Alice5474! Au Bord du Vide Rupture 2.1

Rupture 2.1


26 septembre 2026, Appartement d'Alex, 12h50


Je ne comprenais plus comment la situation n’avait pas encore basculé dans l’abîme. C’était comme si je me trouvais au bord d’un précipice, juste à l’instant où il ne reste plus qu’un souffle avant de tomber dans l’inconnu, mais que, curieusement, je n’arrivais pas à franchir la frontière. Chaque geste, chaque pensée, semblait suspendu dans l’air lourd du non-dit. C’était comme si la folie m’effleurait, me caressait, me murmurait dans l’ombre que je pouvais y plonger à tout moment. Mais pire encore, il y avait ce silence. Ce vide oppressant. Isaac. Chaque fois que je le croisais, c'était comme si l’espace autour de nous devenait gelé, vide de sens, de paroles. Le monde, en quelque sorte, avait cessé de m’envelopper. Nous ne nous parlions plus. Pas un mot. Pas un regard. Juste ce silence lourd qui en disait plus que mille mots.


Les victimes, elles aussi, avaient disparu dans ce silence. Amanda, Camille... Et d’autres encore. Leur absence me hantait. Il n’y avait plus rien. Plus aucune trace. La disparition de ces femmes était un vide que rien ne semblait pouvoir combler, comme un trou noir dans ma tête. Mais au fond de moi, une idée – une idée qui m’obsédait – germait lentement. J'avais rassemblé les fragments. Les profils. Les traces laissées. Toutes ces victimes avaient un lien avec Isaac, un lien qui n’était pas anodin. Elles le suivaient sur ses réseaux sociaux, ok, ça ne semblait pas surprenant. Après tout, il était célèbre, très suivi. Mais... Lui les suivait aussi. Lui. Et ça, c’était dérangeant. Il n’avait que très peu d’abonnés. Pourquoi suivre ces femmes ? Pourquoi ? Est-ce que ça voulait dire quelque chose ? Je n’arrivais pas à l’ignorer. Ça me torturait. Je me rapprochais lentement, presque imperceptiblement, des victimes. Grâce à mes recherches, à mes fouilles dans les vies de ces femmes. Et plus je m’y plongeais, plus une certitude s’installait en moi. Le tueur n’était pas un simple inconnu. Il était là, tout près. Et quelque chose me disait que... je pourrais bien être la prochaine.


La vibration du téléphone me fit sursauter, brisant le calme lourd de la pièce. Je le saisis presque machinalement, sans regarder l’écran, mes doigts tremblants effleurant les touches.


- Salut, je suis Théa, c’est Alice.


Une voix féminine, légèrement aiguë, me fit l'effet d’un couperet. Je sentis mon cœur se serrer.


- Euh... Oui, on se connaît ? demandai-je, ma méfiance perçant dans chaque mot.

- Je suis une amie d’Amanda, c’est Cindy du standard de l'entreprise qui m’a passé ton numéro après vos échanges la semaine dernière, pendant la pause, me dit-elle. Tu voulais avoir des informations ?


Je me pinçai les lèvres. C’était étrange, de parler à quelqu’un qui connaissait Amanda. Une amie. Une amie qui pourrait m’aider à comprendre.


- Ah... oui, déjà, je suis désolée pour la perte de ton amie. Ensuite, je voulais savoir si tu savais qui pourrait être ce tueur, et si elle avait des ennemis, demandai-je, tentant de garder une certaine distance, une certaine retenue.

- Pas à ma connaissance, elle était une simple stagiaire dans l’entreprise, et surtout, Amanda n’avait pas de mauvaises fréquentations... avoua Théa, une hésitation à peine perceptible dans sa voix.


Je hochai la tête instinctivement, comme pour confirmer ce qu’elle venait de dire, même si elle ne pouvait pas me voir. Mais une question brûlait mes lèvres, je ne pouvais pas la retenir plus longtemps.


- Elle connaissait Isaac ? demandai-je, la voix légèrement tremblante, incertaine.

- Isaac, le youtubeur ? Oui, elle me parlait de lui. Il était gentil avec elle pendant le stage. Ils sortaient souvent ensemble au restaurant ou autre. Mais rien de plus à ma connaissance, dit Théa, sa voix s’éteignant dans une légère vibration.


Les mots résonnaient dans ma tête. "Rien de plus." Je n’étais pas convaincue. Pas du tout. Il y avait quelque chose d'autre, quelque chose qu’elle n’osait pas dire. Quelque chose que je devais comprendre.


- Il n’y a rien eu de particulier ? Une dispute ? Un événement marquant ? demandai-je, ma voix presque inaudible, comme si j’avais peur de découvrir la vérité.

- Non... enfin... maintenant que tu me le dis, quelques semaines avant sa mort, elle est revenue en pleurs. Elle était... différente. Mais je pensais que c’était dû à son stage qui se passait de plus en plus mal, dit-elle, le ton de sa voix s’éteignant presque dans un soupir étouffé.


Une vague glacée me traversa. Quelque chose ne collait pas. Quelque chose m’échappait. Je pouvais presque l’entendre, cette vérité qui se dérobait sous le poids des non-dits.


- Et ce stage a commencé à se passer mal d’un coup ? demandai-je, pressant, accrochée à la moindre parcelle de vérité.

- Je... écoute, je suis désolée, je vais devoir te laisser, dit-elle précipitamment, avant de raccrocher brutalement.


Le silence s’abattit sur moi, lourd et suffocant. Mes pensées tourbillonnaient dans ma tête, s’entrechoquant comme des vagues déchaînées. Il y avait encore trop de zones d’ombre, trop de questions sans réponse. Et l’ombre du tueur… elle était toujours là, tapie, prête à frapper.


Et plus je réfléchissais, plus cela me menait à Isaac. Il était là, au centre de tout, dans mes pensées, dans les ombres des questions sans réponses. Je devais absolument savoir si les autres femmes mortes avaient un lien direct avec lui. Mais il y avait quelque chose de plus dérangeant, quelque chose que je n’arrivais pas à ignorer : son indifférence face au meurtre. Ce vide dans ses yeux, ce manque d’empathie... Une froideur inquiétante. Et ce lien avec l’une des victimes... était-ce simplement une coïncidence ? Une simple rencontre parmi tant d'autres, ou bien quelque chose de plus sombre, de plus intime ?


Je me sentais prise dans une toile invisible, chaque réponse me faisant avancer, mais chaque pas me menant aussi plus près du gouffre. Isaac n’était plus un simple individu, un nom parmi tant d’autres. Non, il était la clé. La clé de tout ce qui se passait. Mais quoi comprendre de son silence ? Pourquoi rester aussi détaché face à la mort de ces femmes ? Ce n’était pas normal. Il y avait quelque chose que je ne voyais pas encore, quelque chose qui m’échappait. Mais l’idée de le confronter, de briser ce silence glacé, me terrifiait. Et si j’étais en train de toucher quelque chose de bien plus grand que ce que je pouvais imaginer ? Et si, moi aussi, j’étais une pièce de ce puzzle macabre ?

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