Fyctia
Abigail
7240.
Cela fait 7240 jours que je suis condamnée à mort.
Encore 60 jours, et cela fera 20 ans.
20 ans que cette condamnation est encrée en moi, que je ne m’en défais pas.
Aujourd’hui j’ai 35 ans. J’ai passé plus de temps à l’intérieur de cette prison qu’à l’extérieur.
Je peine à me rappeler ma jeunesse, mes souvenirs me font du mal.
J’étais une jeune fille pétillante, je suis devenue atone.
Je faisais de beaux rêves, je ne fais que d’horribles cauchemars.
J’étais libre, je suis captive.
Je suis condamnée à mort.
Et je sais que la date d’exécution est proche.
60 jours.
Il ne me reste que 60 jours à vivre.
On vient juste de me l’apprendre.
Je suis misérable, froide.
Je ne sais pas quoi faire, quoi penser.
Je suis seule.
Seule depuis tellement de temps.
- AJ !
Enfin seule, façon de parler…
- AJ ! Si tu m’entends frappe une fois.
Je pris une cuillère et la lança une fois sur l’un des barreaux de la cellule.
- AJ ! Je viens d’apprendre pour ta date. Je suis désolée ma belle.
Est-ce que ça va ?
Je repris la cuillère et l’abatis sur le barreau une fois de plus. Messaline* a inventé un code pour qu’on puisse se comprendre. Quand je tape une fois, cela veut dire oui, deux fois : non. Ça ne va pas plus loin, mais elle n’a pas besoin de plus pour faire la conversation.
Ça fait tellement longtemps que je ne parle plus. Cela ne m’intéresse pas. Qui m’écouterait de toute façon ?
- J’étais énervée quand ils m’ont donné la mienne. Il ne faut pas se laisser faire ma belle. Il faut qu’on se rebelle. Attends que je retrouve une de mes friandises. Ils ne savent pas à qui ils ont à faire !
En effet, je n’aimerais pas être l’ennemie de Messaline.
Cette fille est incroyable.
Une psychopathe.
Une tueuse en série.
Je ne connais même pas son vrai prénom.
Elle a commencé à me raconter son histoire lorsqu’on s’est retrouvée toutes les deux dans ce couloir déprimant.
Elle a été arrêtée après avoir tué cinq personnes, dont son mari, deux anciens amants et deux autres hommes. Les gens pensent cependant qu’elle est responsable de plusieurs autres morts. Surnommée Messaline par les médias, elle aurait expliqué avoir tué ces hommes parce qu’ils « méritaient de mourir ». Joueuse invétérée, les autorités croient qu’elle a tué pour pouvoir financer sa dépendance. Elle m’a dit à moi que c’était juste une façon de s'amuser un peu.
Je suis bien contente que des barreaux nous séparent. Je n’ai pas envie de jouer avec elle.
- AJ, fit la voix d’un gardien.
Je levai la tête.
- C’est la journée des nouvelles aujourd’hui. Une journaliste de New York demande à te voir. Est-ce que tu acceptes ?
Une journaliste de New York ? Je fronçais les yeux. Qui voulait me voir ? Pourquoi maintenant ?
- On ne va pas y passer la journée, tu veux la voir ou pas ?
- Oui, elle la verra, répondit Messaline.
- Super ! A tout’, les filles.
- Salut, beau gosse, roucoula-t-elle, revient quand tu veux ! Mais le gardien repartait déjà, haussant les épaules.
Une fois que la porte fit fermée, Messaline continua :
- AJ, c’est une super idée ! Tu vas pouvoir raconter ton histoire.
Raconter mon histoire ? A-t-elle oublié que je ne parlais pas ?
Elle doit lire dans mes pensées, car elle enchaîne aussitôt :
- Il va falloir que tu trouves une manière ou une autre de le faire. Si tu es innocente, il faut le dire.
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*Messaline : Femme particulièrement dévergondée, caractérisée par un appétit de luxe, une soif de plaisir et un esprit de lucre immodérés et ne reculant pas devant le meurtre pour parvenir à ses fins.
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Livia Tournois
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