Fyctia
Chapitre dix 2/3
Helena
— Alors ça, c'est non ! Je ne me suis pas démenée pour que tu foutes tout en l'air sur ton visage.
— Mais c'est juste une banane, m’étonné-je. Je te signale que je n'ai rien mangé de la journée.
Elle s'apprête à répliquer, mais la voix étouffée de Bianca l'interrompt. Je retourne le portable pour faire de nouveau face à cette belle brune.
— Que se passe-t-il ? demande-t-elle.
— Notre très chère Helena, s’empresse-t-elle de répondre en s’affalant sur le canapé, a cru qu'elle pourrait dévorer une banane et gâcher le rouge à lèvres que je lui ai mis, alors qu'elle en bouffera sûrement une autre.
— MAXINE !
— Oh, dios mios ! Estás loco.
— Je ne suis pas folle, répliqué-je. J'ai seulement faim.
— Ce n'est pas comme si elle allait manger au restaurant bientôt, renchérit Maxine.
Les filles s’emploient à débattre sur ce que j'ai le droit de grignoter ou non et à l'unanimité, on me refuse le privilège de remplir mon estomac ; tout ça parce que je m'apprête à dîner dans moins d'une heure. Mais un ventre vide me fout de très mauvaise humeur. À leurs risques et périls.
— Bon ! clame ma meilleure amie. Il est temps que tu te rendes là-bas.
— Tu as raison, il est…
— Ah non non non ! s’empresse de rétorquer Bianca. Paupiette n'a pas fini de me raconter l'histoire de mon cousin.
Il y a tant de paroles que je voudrais lui dire, toutefois, cela risquerait d'être bien long et nous prendrait toute la soirée. Tellement de choses se sont passées même si seulement quelques minutes se sont écoulées. Après la bataille que j'ai gagnée, il s'est déroulé d'autres péripéties, des péripéties qu'elle souhaite sans doute entendre.
Trevor, comme à son habitude, a joué de sa réputation, mais aussi de son rang à la fraternité. Les Alpha Delta Psi sont les frères les plus considérés de l'État. Il existe plusieurs universités, qui elles-mêmes ont divers clans qui se mélangent avec les sororités, alors il y a forcément un classement de toutes ces maisons. On se croirait presque dans Harry Potter, et je suis sûre que les Alphas seraient serpentard ; la meilleure maison à mes yeux.
Quand je me suis extirpée de la bibliothèque, je ne l'ai pas seulement nargué avant de rentrer chez moi, je l'ai également espionné jusqu'à ce qu'il aille nettoyer son casier. Au lieu qu'il exécute ce que je pensais, ses pas l’ont conduit droit vers les scientifiques. Quelques paroles échangées, des gestes de bras dans les airs, et les membres sont ressortis pour aller récupérer de quoi laver. Ils ont fait le larbin pour lui, même si c'est leur bombe qui a causé tout ce fiasco. Ils auraient pu me faire porter le chapeau, car c'est moi qui ai abouti à tout ce désastre, ils n'en ont cependant rien réalisé.
Si nous vivions au temps des rois, il serait passé pour gouverner son peuple. Je suis même sûre qu'il en ferait décapiter plus d’un. Si ce n'est pas la sienne qui le serait.
— Il y a eu une explosion. Elle s’est enfuie d’un barbapapa mexicain en jouant à cache-cache dans la bibliothèque, puis elle est rentrée. Bisou, on t’aime.
Elle finit sa phrase en raccrochant. Je la regarde choquée par son geste – à croire qu’elle ne connaît plus si bien Bianca qui risque de lui arracher son doigt pour un tel acte – tout en l’observant se lever. Elle retourne un instant dans sa chambre puis revient avec une paire de talons. Je secoue rapidement la tête en objectant de porter des escarpins. Je ne vais pas dans un restaurant de luxe, personne ne sera apprêtée comme moi. Je veux pouvoir le charmer, pas me ridiculiser.
— Je vais opter pour les Converses basses et blanches, dis-je en quittant le canapé.
— Mais ils sont bien…
— Il n’y a pas de, mais ! opiné-je en me plaçant face à elle. Ce seront ces tennis et rien d’autre, c’est clair ? Sinon, je passe ma soirée devant les Simpson.
Un large sourire rempli de malice étire son visage. Le menton relevé, les paumes sur les hanches, elle réplique :
— Et depuis quand tu regardes les Simpson sans Trevor.
Une pointe se forme dans mon cœur, que je balaie aussitôt.
— Depuis qu'il a quitté ma vie.
Je récupère mes chaussures puis les enfile en m'asseyant sur la chaise.
— En plus, j'ai regardé la nouvelle saison sans lui, mens-je.
Je n'ai pas rallumé ma télé depuis belle lurette ; et j'ai encore moins visionné cette série depuis la dernière fois que je l'ai fait avec lui. Je passe mon temps à sortir, à lire des bouquins par-ci par-là que Maxine me prête de temps à autre, ou je profite sans effort de mon balcon pour bronzer. Mais avec les températures qui ont légèrement chuté, je ne suis pas prête à prendre des couleurs ; malheureusement pour moi.
— Je refuse de te croire ! riposte-t-elle depuis sa cuisine. C'est comme si tu me disais que tu partageais ton bol de Mac and cheese avec une autre personne que Trevor.
Un rituel qui n'est plus d'actualité.
Je me relève et jette un coup d'œil dans mon reflet depuis le miroir sur pied à ma droite. C'est parfait.
— Il y a bien longtemps que je n'en ai plus mangé, et les boulettes de la pizzeria ne comptent pas. On devrait se refaire un restaurant toutes les deux, un de ces jours.
Elle acquiesce aussitôt.
— Il va falloir attendre début novembre pour qu’Angel rouvre son restaurant.
— Ah ? Il est fermé ?
Elle hausse les épaules. Maxine n’en sait pas plus que moi.
Elle se replace devant moi et réajuste les quelques mèches qui viennent barrer mon visage. Elle passe ensuite ses paumes sur ma robe pour s'assurer qu'il n'y ait aucun pli. Bretelle parfaitement mise, décolleté assez dévoilé à son goût, sac à main entre mes doigts, elle valide ma présentation d'un pouce levé.
— Tu es parfaite, Helena, s’enthousiasme-t-elle. S'il ne tombe pas amoureux, alors c'est qu'il est gay.
Je ne peux m'empêcher de rire en soupirant d’aise. Cette fille qualifie les hommes hétéros seulement s'ils ont le béguin pour moi, ou qu'il me trouve bien assez jolie. Dori est l’exception à la règle, étant donné qu’elle se le tape, même si elle ne veut pas me l’avouer. Mais j’arriverai à lui faire cracher le morceau un jour.
Je jette un rapide coup d'œil à ma montre et me rends compte que je dois y être dans un quart d'heure. J'ai environ dix minutes de marche, ce qui me laisse une marge de cinq minutes. Je ne suis pas encore certaine si cette personne est plutôt du genre à être à l’heure ou en retard. Cependant, j’ai horreur d’arriver à la bourre, sauf pour les occasions spéciales.
— Bon, je dois filer, Fifi.
— Ah non, ne t'y mets pas toi aussi ! râle-t-elle. Je n'aime pas quand Dori me surnomme Fifi brindacier, tout ça parce que je suis rousse.
Je dépose un rapide baiser sur sa joue, amusée par sa réaction qui la rend bien plus mignonne qu'elle ne l'est déjà, puis quitte l'appartement. Le plus gros est fait, alors maintenant, il ne me reste plus qu'à user de mon charme par mes paroles. Et surtout, les autres étudiants doivent me voir à ses côtés, plus heureuse que jamais. Mon plan a intérêt de marcher.
3 commentaires
L.ludivine
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Il y a 2 mois
Alyssa Well
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Il y a 2 mois
DIANA BOHRHAUER
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Il y a 2 mois