Fyctia
Chapitre neuf 3/3
Trevor
Ses tennis dérapent sur la moquette beige. Elle sprinte aussi vite qu'elle le peut jusqu'à la porte d'entrée. Je ne perds pas un seul instant pour en faire de même et donne toute l'énergie que j'ai dans cette course effrénée, malgré la peinture qui me démange de plus en plus sur la peau. À mesure qu'elle progresse, son parfum vanillé plane dans l'air pour venir fouetter le bout de mes narines. Je fais abstraction de ce doux effluve pour me concentrer sur la vengeance que je veux lui infliger lorsque mes doigts encercleront son bras. Cependant, alors que je m'apprête à tendre la main pour la saisir, elle pousse la porte pour l’outrepasser et me la claque au nez. J'entame d'en faire de même, toutefois, je me retrouve face à un mur. L’entrée ne s'ouvre pas, aucun clic n'a retenti pour m'informer qu'elle venait de fermer à clé. Elle me lance un sourire malicieux, fière d'avoir bloqué la sortie avant même que je ne franchisse le seuil de la bibliothèque. Ses yeux perçants m'observent avec un grand désir de me voir dans une telle position. Si je me fais choper par l'une des personnes du rectorat, je risque d'avoir de gros soucis et c'est exactement ce qu'elle souhaite.
— Eh bien alors, Trevor ? On a l'air fâché, prononce-t-elle assez fort pour que je puisse l’entendre de l’autre côté du petit carré vitré, qui nous sépare.
— Je te conseille d'ouvrir cette porte si tu ne veux pas le regretter.
Mes yeux observent un instant les taches de rousseur qui parsèment son doux visage avant de remonter dans ses iris.
— Oulala, j’ai peur, raille-t-elle. Et que va faire peppa pig ? Me mettre une fessée ? Tout ça parce que je t’ai rendu la monnaie de ta pièce.
Je me retiens de sourire, tout de même amusé par ce qu'elle me réplique. Peu de femmes, voire aucune si ce n'est-elle, ne daignent me tenir tête. J'ai toujours eu l'habitude de les avoir sur mes genoux, sur les leurs, à quatre pattes, ou même juste en train de battre des cils. Tandis qu’elle, elle m'envoie paître d'une façon plutôt polie.
— Si tu veux que je te mette ta fessée, tu n'as qu'à ouvrir et ton vœu sera exaucé.
Elle arque un sourcil, la tête penchée, en se mordillant la lèvre inférieure. Sa longue chevelure dorée chute en cascade sur sa poitrine, vêtue d'un haut noir aux manches tombant sur ses bas.
— Et pourquoi tu ne demanderais pas à Clarisse ? Cela la tenterait peut-être, puisque vous semblez proche. Non ?
Je vois cette lueur étrange prendre place dans son regard à la mention de cette sœur.
Je me rapproche un peu plus de la vitre pour n'être qu'à quelques millimètres du plexiglas. Helena en réalise de même comme si elle comprenait que je l'invite à réitérer la manœuvre.
— Serais-tu jalouse ?
Un rire nasal lui échappe.
— Pas le moins du monde. De toute façon, je te laisse t'amuser avec ce genre de fille si c'est ce qui t'attire. Moi, en tout cas, je sais que je vaux mieux qu'elle. Je ne drague pas plusieurs mecs dans une même soirée, pour finalement finir avec le premier.
Elle est jalouse, c'est certain. Son petit nez en trompette se retrousse à chaque fois qu'un mensonge glisse entre ses lèvres rosées.
— Si tu avais été un mec, je t'aurais dit de la laisser te faire une fellation, parce que bordel, qu'est-ce qu'elle sait y faire !
Son front se plisse instantanément, tandis que ses pupilles s'assombrissent, puis tout à coup… Un sourire ?
— J'espère que la peinture te laissera des rougeurs sur ton teint, car, après ça, bonne chance pour trouver des plans cul avec le micro pénis que tu as ! Au revoir Trevor.
Je ne peux m'empêcher de rire devant de tels propos. Même après tant d'années à se côtoyer, elle n'a jamais fait de référence à mon sexe sans même l'avoir vue ou l'avoir senti entre ses cuisses. Parce que le jour où ça arrivera, elle regrettera amèrement ses paroles.
Je la regarde s'éloigner dans le couloir jusqu'à ce qu'elle disparaisse de mon champ de vision. Je tente à nouveau de forcer la porte, mais rien à faire, elle est fermée. Les fenêtres sont barricadées et elles ne peuvent s’inaugurer que depuis le sommet. Cependant, leur hauteur est bien trop importante pour que je me risque à y passer. Je n'ai pas mon portable bien évidemment, sinon ce serait trop beau. Je me laisse donc glisser contre la paroi d'une bibliothèque à proximité et je patiente.
Dix minutes plus tard, Dori vient enfin m’ouvrir. Il ne peut s'empêcher d'éclater d'amusement devant mon état. La peinture a séché. Chaque mouvement ou grimace que je produis effrite le liquide rose qui tombe comme une neige sur la moquette.
— Tu verrais la tronche que tu as, tu dirais que ça valait le coup de prendre cette bombe de peinture.
Je serre la mâchoire et contracte les poings que j'engouffre dans les poches de mon sweat-shirt tout en me relevant.
— Tu me fais trop penser à Barbapapa version Mexicain ! Ça existe chez toi ? se moque-t-il à nouveau.
Je passe près de lui en lui flanquant un cou d'épaule dans la sienne. Je préfère ne rien répondre au risque de l'envoyer chier, et il le sait. Pourtant, il ne manque pas une seule seconde pour perdurer ses vannes à deux balles. Je suis sûr d'une chose dans cette connerie, cela risque de continuer jusqu'à la fin de la journée, ou du moins, jusqu'au moment où je pourrais rentrer et me nettoyer.
Helena vient peut-être de gagner cette manche, mais j'ai toujours un point d'avance ; mais plus pour longtemps.
Trevor 3. Helena 2.
5 commentaires
L.ludivine
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Il y a 2 mois
Alexandra ROCH
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Il y a 2 mois
Renée Vignal
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Il y a 2 mois
IvyC
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Il y a 2 mois
DIANA BOHRHAUER
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Il y a 2 mois