Fyctia
Dans mes souvenirs
Il n'en a pas toujours été ainsi. Je ne suis pas née esclave, je le suis devenue.
J'ai vu le jour dans l'une des chambres de la maternité de Nantes, et j'ai passé mon enfance dans un village non loin de là. J'ai grandi dans une petite maison de campagne que mes parents étaient parvenus à acheter après avoir économisé pendant des années. Elle n'avait rien de particulier, mais je l'adorais. Au rez-de-chaussée, il y avait la cuisine ouverte sur un grand salon dans lequel j'ai passé d'innombrables heures à jouer avec mes parents : aux cow-boys et aux indiens ; à saute-mouton ; à la poupée ; au Cluedo ; au Monopoly. Au premier étage se trouvaient nos chambres et notre salle de bain. Ma mère et moi y avons passé des heures, installées devant le miroir, elle tentant inlassablement de dompter mes boucles rousses, moi la regardant faire en riant. Ce petit espace confiné a longtemps été le témoin silencieux de nos confidences. Nous avions aussi un petit terrain dans lequel mon père entretenait un potager qui nous offrait chaque année des superbes salades, des tomates aussi grosses qu'un poing fermé, ainsi que d'immenses courgettes. Enfant, ces légumes me fascinaient, et je m'imaginais souvent être la sœur de Jack et son haricot magique. Combien d'heures ai-je passé à regarder Dame Nature effectuer ses merveilles en me racontant des histoires d'ogres et de trésors ! Ce petit espace vert a aussi été le théâtre de jeux interminables, de nuits passées à la belle étoile et de desserts gourmands constitués de marshmallows grillés.
Bien sûr, j'ai été à l'école. Je me souviens encore de l'odeur de mes cahiers quand je les ouvrais pour y prendre des notes. Je me souviens de certaines de mes maîtresses, qui m'ont appris à lire, à écrire et compter avec tendresse et passion. Je me souviens de mon arrivée au collège, de la boule qui me tordait les boyaux le premier jour. Je me souviens aussi des cours, ceux que j'ai adorés, ceux que j'ai détestés. Je me souviens du brevet, de la montagne qu'on nous en faisait pour nous pousser à donner le meilleur de nous-même le moment venu.
Je me souviens de mon premier vrai baiser, de mon premier amour, vécu en douce dans la cour du collège. Je me souviens de mon arrivée au lycée, du bac.
De ma première fois.
Je me souviens de mon entrée en fac de médecine. L'horreur de la première année, la quantité astronomique de travail que j'ai eue au cours de mes dix années de fac. Je me souviens de mes amis, Clara, Anaïs, Timothée, Ludovic et Charly. Je me souviens des quelques garçons qui ont fait chavirer mon cœur le temps d'un été. Ceux avec qui j'allais au cinéma, à la fête foraine. Ceux qui m'emmenaient chez eux en l'absence de leurs parents.
J'étais jeune, insouciante, et je croquais la vie à pleine dent. Tout comme ces milliers d'autres ados, je me croyais éternelle.
Et puis la France a basculé dans le chaos.
40 commentaires
Sabrina A. Jia
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Il y a 3 ans
Laeloo
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Il y a 3 ans
Babsoje
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Il y a 3 ans
Laeloo
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cedemro
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Laeloo
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La Plume d'Ellen
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Christopher Llord
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Il y a 3 ans
Laeloo
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Il y a 3 ans