Fyctia
Le début
1 an plutôt, novembre 2025, Paris, 11ème arrondissement
La neige tombait lentement, recouvrant le trottoir d'un voile de glace. Les réverbères, vacillants dans la brume, donnaient à l’atmosphère une sensation étrange, presque trop paisible. Mon pied s’enfonçait dans la neige, un crissement sinistre résonnant à chaque pas, comme si le silence lourd de la nuit avait été brisé. Je me surprenais à sourire, une brève lueur d’innocence, en repensant à ces hivers de mon enfance. Des souvenirs que je n’aurais jamais dû raviver.
Les hivers dans le village, là où mes parents vivaient, m'avaient toujours paru figés dans un décor irréel, un monde à part. Mais ces souvenirs étaient teintés d’histoires chuchotées à voix basse autour du feu, d’ombres qui se glissaient entre les arbres de la forêt voisine. Ces mêmes forêts que je pensais connaître si bien, et pourtant, à chaque hiver, elles m’apparaissaient un peu plus menaçantes. Des cauchemars revenaient chaque nuit, m’étouffant de leur froideur, de leur insistance.
Pourtant, j’avais appris à ne pas céder à ces superstitions qui n’étaient que des murmures dans le vent. Je refusais de laisser la peur me submerger, convaincue que tout ça n’était qu’un mélange d’histoires inventées, destinées à effrayer les esprits faibles. Ni l'ombre d'un grand méchant loup, ni celle d’un homme étrange rôdant dans les bois n'avaient de prise sur moi. Peut-être parce que mon père, toujours si rationnel, m'avait appris à garder un esprit clair, même dans les situations les plus sombres. Il répétait souvent que la peur n'était qu'une illusion, une projection de nos propres angoisses.
Mais ce soir-là, en marchant dans cette neige tombante, une sensation étrange m'envahissait. Comme si la réalité elle-même se dérobait sous mes pieds. Comme si tout ce que j’avais toujours cru n’était qu’un mirage, et que le pire n'était pas derrière moi, mais bien en train de se glisser dans les ombres autour de moi. Et, pour la première fois depuis longtemps, je me surprenais à douter de tout ce que j'avais appris à considérer comme certain.
En franchissant la porte du petit immeuble où j'avais trouvé refuge ces derniers mois, un soupir m'échappa, une réaction presque automatique face à la chaleur qui me frappait, en contraste brutal avec le froid mordant dehors. Je me déplaçais machinalement, absorbée par ma routine. Pourtant, ce soir, il y avait quelque chose qui me dérangeait, un malaise insidieux, une pensée persistante qui me chatouillait l'esprit. Je tentais de la repousser, mais elle revenait, plus tenace à chaque instant.
Je n'arrivais pas à me concentrer, même en allumant une bougie à l'odeur sucrée de cerise qui emplissait lentement mon salon. L'atmosphère douce et réconfortante semblait me mentir, en décalage avec la lourdeur qui pesait sur moi. Après plusieurs minutes d'errance mentale, je consultai mes mails, me forçant à rester présente, malgré ce malaise qui me collait à la peau.
Un message attira soudainement mon attention. Je cliquai sans réfléchir. Une réponse positive. Un poste de réceptionniste dans une société digitale. Cela semblait tellement éloigné de ce pour quoi j'avais été formée, mais la curiosité me poussa à lire les détails. L'offre était pour un contrat d’un an, exactement ce que je recherchais. Bien payé, sans pression apparente, un job qui semblait facile, presque trop parfait pour être réel.
Pourtant, si je voulais vraiment partir à l'étranger et poursuivre ma passion, je devais économiser, trouver une solution rapide. Ce poste, aussi éloigné de mes aspirations qu’il puisse sembler, pourrait être un tremplin. Instinctivement, mes doigts glissèrent sur le clavier et, avant même d’y réfléchir plus longtemps, j'avais répondu positivement à la proposition de rencontre prévue le lendemain après-midi. Une chance comme celle-ci ne se présentait pas tous les jours, et même si quelque chose en moi me criait que cela n'était pas aussi simple qu’il n’y paraissait, l'option semblait trop séduisante pour être ignorée.
Je soufflai un peu, me levant pour m’étirer, espérant chasser cette sensation de malaise. Mais en levant les yeux, quelque chose attira mon attention. Un corbeau. Il était perché sur le balcon de mon salon, observant fixement à travers la vitre. Un frisson parcourut ma colonne vertébrale. Les vieux contes revenaient en force dans ma tête : un corbeau sur le seuil, symbole de mauvais présage, de malchance, de mort. Je voulais le chasser, mais quelque chose me cloua sur place. C’était comme si le regard de l’oiseau me pénétrait, comme s’il attendait que je fasse le premier mouvement. Un frisson d’inquiétude m’envahit.
Je fermai les yeux un instant, me forçant à rationaliser. Ce n’était qu’un oiseau, rien de plus. Mais l’air de la pièce, soudainement lourd, me dit autre chose. Et cette pensée, cette petite voix qui murmurait au fond de moi, se fit de plus en plus insistante : Et si, cette fois, ce n’était pas une simple coïncidence ?
6 commentaires
Ava D.SKY
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Il y a un mois
Alice5474!
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Il y a un mois
Dine79
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Il y a 2 mois
Alice5474!
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Il y a 2 mois