Fyctia

Le lendemain matin, après avoir dit au revoir à Philippe — qui viendra la rejoindre chez elle le vendredi soir attendu qu’ils sont invités à une petite fête de rentrée chez Diana — Jen se prépare soigneusement. Elle passe un pull, une jupe crayon et des bas noirs puis elle se fait un chignon flou pour peaufiner son look. Une fois coiffée, elle se maquille légèrement. Satisfaite de son apparence, elle attrape sac, manteau et bottes et sort à la hâte. Hors de question de prendre le risque de manquer son train !

Une fois à la gare, c’est la douche froide… Le train de dix heures que doit prendre Jenna est annoncé avec un retard indéterminé. Mais pourquoi faut-il que l’univers m’en veuille à ce point ? se demande-t-elle tout en serrant frileusement les pans de son manteau autour de son corps. En ce début d’année, il souffle un vent glacial et les voyageurs massés sur le quai en sont les premières victimes. Le temps défile et une heure se passe. Les doigts gourds, Jenna compose un texto à Kristian pour le prévenir de son retard. Au bout d’un quart d’heure, il l’appelle.

— Je suis sur la route, tu veux que je vienne te chercher ?

— C’est gentil mais je ne vais te faire te taper deux heures de trajet supplémentaires.

— Ça ne me dérange pas la miss, assure-t-il.

— Mon train devrait être là dans vingt minutes si tout va bien. Je serais là vers midi et demi, dis-moi où tu seras et je te rejoindrai.

— Tu es sûre que tu ne veux pas que je vienne ? insiste Kristian.

— Oui, je te l’ai dit. Mon train arrive bientôt, inutile que tu fasses la route.

— Comme tu veux. Mais si tu vois qu’il tarde encore, tu m’appelles et j’arrive.

Jenna lève les yeux au ciel devant son entêtement et promet de lui envoyer un texto dès qu’elle sera en route.

***

Avec presque deux heures de retard sur son horaire initial, Jenna arrive enfin. Son sac de voyage pesant lourdement sur son épaule, elle rejoint Kristian au buffet de la gare où il patiente. Leurs yeux se trouvent tandis qu’elle traverse la salle et il se lève à son approche. Un sourire amusé échappe à Jenna en découvrant qu’il est lui aussi tout de noir vêtu. Pantalon de ville et veste habillée, Kristian est comme toujours très élégant. Ses prunelles marron enveloppent chaleureusement Jenna et il se penche pour lui faire la bise.

— Tu es hyper classe, lui glisse-t-il. J’adore, tu es trop jolie.

Dans le ventre de Jenna, les papillons en frétillent de plaisir. Elle s’est habillée ainsi uniquement pour lui et elle est ravie de voir ses efforts remarqués.

— Je te retourne le compliment.

— Tu as l’air gelée, je t’offre un petit café pour te réchauffer ? propose Kristian tout en faisant signe au serveur.

Souriante, Jenna opine d’un signe de tête et s’installe en face de lui. Leurs cafés servis, ils bavardent.

— Alors ? Ton concours ? interroge Jenna.

— Bah écoute, ça s’est bien passé. Je suis plutôt confiant, je pense que j’irai à l’oral cette fois.

— Je te le souhaite, je suis sûre que tu es fait pour ça.

Jenna ne ment pas. Elle trouve que Kristian a un côté protecteur et rassurant.

— Et toi alors ? Quoi de neuf ? Tu as eu d’autres nouvelles de la fac ?

Réprimant une grimace, Jenna lui résume sa conversation avec Hélène, depuis sa nouvelle maladie en s’attardant sur ce qu’elle lui a raconté sur Criquet et Igor :

— Je ne sais pas si je dois en parler ou non à Igor. Quand je l’ai eu au téléphone la semaine dernière, il était total déprimé. J’ai peur de faire pire que mieux en confirmant ses doutes. Qu’est-ce que tu en penses, toi ?

— À mon avis, tu devrais garder ça pour toi, conseille Kristian après quelques secondes de réflexion. Déjà, Hélène n’est pas la plus fiable des sources. Et même si c’est vrai, il n’y a aucune preuve. Igor ne peut rien faire contre ta prof, lui dire ne l’aidera pas à aller mieux et tu risques de griller tes chances de retourner à la fac l’année prochaine.

— On ne souffre pas de ce qu’on ignore, approuve Jenna. Et c’est vrai qu’Hélène n’est pas la fille la plus crédible du monde.

— Dis plutôt qu’elle est mytho, s’esclaffe Kristian.

— Tu sais ce qu’on dit… il n’y a qu’un bon menteur qui peut en reconnaître un autre, plaisante Jenna d’un ton acide amer.

Une légère grimace déforme brièvement le visage de Kristian puis il lui propose une cigarette d’un geste nonchalant.

Leurs cafés et cigarettes terminées, ils se lèvent. Plus rapide qu’elle, Kristian ramasse le sac de voyage de Jenna.

— C’est bon, je peux le… commence-t-elle à protester.

— Non, la coupe Kristian. Je ne veux rien entendre.

***

Une fois arrivés chez Jenna, Kristian dépose leurs sacs sous le plan de travail tandis qu’elle range son manteau. Kristian se tourne ensuite vers elle, agitant le dernier CD de Goldman.

— Je peux le mettre ? Je ne l’ai pas encore.

— Oui bien sûr. Tu veux manger quelque chose ? Je peux nous faire des pâtes.

Un sourire canaille aux lèvres, il répond.

— Non ça va la miss, merci. Mais toi tu as peut-être un peu faim… je peux te proposer une petite mise en bouche.

Amusée, elle fait mine de ne pas comprendre et le gratifie d’un sourire innocent.

— Oh, j’ai bien déjeuné ce matin.

— Ce n’est pas gentil ce que tu fais. Tu m’as promis un cadeau.

— Tsss, ce n’est vraiment pas beau de réclamer…

Tout en parlant, Jenna s’approche de Kristian et leurs doigts se frôlent. Souriant, il l’attire contre lui, fusionnant leurs bouches. D’un mouvement doux, Jenna le pousse vers le canapé avant de défaire son ceinturon.

— Mmm oui, gémit Kristian alors qu’elle lui offre son présent spécial.

Au bout de plusieurs minutes, les doigts de Kristian se crispent dans les cheveux de Jenna et il jouit dans un long râle de plaisir.

— Joyeux anniversaire, chuchote Jenna après s’être redressée.

La prenant par la taille, Kristian la ramène sur lui et prend ses lèvres pour un long baiser.

— Merci, murmure-t-il. C’était le plus beau cadeau du monde.

— N’exagère pas quand même, glousse Jenna.

— Je le pense vraiment !

Kristian met une telle ferveur dans son affirmation qu’elle éclate de rire. Ses doigts se perdent dans les cheveux de Kristian et elle le regarde longuement avant de se détacher de lui.

— Je nous prépare un petit café ?

— Ah ça n’est pas de refus, approuve Kristian.