Fyctia
Coeurs brisés P1
Les presque onze heures de sommeil que s’est octroyé Jenna n’ont pas arrangé son état émotionnel. Lorsqu’elle se lève le vendredi vers dix heures, elle se sent vide et déprimée. En plus, il faut que je me coltine Phil ce week-end et que je fasse semblant d’aller bien, gémit-elle intérieurement. Pour une fois, j’aurais bien aimé avoir une excuse pour rentrer chez mes parents… Quoique… si c’est pour que ma mère me prenne la tête pour savoir ce que j’ai… Mouais, au moins ce qui est bien avec Phil, c’est qu’il ne fait pas assez attention à moi pour se rendre compte que je suis déprimée. Putain, ma vie est vraiment une fête ! Enfin, c’est la vie et elle est moche, comme je le dis toujours.
Ruminant ces tristes constats, Jenna se traîne sous la douche et se prépare pour le centre. Elle commence à treize heures et doit travailler tout l’après-midi. Une perspective qu’elle envisage sans enthousiasme, cependant il faut bien manger.
***
Le travail change les idées de Jenna : les enfants dont elle s’occupe ont tous moins de six ans et, par conséquent, ils ne cessent de réclamer son attention. La nécessité de devoir se concentrer l’aide à mettre de côté son chagrin pendant quelques heures. Lorsque Phil la récupère le soir, elle plaque un sourire sur ses lèvres même si son cœur demeure aussi lourd qu’une pierre. Comme elle l’a anticipé, Phil ne se rend compte de rien et ils passent une soirée banale devant la télé avant de sacrifier au rituel devoir conjugal.
***
Le lendemain, Phil offre le cinéma à Jenna. Même si 28 jours plus tard est une vraie réussite, Jenna peine à se concentrer sur les zombies et autres virus. Son esprit la ramène sans cesse vers Kristian et leur mortelle conversation. Arrête d’y penser ! s’ordonne-t-elle mentalement. De toute manière, tu auras beau retourner le truc dans ta tête encore et encore, tu n’y changeras rien. Une bonne fée ne va pas apparaître et faire en sorte que Kristian t’aime. Concentre-toi sur le moment présent et sur le film. Pour la suite, on verra. Carpe diem. Demain est un autre jour, comme dirait Scarlett.
***
De retour chez Phil, Jenna s’offre une razzia à la bibliothèque. Exit les romans d’amour sirupeux, place aux thrillers et aux policiers. Elle opte pour un nouvel auteur, un certain Maxime Chattam dont la quatrième de couverture promet un moment sanglant de lecture. Elle choisit également quelques Graham Masterton, un auteur que Kristian et elle apprécient, tandis que Phil erre sans conviction dans les rayonnages.
— Oh, ils ont des Fluide Glacial ! remarque-t-il.
Jenna réprime un soupir. Lire un magazine ou une bande-dessinée, c’est déjà mieux que de ne pas lire du tout, se rappelle-t-elle. Au moins, tant qu’il sera sur son truc, il me foutra la paix une heure — enfin plutôt deux, vu qu’il lit à la vitesse d’une limace. Ce raisonnement fait, elle propose à Phil d’emprunter le magazine sur son abonnement.
— Tu peux même en prendre deux, si tu veux, ajoute-t-elle.
Le plein de bouquins faits, ils rentrent chez Phil et se préparent pour une énième soirée en compagnie des Bretons, Ben, Georges et Pascal. Au vu des mises en garde de Diana un peu plus tôt dans la semaine, Jenna appréhende un peu… Il faut que je fasse gaffe de ne pas trop boire, parce que déjà que je n’ai pas le moral, il ne manquerait plus que je me fasse choper !
***
En dépit des inquiétudes de Jenna, Pascal et les Bretons se montrent égaux à eux-mêmes lorsqu’ils la saluent. Pascal la gratifie d’un grand sourire et de bises enthousiastes, envoyant un signal bien éloigné de celui de la rancœur dont Diana lui a fait part. Interloquée, Jenna reste vigilante, toutefois tout lui semble normal. Elle n’observe aucune messe basse entre les Bretons et Pascal et se détend un peu.
Au bout d’un moment, Pascal se laisse tomber à côté de Jenna :
— Ça va ? lui demande-t-il.
Prudente, Jenna répond :
— Oui, pourquoi ça n’irait pas ?
— Bah Diana est assez remontée contre toi, donc j’avais peur que vous vous soyez disputées, ça me ferait vraiment chier que vous ne vous parliez plus. C’est ma copine mais tu es une personne avec qui j’aime bien discuter et je n’ai pas envie de devoir mettre une distance entre nous.
Une alarme s’allume dans l’esprit de Jenna, d’autant que, maintenant qu’elle est songe, son amie a beaucoup insisté quand elle l’a appelé avant-hier pour ne pas qu’elle parle d’elle avec Pascal.
— Pourquoi Diana et moi on se disputerait ?
— Euh… Je ne veux pas t’accuser de quoi que ce soit, mais selon Di tu n’arrêtes pas de critiquer notre relation et de m’en mettre plein la gueule donc ça la gave. Elle m’a dit qu’elle allait mettre les points sur les i avec toi pour que tu arrêtes d’essayer de l’influencer.
Devant cette version bien différente de celle de Diana, Jenna s’étrangle à demi.
— Pardon ?! Tu plaisantes, j’espère ? Au contraire, je passe mon temps à essayer qu’elle se mette à ta place et temporise vos problèmes !
— Quels problèmes ? rebondit Pascal dont l’étonnement paraît sincère. De quoi tu parles ? Diana ne m’a jamais rien reproché. Elle m’en veut pour quelque chose ?
C’est quoi ce plan encore ?!
— Euhhhh, pardon Pascal mais ce n’est pas à moi de te le dire, bredouille Jenna. Par contre, là je ne comprends pas tout, comme dirait Marjo…
— Moi non plus, lâche Pascal. J’ai eu Diana hier au téléphone et tout allait bien. Je lui ai proposé de venir ce week-end mais, comme d’habitude, elle a décliné parce qu’elle avait une soirée avec ses copines. Donc, je n’ai pas insisté.
Gné ? Je suis blonde ou quoi ? OK, je suis blonde… mais là, je suis paumée. Pascal sait ou alors Diana a tout inventé ?
Jenna hésite… le risque est grand toutefois, il faut qu’elle sache :
— Pascal… tu as quelque chose à me reprocher ? Genre, tu penses que j’essaie de foutre la merde entre Diana et toi ?
— Mais pas du tout ! C’est Diana qui est persuadée que tu fais tout pour nous séparer parce qu’elle pense que tu es jalouse d’elle.
— Absolument pas ! s’agace Jenna. J’ai tout fait pour que vous vous remettiez ensemble. Au contraire, je suis super contente que deux de mes amis soient en couple. Et en vrai, je ne vois pas trop de quoi je serais jalouse.
Pascal soupire :
— Parce que selon elle, tu veux être au centre de l’attention des mecs et que du coup ça te fait chier d’avoir de la concurrence dans la bande. Elle dit que tu n’arrêtes pas de la rabaisser et souffre de tes remarques, comme il n’y a pas si longtemps quand tu lui as claqué qu’elle avait les cheveux gras.
— Mais c’est elle qui a dit que ses cheveux graissaient et qu’elle devait les laver ! s’outre Jenna. OK, j’ai confirmé — parce que c’était vrai— mais ça s’arrête là. Je n’ai jamais eu l’intention de la descendre ou de la dévaloriser !
110 commentaires
La Plume d'Ellen
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Il y a 3 mois
Jess Swann
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Il y a 3 mois
Didier-40
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Il y a 3 mois
Jess Swann
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Il y a 3 mois