Fyctia
Chapitre 22 - Albane
J'hésite un instant avant de poser à Julie la question qui me brûle les lèvres. Je la fixe, espérant une réponse différente de ce que je redoute déjà.
- Julie… Tu as des nouvelles de ton frère ?
Ma voix s'est affaiblie lorsque j'ai posé la question. Julie relève enfin les yeux vers moi, l’air embêté. Elle hésite à parler, puis finit par soupirer et d'un calme absolu me répond.
- Oui j'en ai.
Mon cœur se serre, je retiens mon souffle.
- Et alors ? Il… il va venir ? Il a dit quelque chose ?
Julie baisse maintenant le regard, jouant nerveusement avec ses doigts. Elle prend une profonde inspiration avant de lâcher la vérité.
- Il a repris le travail. Et il… il fait comme si de rien n’était.
Je sens un vide s’ouvrir sous moi. Comme si je venais de recevoir un coup en pleine poitrine. Je m’attendais à une explication, un regret, un signe… mais pas à ça. Pas à cette indifférence.
- Comme si de rien n’était… ?
J'arrive à dire, dans un souffle incrédule.
Julie est visiblement mal à l’aise. Charles, jusque-là silencieux, serre les poings, l’air contrarié, mais il ne dit rien. Elle a l'air hésitante avant de me répondre.
- Je suis désolée, Albane. Je sais que ce n’est pas ce que tu voulais entendre.
Je laisse un temps de pause. J'ai l'habitude d'encaisser ces derniers temps décidément. Tout le monde reste silencieux dans la chambre. Je décide, pour éviter de sombrer dans le chagrin, et de continuer cette situation malaisante, de brusquement de sujet. Alors, d'un ton vif je tente de masquer ma peine.
- Et le voyage en Laponie ? Tu penses qu’on peut y aller ensemble ?
Julie semble soulagée du changement de conversation, mais son visage se ferme de nouveau légèrement.
- Oh… Albane, je suis désolée, mais je ne peux pas. Mon travail ne me permet pas de prendre des congés en ce moment
Nouvelle claque. j'encaisse le coup. Ce voyage, je l'avais tant rêvé… C’était censé être un moment magique, un moment unique. D’abord avec Aaron, maintenant avec Julie… mais à chaque fois, ça m'échappe.
- Décidément, tout le monde me lâche.
Ma pensée s'est formée lors d'un rire forcé. Je ne voulais pas dire ça. Julie secoue immédiatement la tête, visiblement blessée.
- Non, Albane ! Ce n’est pas ça du tout ! Je veux venir, vraiment, mais ce n’est pas possible en ce moment… Et tu sais que je suis là pour toi.
Je force un sourire, mais je sens une boule dans ma gorge. Je ne sais plus si je dois m’accrocher à mes rêves ou commencer à les abandonner.
À côté de moi, Charles reste silencieux, attentif, observant ma détresse que j'essaie tant bien que mal de cacher. Mais dans son regard, il y a autre chose… Comme une idée qui germe.
Un silence s’installe après notre conversation. Julie jette un coup d’œil à son téléphone et soupire légèrement.
- Je suis désolée Albane, mais je vais devoir y aller. Je dois finir la campagne marketing de mon client avant demain matin.
Je comprends, même si une part de moi se sent un peu abandonnée. Je n'ai pas envie de rester seule… mais je ne peux pas non plus forcer les gens à mettre leur vie entre parenthèses pour moi. Je tente de lui sourire.
- Pas de souci, travaille bien.
Julie s'adoucit.
- Je reviendrai dès que je peux, d’accord ? Et si tu as besoin de parler, tu sais où me trouver.
J'acquiesce sans grande conviction. Julie embrasse mon front rapidement, adresse un signe de tête à Charles, puis quitte la chambre.
La porte se referme. Je joue distraitement avec la couverture de mon lit, l’air perdu. Je n’ai plus la force de prétendre que tout va bien. Charles, assis dans le fauteuil à côté de moi, m’observe. Il pourrait partir lui aussi… Mais il ne le fait pas.
Il a l'air si calme.
- Je vais rester un peu.
Je relève les yeux vers lui, légèrement surprise.
- Tu n’as pas mieux à faire ?
Il hausse les épaules, un léger sourire au coin des lèvres.
- Non. Et puis, je t’ai dit que j’étais en charge de ta surveillance, non ?
J'esquisse un sourire malgré moi. Sa présence me fait du bien. Je n’essaie pas de minimiser ce que je ressens, ni de lui dire que tout ira bien. Il est juste là, et c’est tout ce dont j'ai besoin en ce moment.
Je m’enfonce un peu plus dans mon oreiller, soulagée de ne pas être seule pour affronter cette fin de journée.
Il a l'air de chercher ses mots avec cette lueur malicieuse dans le regard.
- Tu sais… je suis déjà allé en Laponie
Je me sens intriguée. Il est vrai que je n'ai pas prit le temps de discuter de son tour du monde avec lui depuis qu'il est rentré.
- Sérieux ? Et tu n’en as même pas parlé avant ?
Il fait mine de réfléchir.
- C’est que j’attendais le bon moment… et puis, il faut bien garder un peu de mystère, non ?
Je roule des yeux avec amusement.
- Alors, c’était comment ?
Un sourire étire les lèvres de Charles. Il s’enfonce dans son fauteuil, croise les bras et commence son récit.
- C’était magique… et glacial ! Déjà, je me suis rendu compte qu’un manteau « chaud » en France ne veut absolument rien dire là-bas. Je grelottais comme un con pendant les trois premiers jours.
Je ris légèrement, imaginant parfaitement Charles tremblant sous une montagne de vêtements.
- Mais honnêtement, c’est l’un des plus beaux endroits que j’ai vus. Les forêts enneigées, les rennes qui traversent la route comme si c’était normal, les chiens de traîneau… Et les aurores boréales, Albane. Ça, c’est indescriptible. On a l’impression que le ciel danse pour toi.
J'écoute avec fascination, transportée par ses mots. Je ferme les yeux un instant, essayant d’imaginer ce spectacle. Nous avons tous les deux l'air fasciné, finalement.
- J’ai toujours rêvé de voir ça en vrai, mais mon rêve semble désormais inaccessible. Je ne me vois pas voyager seule, d'autant plus maintenant que j'ai ce maudit diabète à gérer.
- Albane tu dois y aller. Ce voyage, il t’attend.
Il a ce sourire si doux sur le visage…
- Et puis… tu sais… J’ai été un très bon guide là-bas. Enfin, c’est ce que mon ego aime croire.
J'arque un sourcil, est-il vraiment en train de sous-entendre qu'il pourrait m'accompagner ?
Je réponds donc de manière amusée.
- Ah oui ? Tu te vantes d’être un guide touristique maintenant ?
Il prend un air faussement sérieux.
- Absolument. Orientation parfaite, connaissances locales et… zéro obligations professionnelles.
Je plisse les yeux, sentant qu'il veut en venir quelque part.
- Charles… qu’est-ce que tu es en train de me dire ?
Il se redresse légèrement, plongeant son regard dans le mien.
- Je suis en train de dire que, si tu veux, je peux venir avec toi.
Mon cœur rate un battement. Je ne m'attendais pas à ça. Je ne sais même pas comment réagir.
- Tu plaisantes ?
Il a l'air sincère.
- Pas du tout. Je n’ai rien qui me retient ici. Et puis, ce serait dommage de gâcher un si beau voyage, non ?
Je l’observe, cherchant à déceler si c’est une blague… mais non. Il est sérieux. L’idée est à la fois folle et incroyablement tentante.
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L'amisolitaire 🔥
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Il y a 2 jours
Juxbook
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Il y a 12 jours
petites.plumes
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Charlyemorand
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Alsid Kaluende
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Sarael
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Origami
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Sarael
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Il y a 16 jours