline à la rentrée de janvier.


Enzo a accompagné sa vidéo d’un message : Tous les fans de Marianne seront ravis de voir ce que je lui ai fait au lycée.


Les commentaires qui suivent sont plus horribles les uns que les autres.


Trop cool man, ça pourrait devenir un même.


La petite bourgeoise précieuse qui se retrouve au milieu des ordures. Jamais rien vu d’aussi marrant.


Elle fait moins la fière l’autre connasse. Bravo mec t’es trop fort.


Tu vas lancer une mode. Il y a une ou deux nanas que j’aimerais bien voir le nez dans la merde.


Marianne ne peut pas s’empêcher de continuer de lire et les rares personnes qui prennent sa défense se font immédiatement insulter. Parmi celles ci elle voit Diego qui vient de poster un message deux minutes plus tôt. Ça veut dire qu’il est réveillé et il n’y a que lui qui peut lui remonter le moral à ce moment là. Il décroche d’ailleurs immédiatement quand elle l’appelle.


— Toi, tu as vu la vidéo de cet enfoiré d’Enzo.


— On ne peut rien te cacher, j’ai vu la vidéo et lu les commentaires. Ça…ça me donne envie de vomir.


— Qui est ce qui t’a mis au courant ?


— L’autre connasse d’Élodie. Je me demande pourquoi elle avait toujours mon numéro. Le moment où on a été copines me parait de l’histoire ancienne. Maintenant, elle a bien du se marrer.


— Ne l’écoute pas querida, ni elle ni tous ceux qui t’insultent sur les réseaux. Il n’y en a pas un qui t’arrive à la cheville.


— Je te jure j’ai envie de défoncer Enzo. Jamais été aussi en colère de ma vie.


— T’inquiète je vais le faire pour toi. La vidéo est d’ailleurs trop courte. Il manque l’énorme baffe que je lui ai collée juste après.


— C’est vrai que, à l’époque, j’avais un chevalier servant pour me défendre mais, maintenant, je me sens seule face à la France. Et même la terre entière grâce à internet.


— Ne perd pas espoir Marianne, je suis certain que tu vas réussir à rétablir la vérité. Et tu sais pourquoi ? Parce que t’es trop forte.


— Merci Diego, je savais que j’allais enfin entendre des paroles gentilles en t’appelant.


— Manquerait plus que je t’insulte comme tous ces imbéciles derrière leurs ordis.


— Par contre, fais moi une promesse. Maintenant qu’on n’est plus ensemble tu vas redevenir l’un des mecs les plus convoités parmi les secondes. Tu sors avec la fille que tu veux, sauf Élodie.


— Ne t’inquiète pas querida, il n’y a pas de risque. Ça fait longtemps que je sais que c’est une peste. Toi aussi choisi bien ton prochain chéri. Et je te fais une autre promesse, la prochaine fois que je croise Enzo je lui coupe les couilles et je te les envoie par la poste.


— C’est impossible Diego, il n’en a pas.


Cette conversation met du baume au cœur de Marianne mais ça ne dure pas longtemps et, rapidement, elle se met à pleurer dans son lit et à boxer un pauvre oreiller qui ne lui a rien fait comme une petite fille en plein caprice. Ses pleurs sont entendus par Viviane qui arrive dans sa chambre.


— Je pensais que tu allais mieux, ma chérie, mais c’est pas vraiment le cas.


— C’est pas possible tata, quand je pense avoir touché le fond je découvre qu’il y a encore pire. La dernière c’est une vidéo de moi sur les réseaux sociaux. Elle a été vue des dizaines de milliers de fois.


— Une vidéo ? Quelle vidéo ?


Viviane visionne la scène et change de tête. Blême de rage elle en perd même sa légendaire maitrise d’elle même.


— Debout ma grande, habille toi tout de suite. Je t’emmène chez les gendarmes. Ça va pas se passer comme ça. Je préviens ta mère et on y va.


— Non, je préfère qu’elle ne sache pas tout de suite, laisse la se reposer. Je me souviens quand elle a appris l’agression il y a trois mois, elle était dans tous ses états. Par contre t’as raison, une visite chez les gendarmes est indispensable. À cause de la vidéo d’Enzo, le monde entier peut se foutre de ma gueule.


Marianne quitte ses vêtements de nuit, s’habille en vitesse et Viviane lui tend un masque. C’est le premier que met l’adolescente mais vu la situation sanitaire, elle se doute qu’il ne s’agit pas du dernier.

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4 commentaires

Leo Degal

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Il y a un mois

La situation dégénère, c'est terrible pour la pauvre Marianne.

Gottesmann Pascal

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Il y a un mois

Oui, quand elle croit avoir toucher le fond elle découvre qu'il y a pire.

Marie Andree

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Il y a 2 mois

Elles ont bien raison d'aller au commissariat ! Les réseaux sociaux c'est vraiment terrible pour les adolescents... 😒

Gottesmann Pascal

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Il y a 2 mois

Oui. Avant les moqueries et harcèlement ne dépassaient pas le cadre du quartier ou de l'établissement scolaire.
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