Fyctia

Phil à peine parti pour son stage, Jenna reçoit la prévisible visite de Diana.

— Qu’est-ce que Phil t’a dit sur la soirée ? l’interroge-t-elle en guise de salut. J’ai essayé d’appeler Pascal plusieurs fois hier mais il m’a laissée atterrir sur son répondeur.

— Bonjour, je vais très bien, merci de t’en soucier. Tu veux un petit café ?

— Désolée… c’est juste que je n’ai pas dormi de la nuit à cause de ça, du coup, je veux bien un café.

Mal à l’aise, Jenna prend son temps pour les servir. Elle n’est pas sûre que répéter à Diana la conversation entre Pascal et Phil soit une bonne idée et cela pour de multiples raisons.

— Jen… si tu sais quelque chose, je t’en supplie, crache le morceau ! insiste Diana.

— OK, cède Jenna. Mais je ne t’ai rien dit… En fait, comme je t’en avais avertie, Thierry était à la soirée et Pascal s’est bien rendu compte que tu l’avais mythoné…

Diana blêmit :

— Merde… et ?

À contrecœur, Jenna lui résume les griefs de Pascal. Plus elle parle, plus Diana se décompose.

— Il a osé dire que je ne faisais pas d’efforts !

— Reconnais que tu fais rarement le déplacement pour aller le voir, coasse Jenna d’une petite voix.

— Ah ouais, donc on en est là ? On compte les points et visiblement tu es du côté de Pascal ! s’énerve Diana.

— Je ne suis du côté de person…

— Non, c’est bon Jen, j’ai compris ! la coupe Diana. Tu sais quoi ? J’en ai ras le bol que tout le monde soit sans arrêt contre moi ! C’est clair que je suis toujours la cinquième roue du carrosse et que quoi qu’il arrive, j’ai tort !

— Di, admet quand même que pour same… tente Jenna.

— Bah voyons, je ne suis pas allée à sa pendaison de crémaillère alors c’est moi la méchante. Par contre, personne ne trouve ça nul que Pascal préfère passer ma soirée d’anniversaire avec ses copains plutôt que de venir à ma fête !

Sainte-Patience, priez pour moi…

— Je n’ai jamais dit ça ! proteste Jenna. La seule chose que je dis, c’est que les torts sont partagés. Il n’y a pas Blanche-Neige d’un côté et le grand méchant loup de l’autre. Tu as sciemment menti à Pascal au sujet de samedi donc ce n’est pas étonnant qu’il l’ait mal pris.

— Venant d’une personne qui passe son temps à tromper son mec et à lui bourrer le mou, je trouve ça un peu fort de café !

— Je n’ai jamais prétendu être exemplaire ! Et là, ce n’est pas le problème. Le truc, c’est que Pascal a l’impression d’être toujours celui qui fait un pas vers toi.

— Pffff, de toute façon, j’en ai trop marre. Ça ne rime à rien cette histoire. Puisque c’est trop demander à Pascal de prendre sa voiture pour venir me voir, autant tout arrêter. Je vais le larguer et après je me casse en Italie, au moins là-bas, j’ai des vraies amies.

Mais comment c’est possible que les choses dégénèrent à ce point-là ?! s’effare Jenna qui ne sait plus comment réagir.

— Di, tu dis ça sous le coup de l’émotion et du manque de sommeil, soupire-t-elle. Si je peux te donner un conseil — parce que même si tu crois le contraire, je ne suis pas contre toi— prends le temps de réfléchir et ne fais rien sur un coup de tête.

— Non, ma décision est prise. Là-dessus, j’y vais. Merci pour le café et le soutien, ironise-t-elle.

— Raaa attends ! On peut au moins en parler.

— Non, c’est bon j’ai des trucs à faire.

— Comme tu voudras, renonce Jenna.

Après le départ de Diana, elle laisse échapper un soupir las. Putain, je savais que je n’aurais pas dû m’en mêler !

***

Après sa dispute avec Diana, Jenna va travailler. Phil la récupère à la sortie du centre et ils passent une soirée pépère chez Jenna.

— C’est étonnant que Diana ne soit pas passée, remarque Phil alors qu’ils s’apprêtent à se coucher.

Jenna grimace.

— Disons qu’on s’est un peu pris la tête ce matin, élude-t-elle.

— Ah… Bah, ça s’arrangera va !

Sur ces paroles hautement consolatrices, Phil entreprend ses habituelles manœuvres d’approche. Et c’est reparti pour un tour… je sens que ça va être une semaine de merde.

***

Le lendemain, après le départ de Phil, Jenna va prendre des nouvelles de Diana. J’espère qu’elle est de meilleure humeur qu’hier, souhaite-t-elle tout en frappant à la porte. Lorsque Diana lui ouvre, elle est encore en pyjama.

—Alors, ça va ? lui demande platement Jenna.

— Bof… Enfin, Pascal a quand même daigné me rappeler hier soir après que je lui ai laissé cinq messages.

— Et ?

— Je lui ai dit que je comptais partir en Italie après mon anniversaire et rien… Zéro réaction, s’énerve Diana. Je te jure, si je ne devais pas attendre les résultats du CAPES au cas improbable où j’irai à l’oral, je me casserai maintenant.

Jenna réprime un soupir. Et c’est reparti pour le drame… j’aurais dû rester chez moi.

— Ce n’est pas en te barrant en Italie que ça va s’arranger entre vous.

— Je ne suis pas du tout sûre de vouloir continuer avec lui, crache Diana. Enfin, je vais passer le week-end avec lui dans son nouvel appart, on verra bien comment ça se passe.

Elles bavardent encore une petite heure puis Jenna rentre chez elle afin de faire le ménage et les courses.

***

La semaine s’écoule lentement… Jenna passe toutes ses soirées avec Phil et partage le reste de son temps entre les tâches ménagères, son travail et les hésitations de Diana qui change d’avis comme de chemise. Le mercredi, elle annonce à Jenna qu’elle va tout tenter pour arranger les choses avec Pascal… Toutefois, le lendemain :

— J’ai décidé de partir avec Hester en Normandie pour le week-end.

— Hein ?! s’étonne Jenna. Je croyais que tu devais aller chez Pascal.

— Ouais, mais je n’ai plus trop envie…

Raaaa mais ce n’est pas possible ! Quelle girouette !

— Et Pascal, comment il a pris le fait que tu annules ?

— Je ne compte pas lui dire, rétorque Diana. Si je lui manquais tant que ça, il ferait l’effort de me téléphoner ou il serait venu me voir cette semaine.

— Enfin, Di, tu sais qu’il bosse… soupire Jenna.

— C’est ce qu’il dit… doute Diana.

Jenna renonce à lui faire entendre raison et change de sujet.

***

Finalement Diana change une ultime fois d’avis le samedi. Elle ira chez Pascal.

— Comme tu le sens, répond Jenna, blasée par ses atermoiements.

— Tu crois que j’ai tort ? s’inquiète Diana.

— Je ne pense rien du tout. C’est ton histoire, c’est toi qui vois.

— OK… sympa, merci pour ton soutien, lâche Diana, visiblement vexée.

Agacée, Jenna serre les dents et se lève.

— Bon, je vais y aller, Phil m’attend pour qu’on rentre à son appart. Bon week-end. On se voit la semaine prochaine si tu es là. Par contre, je repars chez mes parents mercredi en fin de journée, sauf si je bosse.