Fyctia

Trevor

Dori est le premier à se lever, après avoir englouti son troisième pancake, puis clame qu’il est l’heure de se rendre à l’université. Nous devons commencer par un cours de sport, bien que certains d’entre nous ne fassent pas partie de l’équipe.

— Oh pire, je fais croire que je suis malade, se lamente Omar, d’un air trop comédien. Je dirais que mon plat est mal passé.

— Allé, Omar ! Va perdre la graisse que tu accumules dans ton cul à cause des pizzas aux champignons, pique Chad. Moi, je penserai à toi en matant un petit film de boules avant le boulot.

Notre ami se lève aussitôt pour se jeter sur lui, sous notre regard amusé, avant de frotter ses phalanges dans sa touffe de cheveux, qui, comme le concerné, lui retombent sur le front. Les autres membres qui s’apprêtent à quitter les lieux se distraient du spectacle pendant que je les contourne pour rejoindre le pick-up d’Omar. Dori me suit en même temps, tout en me tapotant le dos. Une manière à lui de me souhaiter bonne chance avec la démone que je suis sur le point de retrouver après autant de temps. Je suis l’homme le plus suicidaire du pays, impossible de rivaliser.

— Je suis sûr que ça va bien se passer, me sourit-il. Helena n’est pas du genre rancunière.

Si tu savais, mon pote.

* * *

Le bruit de nos tennis sur le bois franc de la salle de sport résonne dans l’air qui se prend de nombreux coups de sifflet. L’avantage avec le basket, c’est que nous sommes protégés, bien que la clim soit manquante dans les lieux. Même s’il y en avait une, ce n’est pas avec nos échauffements intensifs qu’on ressentirait une quelconque brise fraîche. À chaque fois que le coach souffle dans son arme à la couleur pétante, nous devons sprinter de notre point de départ – sous le filet – à un autre qui est à l’opposé. Des longueurs qui s’ajoutent à des sauts, voilà sa manière de nous préparer à mettre des paniers. S’il y a bien une chose à laquelle je suis reconnaissant, c’est de ne pas avoir accepté de postuler pour être capitaine ou membre ; j’ai laissé ce merdier à Dori. S’il mène son équipe à la finale, il aura de fortes chances d’être recruté par les plus grands experts qui possèdent les meilleurs clubs du continent. C’est tout ce que je lui souhaite, parce qu’il le mérite. Les Glorious Alphas ne sont rien sans lui. Il est le joueur le plus imbattable ; toutes générations confondues.

— T’es… T’es sûr que tu veux… bordel, tente-t-il d’articuler entre chaque course. Rejoins l’équipe.

Je secoue la tête.

— Hors. De. Question. Je chéris trop mes vendredis soir pour… compétiter avec les universités alentour.

— Allez, bande de feignants ! On se bouge ! hurle le coach.

On donne tout sur la dernière ligne droite. Mes jambes me font atrocement souffrir, mais je ne m’arrête pas, je garde le rythme. Bien que je ne veuille pas le poste de Dori, j’aime être meilleur que lui sur l’endurance ; moment que nous embrassons tous les deux à cœur, et le sourire triomphant qu’il me lance en me distançant en déclare bien assez.

Le sifflet retentit à deux reprises. L’échauffement est terminé.

— Il y a bien mieux à foutre, dis-je, le souffle coupé. Du moins, pour moi.

Ma poitrine m’est si douloureuse, ma gorge s’assèche trop rapidement, tandis que mon pouls bat aussi vite qu’une course de voitures. Bordel.

Alors que je m’apprête à demander à mon pote, comment est-ce qu’il parvient à supporter ça chaque après-midi, il me devance avec son coude qui me flanque un coup dans le bras.

— Il y a ta petite amie qui arrive, ricane-t-il. Je crois que t’es dans la merde, parce qu’elle semble furieuse.

Il s’éloigne le plus promptement possible de la bombe qui est sur le point d’exploser, en même temps que je me retourne. Je la découvre dans son jean qui moule ses jambes élancées, ainsi que son débardeur noir. Elle fonce droit vers moi à une vitesse qui laisse son blond polaire, rebondir sur son crâne. Son regard perçant s'obscurcit et des éclairs en jaillissent. Elle est en colère.

Fait chier.