Gottesmann Pascal Bien sous tous rapports Seigneur pardonne moi

Seigneur pardonne moi


Quelques heures plus tard, à Lisognan, Clotilde n’arrive pas à dormir. Elle a pourtant bien besoin de sommeil pour se remettre de toutes ses émotions. En désespoir de cause, elle se met à prier. Depuis toute petite la prière lui a permis de s’apaiser. Ça lui avait servi pendant la nuit mouvementée de la veille où, avec ses enfants, elle avait imploré dans la voiture tous les saints du paradis de les protéger.


Rapidement les Mon Dieu protégez moi qui ressemblaient à ceux prononcés la veille deviennent des Seigneur pardonne moi parce que j’ai pêché. Elle se sent coupable, responsable de la situation dans laquelle elle a embarqué ses enfants, son frère et sa belle-sœur en prime. Elle aurait pu être forte et supporter l’épreuve qui lui était envoyée. Au lieu de ça elle a juste fui comme une lâche sans même dire un mot à celui qui partageait sa vie depuis presque vingt ans. Avec cette séparation elle a rompu le mariage, sacrément sacré au cours duquel elle s’était liée à Lionel devant Dieu. Il n’aurait du être rompu que par la mort. Son mari n’est pas fou, il lui faisait mal mais ne serait pas allé jusqu’à la tuer.


La voix de Clotilde qui, au départ, n’était qu’un murmure, se fait plus forte pour devenir presque un cri. Et elle est entendue par Stanislas qui passe devant la chambre de sa jeune sœur. Celui ci sait que Clotilde passe une nuit des plus agitées et a, plus que jamais, besoin de son soutien. Il tape trois petits coups à la porte et une voix affolée lui répond.


— Oui….qui est là ?


— C’est moi, Stanislas, répond-il en entrouvrant la porte. Je peux entrer ?


— Ah oui, bien sûr. Pardon, je t’ai réveillé ?


— Non, c’est une envie pressante qui m’a réveillé mais, en passant, devant ta porte, je t’ai entendue.


— Oui, je n’arrivais pas à dormir alors je priais.


— C’est normal de prier quand on a la foi mais ça l’est moins d’implorer pardon au bon Dieu quand on a rien fait de mal.


— Rien fait de mal, je suis partie comme une voleuse avec les petits, j’ai fait des centaines de kilomètres en plein confinement et j’ai laissé Marianne conduire. Tu crois que c’est pas assez pour demander pardon au seigneur ?


— Sauf que le seul responsable dans toute cette histoire c’est Lionel. Lui devrait demander pardon à Dieu mais, en ce moment je suis certain qu’il dort tranquillement.


— Qu’est ce que t’en sais, je suis sûre qu’il est mort d’inquiétude de me savoir loin de la maison avec les enfants. Ma place est à Rambunot, pas ici.


— Ta place est au milieu des coups et des insultes au quotidien ? Non Clotilde. T’aurais même du partir après la première scène violente. Personne n’a a subir ce que tu as surmonté. Il y a eu un seul moment où le Seigneur tout puissant a été présent à vos côtés, c’est quand Marianne vous a mené à bon port, Valentin et toi. Et puis, ici aussi il y a une belle paroisse catholique. Dès qu’on sera déconfiné, je te promet de te présenter au père Roger, c’est le curé d’ici et il est vraiment très bien. On l’a depuis plus de trente ans et on veut pas s’en séparer.


— Le prêtre barbu et plutôt gros ? je le connais déjà. Il a quand même baptisé et fait faire la première communion à mon neveu et mes deux nièces.


— Celui là même, il n’a pas coupé sa barbe et certainement pas minci au contraire. Même si, pour sa santé, je fais tout pour le convaincre de se mettre au régime. Mais à 70 ans passés il veut plus rien entendre


Clotilde sourit, il n’y avait que son frère qui puisse l’apaiser comme ça. Elle sent bientôt la main de Stanislas glisser dans ses cheveux, geste qu’il effectue depuis qu’elle toute petite. La prière ne suffisait pas pour se sentir apaisée et en sécurité, il lui fallait l’affection de son frère.


Sans rien savoir encore de la nuit tourmentée de sa mère, Marianne se réveille de bonne heure et croise Stanislas, qui est prêt à partir faire la tournée de ses malades. Viviane qui, comme tous les matins, s’est levée assez tôt pour tenir compagnie à son mari pendant le petit déjeuner. Après trente sept ans de mariage, ces deux là s’aiment comme au premier jour se dit l’adolescente. Après tous les couples ne sont pas forcément destinés à se déchirer comme celui de son père et de sa mère. Du moins, l’un des membres du couple n’est pas forcé à transformer l’autre en victime et ça la rassure sur sa vie sentimentale à venir.


Sur les coups de neuf heures du matin, Marianne est en train d’étudier pour pas perdre la main lors du retour au lycée quand elle reçoit le SMS de réponse d’Émilie Grangier. Celle ci lui demande s’il est possible qu’elles fassent un appel visio pour que ce soit dans les conditions d’une véritable interview. Marianne accepte et, voulant faire bonne impression, se maquille légèrement avant le rendez-vous prévu à dix heures du matin. Elle est surprise par sa tante dans la salle du bain.


— C’est ton petit frère Valentin que tu veux séduire en te faisant aussi jolie, dit Viviane en souriant.


— Non, j’ai un rendez-vous en visio dans quelques minutes avec la journaliste qui a rédigé l’article. Alors autant que je ne sois pas trop moche pour faire bonne impression.


— Moche ? T’es jolie comme un cœur ce qui n’est pas étonnant puisque tu es le portrait craché de ta mère. Mais, pour la journaliste, il va surtout falloir que tu sois convaincante et, pour ça aussi, je te fais confiance.


— J’espère réussir parce que, à l’heure qu’il est on passe tous les trois, avec Valentin, pour des privilégiés irresponsable. Enfin, en ce qui me concerne, on peut même me qualifier de criminelle.


— Je sais que t’as pas eu le choix ma chérie et que, en temps normal, tu es une fille responsable. Mais je connais cette journaliste de réputation et elle n’est pas excellente. Alors fais gaffe à ce que tu vas dire parce que, d’après ce que je sais, elle n’hésite pas à déformer des propos en les sortant de leur contexte. C’est même sa spécialité.


— Merci de m’avoir prévenue tata. Je suis étonnée que maman dorme toujours. C’est tellement peu dans ses habitudes de dormir tard, surtout qu’elle a déjà beaucoup dormi hier.


— Et bien moi, ça ne m’étonne pas du tout. Après ce que ta mère a vécu pendant un mois elle a besoin de décompresser et, pour ça, il n’y a rien de mieux que le sommeil. L’attitude de ton père a laissé des séquelles psychologiques chez elle et c’est bien compréhensible. Stanislas a même du la calmer cette nuit parce qu’elle n’arrivait pas à dormir. Elle en arrivait même à se sentir coupable de la situation et à demander pardon à Dieu. T’as bien fait de te charger de l’interview parce que supporter cette journaliste teigneuse aurait certainement été au dessus de ses forces.

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12 commentaires

Leo Degal

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Il y a un mois

Interview avec une mineure, elle a intérêt à se tenir la journaliste !

Gottesmann Pascal

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Il y a un mois

C'est pas son intention.

Eva Boh & Le Mas de Gaïa

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Il y a 2 mois

Il ne faudrait pas que sa foi lui fasse faire demi-tour. J'ai un peu peur pour l'interview...

Gottesmann Pascal

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Il y a 2 mois

Tu peux craindre dans les deux cas.

Marie Andree

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Il y a 2 mois

Pauvre Clothilde, c'est pas facile de laisser de côté ses croyances et son éducation... 😢

Gottesmann Pascal

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Il y a 2 mois

Ce qui a fait toute sa vie oui.

Carl K. Lawson

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Il y a 2 mois

😉🌹

Vana Aim

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Il y a 2 mois

❤️
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